Melchior (Sand — illustré, Hetzel 1853)/Chapitre 1

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J. Hetzel (Œuvres illustrées de George Sand, volume 3p. 87-90).


MELCHIOR

I.

Vers la fin de l’année 1789, un pauvre pilote-côtier nommé Lockrist disparut, un jour de tempête, sous les récifs de la Bretagne. Il laissa deux fils : Henri, qui se maria et vécut comme il put de la pêche des harengs ; et James, qui s’embarqua en qualité de marmiton sous-cambusier.

Vingt ans après, James Lockrist, après avoir été successivement maître-coq d’un grand vaisseau de guerre, cuisinier du gouverneur des Indes, maître d’hôtel de la Chine, et officier de la maison civile du roi de Cambodge, s’établit à la côte de Malabar, et se mit à vivre dans l’opulence. Grâce aux richesses amassées au service de tant d’illustres maîtres, il se construisit une belle habitation dans le goût européen ; après quoi il épousa une riche Anglaise qui lui donna sept enfants.

En devenant mère du dernier, madame Jenny Lockrist mourut. Mais le climat brûlant de l’Inde eut bientôt dévoré sans pitié cette nombreuse postérité.

Il n’en resta qu’une fille, la plus jeune, la plus fluette, la plus impressionnable, et par cela même la plus capable de résister à cette atmosphère de feu : faible roseau qui grandit souple et frêle là où ses frères plus robustes s’étaient desséchés.

En perdant un à un les héritiers prédestinés à son opulence, l’ex-cuisinier du Fils du Ciel (c’est ainsi qu’on appelle l’empereur de la Chine) se détacha presque de ces biens auxquels il semblait condamné à ne pouvoir associer personne.

Il expérimenta combien le luxe a peu de prix pour un homme forcé d’en jouir seul. Sa maison lui sembla moins belle, ses bambous moins élégants, son titre de nabab moins glorieux ; en un mot, cette nouvelle patrie, la patrie de son argent, qu’il avait aimée au point d’oublier la France pendant quarante ans, lui devint peu à peu odieuse en lui enlevant tout l’espoir de sa vieillesse.

Une vive fantaisie d’exilé, et plus encore une fervente sollicitude de père, lui firent souhaiter de revoir les grèves qui l’avaient vu naître, et de soustraire son dernier enfant aux mortelles influences qui le menaçaient.

En conséquence, James Lockrist résolut d’enlever sa chère Jenny au soleil de l’équateur avant l’âge de quinze ans, vers lequel tous ses frères avaient péri. Il commença à convertir sa fortune en argent ; et, comme une aussi vaste entreprise demandait encore au moins une année, il se décida à s’enquérir de la famille qu’il avait laissée en Bretagne, afin de renouer quelque relation avec une contrée où il craignait de se trouver isolé.

À huit mois de là James reçut de France une réponse à ses informations. On lui apprenait que son frère Henri était mort depuis environ vingt ans, laissant dans la misère une veuve et quatorze enfants.

Mais le froid et la faim avaient anéanti la postérité de Henri comme le soleil et le luxe avaient éteint celle de James.

Les survivants étaient réduits, en Bretagne comme dans l’Inde, au nombre de deux : la veuve septuagénaire qui vivait indigente aux environs de Brest, et son fils Melchior Lockrist, qui venait d’obtenir une lieutenance dans la marine marchande.

Ce fut le curé de l’humble village de chaume où le puissant nabab avait vu le jour qui se chargea de lui faire parvenir ces renseignements.

Ce fut une lettre aux formes antiques et paternes, où perçaient, comme dit Goldsmith, l’orgueil du sacerdoce et l’humilité de l’homme ; une lettre toute pleine de timides reproches sur le long oubli où James avait laissé sa famille, d’exhortations communes et maladroites sur la vanité et le mauvais emploi des richesses, d’efforts délicats et chaleureux pour intéresser le nabab à ses pauvres parents.

