Martin l’enfant trouvé ou les mémoires d’un valet de chambre/III/15

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XV


CHAPITRE XV.


le souper.


La place qui nous avait été désignée pour faire nos exercices, se trouvant assez loin des dernières maisons de Senlis, nous habitions dans la voiture nomade.

Quoique la recette eût été considérable, le souper qui suivit la représentation fut triste, contraint. La nuit était magnifique ; nous soupâmes sous notre tente. La mère Major, intérieurement courroucée, sans doute, d’avoir perdu l’occasion de tuer ou de blesser mortellement Basquine, en la faisant choir du faîte de la pyramide humaine, restait silencieuse, jetant de temps à autre un regard farouche sur le paillasse. Celui-ci buvait largement. Mais son habituelle faconde, ordurière et obscène, s’était presque entièrement éteinte ce soir-là. L’homme-poisson, timide comme toujours, mangeait discrètement, se faisait petit pour ne gêner personne, tâchant de ne pas attirer l’attention, afin d’échapper aux brutalités accoutumées du pitre.

La Levrasse semblait profondément préoccupée ; quoiqu’il fût généralement assez sobre, il buvait coup sur coup de grands verres de vin ; on eût dit qu’il cherchait à s’étourdir ; plusieurs fois je surpris son regard brillant et allumé attaché sur Basquine, avec une expression qui me troublait et me faisait frissonner, tandis que notre petite compagne, obéissant probablement aux secrètes instructions de Bamboche, s’efforçait de se montrer d’une pétulante gaîté ; mais à ces joyeuses explosions succédaient de fréquents temps d’arrêt, car ces éclats de gaîté factice cachaient des angoisses que je ressentais moi-même, en songeant que, durant cette nuit, nous devions pour toujours abandonner la troupe.

Bamboche affectait, au contraire, une maussaderie extrême : il parla peu ; pendant tout le repas il bâilla, se détira, se prétendit très-fatigué, puis, au moment où il ne se croyait vu de personne, il se leva de table, en me jetant un regard significatif ; mais, à l’instant où il passait derrière la chaise de la Levrasse, celui-ci, qui n’avait pas paru faire attention à Bamboche, l’arrêta brusquement au passage, et lui dit :

— Où vas-tu ?

— Me coucher : je n’en peux plus !

— On ne se couche pas les uns sans les autres, — ajouta la Levrasse d’un ton sardonique, — reste là !…

— Ça m’est égal, — dit Bamboche, — je vas coucher par terre, je dormirai aussi bien là : on m’éveillera quand le souper sera fini.

Et il s’étendit le long de l’un des pans de toile de notre tente, qui la séparait d’un compartiment servant d’écurie au grand âne noir de la Levrasse.

— Attention, Lucifer… de ne pas m’envoyer de coups de pied à travers la toile, — dit Bamboche, en feignant de succomber au sommeil, et il s’établit par terre de son mieux pour dormir.

Basquine me jeta à la dérobée un regard désolé ; Bamboche nous avait prévenus que, sous le prétexte d’aller se coucher, il quitterait la table au milieu du repas, afin d’achever quelques préparatifs indispensables à notre fuite, nous recommandant de ne pas nous inquiéter de son absence ; mais voyant la Levrasse l’arrêter au passage et lui ordonner de rester, nous crûmes tout perdu : j’imaginai que notre maître avait surpris ou deviné nos projets, et que quelque méchant piège nous attendait.

Bientôt mes craintes redoublèrent, car, au bout d’un instant, la Levrasse tira un carnet de sa poche, y écrivit quelques mots au crayon, et, déchirant la feuille, la passa à la mère Major par-dessus la tête de l’homme-poisson.

La mère Major prit le feuillet sans le lire et regarda la Levrasse d’un air étonné.

— Les enfants ne peuvent pas entendre ces farces-là, — lui dit-il, en jetant sur Basquine un regard étrange.

