Aller au contenu

Modernités/Corps de ballet/Salomé

La bibliothèque libre.
E. Giraud et Cie, éditeurs (p. 59).


CORPS DE BALLET


SALOMÉ


Tout en tulle, légère et féroce, un grand peigne
Mordant ses crins d’or fauve et d’un air délicat
Du revers de sa main portant sur un grand plat
La tête de Pierrot, dont le front troué saigne,

Elle apparaît dans l’ombre au pied de l’Opéra
Très blanche ; et se tournant, dans sa jupe étoilée
De paillons, vers la tête horrible et mutilée,
Ébauche sur sa lèvre un rire scélérat.

La tête blême et veule avec ses larges plaies
À la tempe et ses yeux révulsés, dont deux taies
Sont les mornes regards, a pour nimbe un louis d’or.

Un louis… et sous son fin maillot taché de boue
Et de sang, Salomé, fille et sœur de la Mort
Rit à l’humanité, que ce louis d’or bafoue.