Monod/Victor Hugo et son siècle

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Portraits et Souvenirs
Calmann Lévy, éditeurs (p. 1-14).
VICTOR HUGO[1] ET SON SIÈCLE


La mort de Victor Hugo, le 22 mai 1885, a été un événement européen, un deuil national. Pendant quelques jours, non seulement dans les cercles littéraires et politiques, non seulement à Paris, mais partout et dans la France entière, de l’atelier aux académies, et des salons aux mansardes, toutes les préoccupations, toutes les affaires, tout avait disparu pour ne laisser place qu’à une seule pensée : Victor Hugo se meurt, Victor Hugo est mort. On ne parlait plus ni de la crise ministérielle, ni du Tonkin, ni de l’Afghanistan, ni de l’exposition de peinture, ni du Germinal de M. Zola ; on ne parlait plus que de la santé de Victor Hugo, puis du vide laissé par sa mort. On a été suspendu aux nouvelles de sa maladie avec plus d’anxiété qu’on ne le fut à celles des derniers moments de Thiers ou de Gambetta, et on lui a fait des funérailles qui ne peuvent être comparées qu’au retour des cendres de Napoléon.

Cette émotion, cette douleur, cet enthousiasme peuvent surprendre au premier abord ; on serait tenté d’y voir non seulement de l’exagération, mais même de l’affectation. Lamartine n’était-il pas un aussi grand poète que Victor Hugo ? n’a-t-il pas joué un rôle politique plus considérable ? n’a-t-il pas agi plus fortement encore sur l’âme de ses contemporains ? ne trouve-t-on pas chez lui des idées plus profondes et plus neuves que chez Hugo ? Et pourtant sa mort a passé presque inaperçue. Michelet n’était-il pas un plus grand prosateur que Victor Hugo ? Que sont cependant les honneurs rendus à sa dépouille mortelle, si touchants et si solennels qu’ils aient été, en comparaison de ce concours de tout un peuple rouvrant pour Victor Hugo les portes du Panthéon ? Quand on se rappelle l’habileté consommée avec laquelle les amis de Victor Hugo ont entretenu l’enthousiasme public autour de sa vieillesse, et mis pour ainsi dire son génie en exploitation, on se demande s’il n’y a pas eu dans tout cela quelque mise en scène et un peu de cette badauderie que l’on peut toujours mettre en branle quand on sait se servir de la presse.

Il ne serait pas juste de penser ainsi. Sans doute, il y a eu dans les honneurs rendus à Victor Hugo, dans les manifestations et l’émotion universelles, un peu de cet instinct théâtral qui entraîne toujours inconsciemment les Français ; il s’y trouvait aussi une assez large part de vanité nationale, le désir de glorifier la France en Victor Hugo ; mais l’émotion n’en était pas moins profonde et l’enthousiasme réel. J’ajouterai que les hommages rendus à l’homme de génie disparu étaient mérités.

Pour juger l’importance d’un écrivain, il ne faut pas seulement tenir compte de son talent littéraire, mais aussi de ses actes, du rôle qu’il a joué, de ce qu’il a représenté pour son pays et ses contemporains. Il ne viendra à l’esprit de personne de préférer Voltaire comme poète dramatique à Racine, comme philosophe à Descartes, comme historien à Montesquieu ; mais Voltaire a exercé une telle influence sur son siècle, il a tellement incarné en lui l’esprit de son temps, il a si puissamment contribué à faire rayonner la France sur l’Europe, que son nom est à juste titre plus populaire que ceux de Descartes, de Racine et de Montesquieu. De même la gloire de Victor Hugo n’est pas née seulement de la beauté des œuvres qu’il a écrites, mais encore du rôle qu’il a joué, de l’influence qu’il a exercée, en politique aussi bien qu’en littérature, de sa vie même, à laquelle les circonstances ont donné une grandeur et une portée symboliques.