La mère Major lut… aussitôt une expression de joie infernale éclata sur ses traits, et elle s’écria :

— Ça va…

Alors, remettant le papier au paillasse, elle lui dit d’un ton de défiance farouche :

— Et à toi ? Ça t’va-t-il ?

— Tiens, je crois bien… — reprit le pitre, avec un rire ignoble, après avoir lu. — Quand il n’y en a plus… il y en a encore.

— Oui, — s’écria la mère Major, d’une voix courroucée. — Mais je suis là.

— Enfin, ça va-t-il ? — reprit la Levrasse sans paraître se soucier de l’exclamation de la mégère.

— Oui… ça va, — reprit celle-ci.

— Ça va, — dit le paillasse.

Et rendant le papier à la Levrasse, il chantonna de sa voix enrouée le refrain populaire de l’Enfant do…, l’enfant do…, l’enfant dormira tantôt.

Puis il éclata de rire, pendant que la Levrasse brûlait le feuillet à la lumière d’un quinquet.

J’échangeai un regard avec Basquine ; je vis que, comme moi, elle craignait que les mystérieuses paroles que nous venions d’entendre, ne cachassent quelque nouveau péril pour nous, et n’eussent rapport à la découverte de nos projets d’évasion.

Machinalement je jetai les yeux sur la place où Bamboche s’était couché ;… il avait disparu, en rampant sans doute, et en soulevant la toile qui nous séparait de l’écurie de Lucifer, le grand âne noir.

Bamboche s’était-il ainsi éclipsé avant ou après la lecture du feuillet transmis par la Levrasse à ses acolytes ? Je l’ignorais ; mais mon anxiété redoubla.

Soudain la Levrasse se versa un grand verre de vin, fit signe au paillasse et à la mère Major de l’imiter ; puis, les verres pleins, il dit avec un accent singulier qui me parut sinistre :

— À la santé de Chaton !

Ce toast fut accueilli par les éclats de rire redoublés du paillasse et de la mère Major ; éclats de rire qui me parurent faux, sinistres.

La mère Major, se levant ensuite de table, dit de sa grosse voix enrouée :

— Allons, Bamboche, Basquine, Martin, allons coucher… graines de gueux.

— Est-ce que tu es sourd, toi ?… — dit la Levrasse en se baissant vers l’endroit où, quelques instants auparavant, il avait vu Bamboche s’étaler.

— Tiens !… il a filé, — dit la Levrasse, surpris. — Bamboche n’est plus là.

— Bon !… tant mieux ! — s’écria la mère Major comme frappée d’une idée subite, — s’il est allé dans la voiture, on le mettra dehors, et, pour lui apprendre… il couchera à la belle étoile.

— Oui, oui, — dit la Levrasse, en échangeant un regard d’intelligence avec la mère Major, — c’est cela… le gredin couchera dehors.

— Et il n’aura pas de vin sucré comme Basquine et Martin, avant de faire dodo, — ajouta la mère Major.

— J’ai bien regardé dans les trois compartiments de la voiture, — dit le pitre en revenant, après une absence de quelques minutes, — Bamboche n’y est pas.

En disant ces mots, il me sembla que le paillasse mettait un petit paquet dans la main de la mère Major.

— C’est bien entendu, puisque Bamboche fait une farce, — dit la Levrasse, — il faut qu’elle soit bonne, et elle durera toute la nuit.

À chaque instant je m’attendais à voir paraître notre compagnon ; il ne vint pas…

Croire qu’il nous abandonnait et qu’il fuyait seul, c’était impossible. Il nous avait bien dit que, cette nuit-là même, nous devions nous échapper ; mais, quant aux moyens d’évasion, nous les ignorions, et nous nous attendions à les apprendre de lui au moment même de notre fuite.

Nous nous étions tous levés de table au moment où la mère Major avait dit : — Allons coucher.

Après s’être entretenu quelques instants, à voix basse, avec la mégère, debout à l’entrée de notre tente, la Levrasse appela le pitre, et lui parla aussi à l’oreille.