Il y eut une période de cette lettre où M. Lockrist faillit la jeter avec colère et dédain, et une autre qui émut ses entrailles au point d’amener une larme dans le sillon formé par une ride sur sa joue sèche et safranée.

Et véritablement il était impossible de ne pas se prendre de compassion pour cette pauvre veuve que le curé montrait si pieuse et si pauvre ; de bienveillance pour ce jeune homme qui avait en pleurant quitté sa mère afin de lui être plus utile.

« Melchior, disait le bon curé, est le plus bel homme de la Bretagne, le plus brave marin de l’Océan, le meilleur fils que je connaisse. »

Il ajoutait que ce hardi compagnon était en mer sur le navire Inkle et Yariko frété pour l’archipel indien ; et il terminait en faisant des vœux pour que, dans les hasards de la navigation, l’oncle et le neveu vinssent à se rencontrer.

Une circonstance puissante vint donner une nouvelle ardeur à l’intérêt que la lettre du curé inspira au nabab pour son jeune parent.

Jenny, sa chère Jenny, son fragile et précaire enfant, ressentit les premières atteintes du mal qui n’avait épargné qu’elle, et qui semblait réclamer sa dernière victime. La médecine glissa dans l’oreille paternelle une parole qui eût fait rougir le chaste front de Jenny. Il fallait la marier sans trop de délais.

Cette ordonnance jeta d’abord M. Lockrist dans de grandes perplexités. Outre que sa fille avait encore à attendre six mois l’âge nubile exigé par les lois françaises, il était difficile de lui trouver un mari qui consentît à partir aussitôt pour l’Europe, et à s’y fixer avec elle.

Il savait que de telles conditions sont toujours faciles à éluder après le mariage ; et il ne voyait autour de lui aucun homme dont la loyauté ou le désintéressement lui offrissent de suffisantes garanties.

Enfin, pour dernier obstacle, Jenny, élevée dans une solitude assez romanesque, montrait un invincible dégoût pour tous ces hommes si avides de s’enrichir. Elle prétendait n’accorder son cœur et sa main qu’à un amant digne d’elle, personnage utopique qu’elle avait rencontré dans les livres, et qui ne se trouvait nulle part sous un ciel où l’or semble être plus précieux aux Européens que la vie.

Alors M. Lockrist pensa naturellement à son neveu, ou plutôt Jenny l’y fit penser. Elle écouta avec émotion la lettre du curé breton, et quand elle vit son père touché du portrait de Melchior, elle se jeta dans ses bras en lui disant :

— Je suis bien heureuse à présent, car si je meurs tu ne seras pas seul sur la terre : mon cousin te restera.

De ce moment le nabab n’eut pas un instant de repos qu’il n’eût trouvé son cher, son précieux neveu.

Il écrivit dans toutes les îles, à Ceylan, à Java, à Céram et à Timor. Il s’enquit dans tous les ports de la presqu’île : à Barcelor, à Tucurin, à Paliacate, à Sicacola ; et enfin un jour, un beau jour qu’on attendait sans l’espérer le gouverneur, qui était fort lié avec M. Lockrist et qui lui avait promis de guetter tous les débarquements, lui écrivit que le lieutenant Melchior Lockrist venait d’aborder avec l’Inkle et Yariko dans le port de Calcutta

Aussitôt le nabab monte dans sa litière, et après avoir confié Jenny à sa nourrice, court à la rencontre de son neveu.

Melchior était un grand et robuste garçon, taillé sur un beau type armoricain, un vrai fils de la mer et des tempêtes, hardi de cœur, gauche de manières, superbe au vent de l’artimon, maladroit au rôle d’héritier présomptif, et ne sachant pas plus parler à une jeune miss qu’à un cheval de guerre.

Quand le gouverneur lui ouvrit les portes de son palais, le traita mieux qu’un capitaine de bâtiment, et lui parla d’un oncle riche et généreux qui l’attendait pour l’adopter, Melchior crut faire un rêve ; mais l’expression de sa surprise fut modérée par une forte habitude d’insouciance ; et le

Ma foi, tant mieux !

dont il accueillit ces nouvelles merveilleuses, résuma toute la philosophie pratique d’une existence de marin.

