Madame Chrysanthème/17

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Calmann Lévy (p. 95-96).
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XVII


Toujours ce bruit de cigales, strident, immense, éternel, qui sort nuit et jour de ces campagnes japonaises. Il est partout et sans cesse, à n’importe quelle heure brûlante de la journée, à n’importe quelle heure fraîche de la nuit. Au milieu de la rade, dès notre arrivée, nous l’avions entendu qui nous venait à la fois des deux rives, des deux murailles de vertes montagnes. Il est obsédant, infatigable ; il est comme la manifestation, le bruit même de la vie spéciale à cette région de la terre. Il est la voix de l’été dans ces îles ; il est un chant de fête inconscient, toujours égal à lui-même, et ayant constamment l’air de s’enfler, de s’élever, dans une plus grande exaltation du bonheur de vivre.

Il est, pour moi, le bruit caractéristique de ce pays, — avec le cri de cette espèce de gerfaut qui, lui aussi, avait salué notre entrée au Japon. Au-dessus des vallées et des baies profondes, ces oiseaux planent, en poussant de temps à autre leurs trois : « Han ! han ! han ! » d’un timbre triste, comme au comble de l’étonnement pénible, de la douleur. — Et les montagnes répètent leur cri.