Comme ces trois personnages se trouvaient dans l’ombre, je ne pus voir leurs mouvements ; seulement je crus entendre le choc de deux bouteilles l’une contre l’autre.

Pendant ce temps-là, l’homme-poisson, qui avait jusqu’alors paru complètement étranger à ce qui se passait, allait et venait, s’occupant, selon sa coutume, de rassembler nos couverts de fer, nos gobelets et nos assiettes d’étain.

Basquine s’approcha de moi, et me dit tout bas d’une voix altérée :

— Bamboche ne revient pas… où est-il… que faire ?

— Je ne sais pas, — lui dis-je, consterné.

— Ne buvez pas de vin sucré… et prenez garde à vous cette nuit… — nous dit rapidement et bien bas l’homme-poisson en passant auprès de nous, chargé d’une pile d’ustensiles.

— Allons… la marmaille… au chenil ! — s’écria la mère Major en se retournant vers nous.

— Tant pis pour ce gredin de Bamboche, il couchera avec Lucifer, si ça lui fait plaisir.

Quelques minutes après, nos quinquets étaient éteints et renfermés dans une forte caisse, ainsi que notre vaisselle ; il ne restait au dehors que notre tente, quelques chaises, nos tréteaux et Lucifer qui, deux ou trois fois, se prit à braire violemment ; nous rentrâmes alors tous dans la voiture où nous devions passer la nuit comme l’habitude.

Cette énorme voiture, vraie maison roulante, très-solidement construite, était divisée en trois compartiments : le magasin en avant, séparé par une porte du vestiaire qui était au milieu ; une autre porte séparait le vestiaire de la cabine. Elle n’avait qu’une portière à son arrière ; de petites lucarnes grillagées donnaient intérieurement du jour et de l’air ; la portière fut solidement verrouillée en dedans par la Levrasse qui dit ensuite à Basquine et à moi, en nous emmenant dans le compartiment du milieu formant le vestiaire :

— Comme vous avez beaucoup crampé aujourd’hui, mes petits amours, et que vous devez avoir besoin d’une bonne nuit, au lieu de coucher dans la cabine avec nous tous, vous coucherez seuls, mais séparément pour ne pas vous gêner, toi, petit Martin, dans le magasin de devant, toi Basquine ici dans le vestiaire… Et de plus, comme vous êtes bien gentils, vous allez boire, avant de faire dodo, chacun un bon grand verre de vin sucré… avec de la cannelle ; ça vous fera dormir comme de petits loirs… et ça vous donnera des reins et des jambes pour la représentation de demain. Voyez-vous ? les friands, ils s’en lèchent déjà les lèvres… puis se retournant du côté de la cabine :

— Eh bien, mère Major, ce vin sucré est-il prêt ?

— À la minute, mon homme, je fais fondre le sucre.

— Allons, va chez toi, petit Martin ; je t’apporterai tout-à-l’heure ton vin sucré, — me dit la Levrasse, en m’ouvrant la porte du compartiment de devant.

— Il y a un matelas par terre… tu t’étendras là-dessus et tu dormiras comme un roi.

Il m’était impossible d’éluder cet ordre ou de me refuser à l’exécuter ; j’obéis machinalement, et jetant à Basquine un regard consterné, j’allais entrer dans ce que l’on appelait le magasin… Mais soudain la mère Major, ouvrant la porte de la cabine, dit vivement à la Levrasse :

— Viens donc, mon homme… Poireau a une fameuse idée.

La Levrasse nous laissa seuls et, en rentrant dans la cabine, referma la porte sur lui.

— Nous ne boirons pas ce vin sucré, et tu ne me quitteras pas… cette nuit, — s’écria Basquine.

Et pâle, tremblante, la figure bouleversée, elle se jeta dans mes bras en me disant :

— Oh !… j’ai peur.

Sans répondre à Basquine, je courus pousser le verrou de la porte par laquelle la Levrasse venait de disparaître.