Fidèle aux instructions que M. James lui avait données, le gouverneur laissa complètement ignorer à Melchior l’existence de Jenny. Il lui dit seulement que son oncle l’accueillait en qualité de célibataire, et sous la condition expresse qu’il n’essaierait jamais de se marier sans son consentement.

Cette exigence particulière sembla choquer Melchior, et sa figure, jusqu’alors insoucieuse et calme, prit un air de défiance et de trouble que le gouverneur ne s’expliqua pas bien.

— Diable ! dit-il en laissant tomber le bec de sa chibouque, quelle étrange idée est-ce là ? Mon oncle voudrait-il se débarrasser en ma faveur d’une fille laide et bossue dont personne n’aurait voulu dans la contrée ?

Cette conjecture fit sourire le gouverneur.

— Votre oncle n’a pas de fille bossue, lui dit-il gaiement, tout au contraire, le célibat est sa manie pour lui et pour les autres. Vous ferez bien de vous y conformer.

— Soit ! répondit Melchior en ramassant sa chibouque.

Deux jours après, comme le jeune lieutenant dormait dans son hamac à bord de l’Inkle, il fut réveillé en sursaut par les embrassements d’un petit homme jaune et maigre, habillé des plus riches étoffes de l’Inde taillées sur les modes françaises de 1780.

La toilette de M. Dupleix, gouverneur de l’Inde, dont à cette époque le nabab avait eu l’honneur d’être cuisinier, avait servi de type, durant tout le reste de sa vie, à ses idées sur l’élégance parisienne. Aux marges de son habit de damas nacarat étincelait une garniture de boutons en diamants d’une largeur exorbitante, et son gilet, dont les poches tombaient jusqu’aux genoux, était brodé de perles fines.

Ce digne représentant d’une génération qui s’efface, ce vivant débris de la France de madame Dubarry, portait encore des bas de soie brochés en rose, des souliers à boucles, et une épée dont la garde était montée en pierres précieuses. Melchior eut bien de la peine à s’empêcher de rire en contemplant son oncle dans toute la splendeur de ce costume.

Ils partirent immédiatement ensemble pour l’habitation du nabab, située à une trentaine de lieues au nord de Calcutta.

L’éléphant qui les portait franchit cette distance en une seule journée.

Durant la route, M. Lockrist fit à son neveu un si prolixe éloge de ses propriétés, il entra dans des détails d’affaires si fastidieuses et si monotones, que le jeune marin eut bien de la peine à se tenir éveillé à ses côtés. Mais un trésor dont James était encore plus vain, c’était sa fille Jenny, et ce ne fut pas sans peine qu’il parvint à se taire sur son compte. Ainsi l’avait exigé la jeune Indienne.

Informée des projets de son père, elle voulait que Melchior les ignorât jusqu’au jour où elle le connaîtrait assez pour le juger digne de sa main. Malgré l’impatiente curiosité qui lui faisait désirer l’arrivée de son fiancé inconnu, malgré les rêves dont sa fraîche imagination poétisait l’avenir, une instinctive dignité de jeune femme lui prescrivait d’attendre, pour se promettre, qu’elle fût bien sûre de vouloir se donner.

Jenny s’ennuyait de la solitude ; mais la médecine, qui n’a que des remèdes systématiques, lui administrait le mariage comme elle conseille l’opium, sans tenir compte du discernement qu’exige une organisation délicate par rapport à l’un, une âme fière par rapport à l’autre.

La romanesque fille, remettant donc en pratique une feinte dans le goût de Marivaux (ignorante qu’elle était du commun et de l’invraisemblance de la chose), ne parut d’abord aux yeux de son cousin qu’à l’abri d’un petit rôle de gouvernante qu’elle se créa quatre jours d’avance, et dont tout homme tant soit peu littéraire n’eût pas été dupe pendant quatre heures.