Commencée en 1802, achevée en 1888, l’existence de Victor Hugo remplit presque tout un siècle. Il entrait dans l’adolescence au moment où, délivrée du joug impérial, la France renaissait à la vie littéraire et à la vie politique ; il meurt au moment où le pays, fatigué, privé de presque tous ses grands hommes, semble traîner tristement une stérile vieillesse. Il a eu cet unique privilège, après avoir étonné par sa précocité d’enfant sublime les académiciens de 1817, d’étonner encore et d’humilier, à quatre-vingts ans passés, les jeunes générations par une vigueur physique et intellectuelle qui tenait du prodige. Comme il était sans conteste le plus illustre poète vivant, non seulement de la France, mais de l’Europe, il avait fini par être entouré d’une admiration unanime et indiscutée ; il avait passé à l’état de monument national. On s’entendait tacitement pour suspendre à son égard tout jugement sévère, toute critique irrespectueuse ; on trouvait juste et beau que l’homme qui avait à ce point honoré sa patrie jouît pleinement, dans ses dernières années, de sa gloire pacifique. Cette conspiration d’admiration et de respects, à laquelle venait se joindre le culte idolâtre de quelques fidèles, a fini par faire du poète, pour toutes les classes de lecteurs et même pour ceux qui ne l’avaient jamais lu, un être à part, une sorte de demi-dieu. On peut dire de lui qu’il a été canonisé de son vivant.

Il prêtait à cette canonisation par les phases mêmes de sa vie, qui a été comme le symbole de la vie de la France au xixe siècle. Poète objectif par excellence, ce n’est pas sa propre âme, son propre cœur et son propre esprit qu’il a révélés par ses chants : c’est les sentiments généraux de l’humanité, les beautés de la nature, les drames de l’histoire ; c’est surtout l’âme mobile de la France moderne. Il s’est comparé lui-même à un « écho sonore », que Dieu mit au centre des choses pour vibrer à tous les bruits et à tous les chocs. Il a, en effet, chanté toutes les gloires de son pays et en a traduit toutes les passions ; aussi n’est-il aucun parti qui ne trouve à l’admirer, à le revendiquer par quelque côté. Fils d’un soldat de la République devenu général de l’Empire et d’une Vendéenne légitimiste, il est comme la synthèse des tendances diverses qui se combattent dans la France moderne. Il chante d’abord la royauté des Bourbons, puis, avec les libéraux de la Restauration, les victoires impériales et la figure légendaire de Napoléon ; il est à la tête du mouvement romantique, où le néo-catholicisme et le culte du Moyen âge se mêlent aux revendications révolutionnaires en faveur de la liberté dans l’art. Après 1830, il appartient au monde libéral orléaniste et devient pair de France, tandis que Lamartine est un des chefs de la gauche démocratique. En 1848, ses anciens enthousiasmes napoléoniens font d’abord de lui un partisan du prince Louis-Napoléon, mais dès que celui-ci aspire à la dictature, Victor Hugo entre en lutte avec lui et se jette dans les rangs du parti républicain, où il restera jusqu’à sa mort. Il lui appartenait d’ailleurs depuis longtemps par ses tendances révolutionnaires et démocratiques. Dès la Restauration, ses drames sont pénétrés d’un souffle révolutionnaire. Dans Hernani, dans Marion Delorme, dans Ruy Blas, le beau rôle est aux révoltés, aux conspirateurs, aux valets, aux fous de cour ; le poète par leur bouche fait entendre la revendication des droits populaires, et flagelle les crimes de la royauté et de ses ministres. Le romantisme de Victor Hugo n’était pas seulement une théorie littéraire, une esthétique nouvelle ; c’était une œuvre de pitié, de charité envers les petits, les pauvres, les opprimés, les contrefaits, les méchants même, à qui il ouvrait les portes de la cité politique en même temps que de la cité littéraire. Dès ses premiers écrits, Victor Hugo a au cœur cette Pitié suprême qu’il a chantée à la veille de sa mort ; de tout temps, il a été l’adversaire de la peine de mort, l’apôtre de la clémence, et implicitement le partisan du suffrage universel, par amour pour les foules. C’est le même sentiment qui a fait de lui le chantre de Napoléon, incarnation d’un peuple, et l’avocat attitré, le défenseur des communards vaincus. Toujours prêt à prendre le parti des opprimés et des révoltés, à soutenir la cause des nations contre leurs maîtres, il est, dès le premier jour, au rang des apôtres de l’indépendance hellénique, de l’indépendance polonaise, de l’indépendance italienne.