J’avais encore la main sur ce verrou, lorsque la Levrasse, voulant rentrer dans le vestiaire où nous étions, s’écria aussitôt avec un accent de colère et de surprise :

— Comment !… vous êtes enfermés !…

Haletants, épouvantés, nous ne répondîmes pas.

— Allons, voyons, — dit la Levrasse, d’une voix radoucie et mielleuse, — ouvrez, petits farceurs. C’est donc le jour aujourd’hui ? Bamboche se cache, vous deux vous vous enfermez… C’est très-drôle, très-amusant, j’en conviens, mais faut pas que ça dure trop longtemps. Allons, voyons, ouvrez, voilà votre vin sucré.

— N’ouvrons pas, — me dit Basquine, de plus en plus effrayée, car la malheureuse enfant comprenait ce que, dans mon ingénuité, moi, je ne comprenais pas.

— Ils enfonceront la porte :… s’ils veulent… ils me tueront, mais heureusement Bamboche s’est sauvé, — s’écria-t-elle avec exaltation.

— Martin !… Basquine !… ouvrirez-vous à la fin ? — cria la Levrasse en ébranlant la porte.

Soudain plusieurs coups sourds retentirent en dehors et du côté de la portière de la voiture.

J’entendis alors, dans la cabine, la mère Major dire à la Levrasse :

— Tiens… on cogne à la portière.

— C’est ce gueux de Bamboche qui frappe pour rentrer, — dit la voix du paillasse, — ne lui ouvrons pas…

— Bamboche est là… nous sommes sauvés, — s’écria Basquine radieuse en me pressant les deux mains.

— Ah çà, ouvrirez-vous à la fin, — cria la Levrasse, furieux, — voulez-vous que nous fassions sauter la porte ?

— Bamboche est là,… gagnons du temps,… dis-je tout bas à Basquine, un peu rassuré.

Basquine, de la main, me fit signe de garder le silence, et répondit en tâchant de dissimuler son émotion :

— Qui frappe ?

— Comment, qui frappe ? Mais moi, la Levrasse.

— J’ouvrirai tout-à-l’heure, — dit Basquine.

— Pourquoi pas tout de suite ?

— Ah ! parce que…

— Parce que… quoi ?…

— Parce que je veux vous… faire aller… — répondit Basquine en essayant de donner à sa voix un accent de gaîté.

— Ah ! j’en étais sûr. C’était une plaisanterie, — répondit la voix plus rassurée de la Levrasse, — mais, chère petite, la plaisanterie devient fastidieuse ; voyons, ouvrez donc.

— Bien sûr ? nous aurons du vin sucré ? — reprit Basquine.

— Mais puisque j’en ai deux grands verres pour toi et pour Martin, mauvaise petite diablesse.

Pendant cet entretien, hissé jusqu’à une lucarne de la voiture, je tâchais de voir au dehors ou d’entendre Bamboche ; à ma grande surprise, je sentis par bouffées une forte odeur de soufre, et, au milieu de l’obscurité de la nuit, j’aperçus une lueur, faible d’abord, mais qui, augmentant rapidement, jeta bientôt ses reflets rougeâtres sur la toile blanche de notre tente.

D’un bond je sautai à bas de la chaise où j’étais monté, j’allais dire à Basquine ce que je venais d’observer au dehors, lorsque tout-à-coup un morceau du plancher du vestiaire où nous étions, se détacha presque sous nos pieds, comme s’il eût été scié à l’avance, et maintenu jusqu’alors par un support extérieur ; puis, par cette ouverture de dix-huit pouces carrés, nous vîmes soudain sortir la tête et les épaules de Bamboche.

— Vite… nous dit-il, — venez…

Et il disparut pour nous faire place.

— Passe la première, — dis-je à Basquine.

En une minute elle eut aussi disparu par cette espèce de trappe.