Mais il se trouva que Melchior ne connaissait pas mieux la société que le théâtre ; qu’il n’était pas plus au courant du langage d’une jeune miss abonnée au Court Magazine et à la Revue du monde fashionable de Londres qu’à celui d’une soubrette de comédie. Il ne se douta de rien, s’installa sans façon chez son oncle, examina ses riz, ses mûriers, ses foulards et ses cachemires, avec plus de complaisance que d’intérêt, mangea énormément, but en proportion, fuma les trois quarts de la journée, et dans ses moments perdus fit sans façon la cour à la prétendue gouvernante.

Alors Jenny, révoltée de tant d’audace, jeta le masque et foudroya le téméraire en lui déclarant qu’elle était la fille unique et légitime du nabab James Lockrist.

Mais le marin se remit bientôt de sa surprise ; et, prenant sa main avec plus de cordialité que de galanterie :

— En ce cas, ma belle cousine, je vous demande pardon, lui dit-il ; mais avouez que vous êtes encore plus imprudente que je ne suis coupable. Est-ce pour éprouver mes mœurs que vous m’avez fait subir cette mystification ? L’épreuve était dangereuse, vive Dieu !…

— Arrêtez, Monsieur, dit Jenny profondément blessée du ton et des manières de celui qu’elle avait rêvé si parfait. Je comprends tout ce que vous imaginez ; mais je dois me hâter de vous détromper.

— Dieu me punisse si j’imagine quelque chose, interrompit Melchior.

— Écoutez-moi, Monsieur, reprit Jenny. La volonté, ou, si vous voulez, la fantaisie de mon père est de condamner au célibat tout ce qui l’entoure ; moi particulièrement. C’est dans la crainte que vous ne vinssiez à ébranler mon obéissance qu’il m’a fait passer à vos yeux pour une étrangère ; mais je pense qu’il est un meilleur moyen de détourner les prétendus dangers de notre situation respective : c’est de nous déclarer l’un à l’autre que nous ne nous convenons point, et que jamais nous ne serons tentés d’enfreindre la loi qui nous prescrit l’indifférence.

Une vive expression de joie brilla sur le visage de Melchior.

Jenny sentit à cet aspect que le sien avait pâli.

— S’il en est ainsi, petite cousine, reprit le marin en cherchant encore à s’emparer de la main froide et tremblante de Jenny, faisons mieux : soyons frère et sœur. Je jure que je ne veux rien de plus, et que cet arrangement m’ôte une grande crainte de l’esprit. Voyez-vous, le mariage ne me convient pas plus que la terre à une bonite ; et je m’étais mis dans la tête, depuis quelques jours, que mon oncle…

— C’est bon ! interrompit encore Jenny en retirant sa main, je vous servirai auprès de mon père, je tâcherai qu’il vous fasse part de ses biens pendant ma vie, et qu’il vous adopte après sa mort.

— Oh ! s’il vous plaît, cousine, entendons-nous, dit Melchior en changeant de ton, comme s’il eût compris tout ce que cette générosité renfermait de douleur et de mépris.

« Je n’ai besoin de rien, moi ; je suis jeune, robuste ; un peu plus d’or ne me rendrait pas beaucoup plus content de mon sort que je ne le suis.

« Vous vous trompez diablement… (pardon, ma cousine), vous vous trompez beaucoup si vous croyez que je viens demander l’aumône à mon digne oncle, que j’aime de tout mon cœur, malgré sa culotte de satin et ses manchettes de dentelle. Je ne l’ai pas cherché, moi ; il y a huit jours je ne savais pas seulement qu’il existât.

« J’arrive, il me saute au cou, il m’amène ici, me montre ses richesses, me demande si je serais bien aise de posséder tout cela ; à quoi je répondis toujours affirmativement par forme de politesse. Aujourd’hui vous m’apprenez que vous êtes sa fille : cela change bien les choses. Il ne me reste qu’à me féliciter d’avoir une si jolie parente, à remercier mon oncle de ses bontés pour moi, et à rejoindre mon poste sur le navire Inkle et Yariko, avant que ma personne devienne insupportable.

