Mes paradis/Les Îles d’or/Premiers pas en équilibre

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XXVIII


Premiers pas en équilibre !
S’en aller devant soi, libre !

On était, contre la terre,
Le lierre pariétaire.

On y rampait sans relâche.
On se dresse. Elle vous lâche.

Un pied la quitte, puis l’autre.
Gestes de petit apôtre !

Bras ouverts et mains tendues
Bénissent les étendues.


Un frisson de peur qui passe !
C’est si grand, partout, l’espace !

Mais vite on se rassérène.
L’espace veut qu’on le prenne.

Si grand, oui ; mais peu farouche !
On en rit à pleine bouche.

On le prend en long, en large.
Gestes de soldat qui charge !

Bras ouverts et mains tendues
Conquièrent les étendues.

On n’est plus le patriarche
À la lente et grave marche.

On va plus vite, plus vite.
À courir il vous invite,

Cet espace où se révèle
Une volupté nouvelle.

On le boit, on le dévore.
On le prend encore, encore.


Cris ! Allure trébuchante !
Gestes d’ivrogne qui chante !

Bras ouverts et mains tendues
Se soûlent des étendues.

Dans le fluide mystère
On baigne, oubliant la terre.

Des pieds à peine on l’effleure.
On va la fuir tout à l’heure.

Libre ! Libre ! On la fuit, libre !
Voilà qu’on perd l’équilibre.

Bras ouverts et mains tendues
Qui battent les étendues

Ont l’air de vouloir vers elles
S’éployer comme des ailes.

Bébé ravi ! Maman folle !
Gestes d’oiseau qui s’envole !