Mon sillon/02/34

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P. Brunet (p. 279-280).

XXXIV

René à Mélite

Il y a dans ta dernière lettre, ma chère Mélite, une phrase que tu n’as pas, je l’espère, prononcée à la légère. Serait-il vrai que l’espoir me fût permis ! Ma fidélité recevrait-elle cette suprême récompense ? Un mot encore et je pars pour Damper-Coat. M. Brastard a mis le doigt sur un plan qui réaliserait pleinement mes rêves d’avenir. Un de ses amis veut établir une imprimerie à la vapeur. Il lui faut un ruisseau et un homme dans lequel il ait pleine confiance. Le ruisseau coule à Damper-Coat dans notre dernier lambeau de terre, l’homme, ce serait moi, mais la double difficulté se présente : diplôme d’ingénieur, cautionnement. Si ce rêve se réalisait voici ce qui adviendrait : La vieille maison croulante ferait place à une belle usine et à une riante maison d’habitation où se transporteraient immédiatement ma vieille tante et ma chère sœur, et le directeur de l’usine oserait peut-être offrir à mademoiselle Fanny un cœur qui lui est resté fidèle.

Un mot plus explicite, je t’en supplie, parle hardiment du cœur et des lèvres, je t’en donne le pouvoir et le droit. Tout un monde d’espérances revit en moi.

Ton frère impatient et affectionné,

René.