— Vous semblez douter de notre affection, mon cousin, dit Jenny toute confuse et tout abattue ; c’est une injustice que vous nous faites. »

Et comme elle sentait que c’était là un dénoûment bien triste à des projets si riants, elle ne put cacher une larme qui tremblait au bord de sa paupière.

Melchior reprit courage.

— Cousine, dit-il avec sa manière brusque et franche, je veux vous prouver que je crois à votre amitié et que j’estime votre cœur. Je vais vous confier un désir qui me pèse, mais dont je ne rougis pas. Vous m’aiderez auprès de mon oncle, ou plutôt vous vous chargerez de ma demande.

« Voici : ma mère est une bonne femme ; je n’ai qu’elle à aimer dans le monde ; aussi je l’aime. Elle a élevé, tant qu’elle l’a pu, quatorze enfants, qui tous sont morts sans l’aider. Pour en venir là, il lui a fallu contracter des dettes que dix ans de ma paie ne sauraient éteindre. En attendant, ma mère mourra de faim et de froid.

« Vous ne savez pas ce que c’est que le froid, Jenny ; chez nous c’est un mal qui revient tous les ans, et dont les vieillards souffrent particulièrement. Que mon oncle lui assure six cents livres de rentes ; ce sera fort peu de chose pour lui, et pour moi ce sera un immense service… »

Jenny tendit cette fois sa main au marin.

— Allons trouver mon père ensemble, lui dit-elle ; je me charge de tout.

En les voyant arriver d’un air de bonne intelligence, le visage du nabab s’épanouit.

En trois mots et d’un air d’autorité enfantine, Jenny demanda le capital de six mille livres de rentes pour la mère de Melchior.

— J’ai dit six cents, objecta le jeune homme.

— Et moi je dis six mille, reprit Jenny en riant. Pour nous c’est une bagatelle, et croyez bien que mon père n’en restera pas là. Bientôt nous serons auprès de ma tante ; mais auparavant il faut que le premier navire qui mettra à la voile lui porte cette somme.

— Certainement, certainement, dit M. James, qui, en signant un bon sur une des premières maisons de commerce de Nantes, croyait dresser le contrat de mariage de sa fille avec Melchior ; bientôt nous serons tous réunis, et nous ne nous quitterons plus…

— Oh ! pour ma mère, dit Melchior en embrassant avec effusion son oncle, la bonne femme sera trop heureuse de passer le reste de ses jours avec vous… Quant à moi…… je suis marin !…

— Hein ? hein ? dit le nabab en levant les yeux avec surprise ; et voyant l’air consterné de sa fille, il fronça le sourcil. Rappelez-vous, Melchior, dit-il d’un ton sévère, que je veux être obéi. Auriez-vous donc la fantaisie de former quelque établissement contre mon gré ?…

— Non pas que je sache, cher oncle, dit Melchior.

— Eh bien donc, reprit le nabab, rappelez-vous à quelle condition je signe cette donation en faveur de votre mère… vous ne vous marierez qu’avec ma permission.

— Oh ! pour cela, mon oncle, dit Melchior en souriant, il m’est facile de vous obéir. Recevez ma parole et soyez tranquille.

— Quant à vous, bonne Jenny, dit-il à demi-voix en se tournant vers elle, je vous jure de vous aimer comme ma mère, et jamais autrement.

— Il ne comprend pas ! dit Jenny quand elle fut seule ; et elle fondit en larmes.

Trois jours après, Melchior voulut prendre congé de son oncle, objectant que sa présence à bord de l’Inkle était indispensable.

Le départ de ce navire pour la France était fort prochain.

— Va, dit le nabab, et retiens pour ma fille et moi les deux meilleures chambres du bâtiment. Nous partirons tous ensemble.

— Allons, décidément, pensa Melchior, il ne me sera pas possible de me débarrasser de la tendresse de mon oncle.

Le 2 mars 1825, l’Inkle et Yariko mit à la voile, emportant Melchior et sa famille.