Au moment où je suivais Basquine, la porte s’ébranlait violemment sous les efforts de la Levrasse, et presque instantanément j’entendis la voix de la mère Major crier avec épouvante :

— Au feu !… au feu !…

Lorsque, après avoir marché courbé au milieu de plusieurs bottes de paille destinées à la litière de Lucifer, je sortis de dessous la voiture presque en même temps que Basquine… je fus ébloui par une grande flamme qui brillait à ma gauche, et éclairait au loin la campagne.

Devant moi je vis Bamboche tenant à la main une grosse torche de paille allumée.

Me prendre par le bras de la main qu’il avait de libre, m’écarter violemment et lancer son brandon enflammé au milieu de la litière étalée sous la voiture que nous venions de quitter, ce fut pour Bamboche l’affaire d’une seconde.

Le feu qu’avivait encore le courant d’air établi par le trou qui nous avait donné passage, se propageant avec une effrayante rapidité, bientôt la voiture fut intérieurement et extérieurement livrée aux flammes, car Bamboche avait déjà amoncelé plusieurs bottes de paille le long de la portière, seule issue qui restât aux gens enfermés dans la voiture.

— Le feu… — m’écriai-je, lorsque je pus parler, car tout ceci s’était passé avec la rapidité de l’éclair.

— Oui… le feu, — me dit Bamboche, pâle, les traits contractés par une expression de joie féroce. — Oui… le feu… ils vont rôtir dans ce brasier comme des démons qu’ils sont, car ils sont enfermés dans la cabine ; la porte du vestiaire est fermée, et j’ai cloué la portière en dehors…

— Oh !… comme ils crient… les entendez-vous ! — dit Basquine aussi effrayée que moi des hurlements qui s’échappaient de la voiture dont le plancher s’embrasait.

— Tout-à-l’heure ils ne crieront plus, — dit Bamboche.

Puis il ajouta d’une voix précipitée :

— Maintenant à cheval sur Lucifer… dans deux heures nous aurons gagné les bois… je connais le chemin.

— À cheval… nous trois sur Lucifer ? — m’écriai-je, — c’est impossible… montes-y avec Basquine… je tâcherai de vous suivre.

— M’écouteras-tu, — cria Bamboche, d’une voix terrible.

Et me faisant faire volte-face, il me jeta pour ainsi dire en selle sur Lucifer, tout bridé, tout bâté, et qui, effrayé par la flamme de l’incendie, renâclait, couchait ses oreilles, frappait du pied, et tâchait de briser le licou qui l’attachait à un pieu.

— Tu es plus léger que moi, — me dit Bamboche, — reste là, tu assoiras Basquine devant toi, elle te tiendra à bras-le-corps, moi je monterai en croupe… vite… vite.

Basquine, légère comme un oiseau, fut d’un bond placée devant moi.

Les cris des victimes renfermées dans la voiture devenaient affreux.

Bamboche, d’un coup de couteau, trancha la longe qui retenait Lucifer… L’animal, épouvanté, bondit, partit comme un trait, et, au même instant Bamboche, sautant en croupe derrière moi, s’écria :

— Laisse aller Lucifer, il tourne le dos au feu… Il est en bonne route.

Notre poids n’était rien pour ce grand âne d’une vigueur extraordinaire ; mais nous eussions pesé trois fois plus, qu’il fût parti avec la même vélocité, grâce à la terreur que lui causait l’incendie…

Serrant étroitement entre ses genoux la croupe de Lucifer qu’il talonnait vigoureusement, Bamboche se retourna pour jeter un dernier cri de haine, de vengeance et de malédiction sur la voiture en flammes déjà bien loin de nous, et, tendant le poing dans cette direction, il s’écria :

— J’ai attendu long-temps, brigands… mais j’ai mon tour…

Et nous allions toujours devant nous, à travers la nuit obscure, seulement éclairée çà et là par le feu des cailloux étincelants sous le galop furieux de notre monture,… allure effrénée que Bamboche précipitait encore en labourant du bout de son couteau les flancs de Lucifer.