Ce qui a achevé la fortune de Hugo, c’est que sa lutte oratoire contre l’Empire, dans les assemblées de 1850 et de 1851, puis son exil à Guernesey, avaient fait de lui le symbole même de la République. Par son Napoléon le Petit, par ses Châtiments, son chef-d’œuvre, par le serment solennel prêté et tenu par lui de ne jamais rentrer en France tant que l’Empire serait debout, il était sur son rocher pour le Don Juan impérial comme une statue du Commandeur qui lui prédisait le jour prochain de la vengeance céleste. Le rocher de Guernesey devenait, dans l’imagination populaire, comme l’antithèse du rocher de Sainte-Hélène, et la République devait en revenir avec Hugo vivant, comme l’Empire était revenu de Sainte-Hélène avec les cendres de Napoléon.

L’Empire croula. Victor Hugo, fidèle à sa parole, accourut prendre part aux souffrances et aux dangers de Paris assiégé. Il resta depuis lors parmi nous, entouré d’un concert d’admiration où nulle voix discordante ne se faisait entendre, comme le représentant du siècle littéraire finissant, et aussi comme une sorte de symbole des idées démocratiques et républicaines. Symbole d’ailleurs contradictoire aux idées mêmes qu’il représentait, car les adorations prosternées qui l’entouraient étaient la plus éclatante démonstration du besoin qu’ont les hommes de se faire des héros, des rois et des dieux.

L’importance de l’œuvre littéraire de Hugo égale-t-elle l’importance du rôle joué par l’homme ? Chacun répondra à cette question suivant ses préférences personnelles ; mais quel que soit le degré de sympathie qu’on éprouve pour la nature du talent et du style d’Hugo, on doit reconnaître qu’il tiendra toujours une très grande place, sans doute même la première, dans notre histoire littéraire du xixe siècle.

Son mérite le plus incontestable est d’avoir renouvelé la langue et les formes poétiques. Il a à la fois enrichi la littérature de formes nouvelles en revenant, par delà le xviie siècle, aux formes variées de la poésie lyrique des xve et xvie siècles, et le vocabulaire poétique de mots nouveaux en y introduisant, non des néologismes, mais une foule de termes considérés avant lui comme trop familiers ou trop techniques ; en même temps, il a rendu la versification à la fois plus libre et plus précise en exigeant pour la rime plus d’importance, plus de variété et plus de richesse qu’on ne lui en donnait auparavant, et en bouleversant les règles admises jusque-là pour la césure et l’enjambement. Tous les poètes qui ont écrit depuis cinquante ans ont été unanimes à saluer Hugo comme le rénovateur du Parnasse, comme un bienfaiteur qui leur a donné un instrument d’une incomparable richesse, qui a renouvelé les cordes de la lyre française et en a augmenté le nombre. Ils l’ont baptisé d’un nom touchant : le Père. Qu’il ait, à côté de cela, altéré le génie de la langue française en en forçant les couleurs et les tons, en abusant de certains mots, en multipliant les antithèses, en se laissant aller à l’exagération et à la déclamation, aux concetti à l’italienne et à l’emphase espagnole, tout homme sensé le reconnaît ; mais ces défaillances, ou plutôt cet envers de son génie, ne doivent pas diminuer notre reconnaissance pour les services rendus.

Si Victor Hugo ne partage avec personne le mérite d’avoir renouvelé les formes de la poésie française, on ne peut pas revendiquer pour lui au même titre, comme un honneur exclusivement personnel, la gloire d’avoir créé le mouvement romantique ; mais il a certainement joué le premier rôle dans ce mouvement. Il en a tracé, dès 1824, le programme dans les préfaces de Cromwell et des Orientales, et il a été considéré par tous les romantiques comme leur chef d’école. Si madame de Staël et Chateaubriand ont été les vrais initiateurs du mouvement romantique, si Lamartine, Dumas, Balzac et George Sand peuvent lui être préférés, le premier comme poète lyrique, le second comme dramaturge, les deux derniers comme romanciers, Victor Hugo n’en a pas moins formulé le premier les principes de la littérature nouvelle, qu’il a représentée avec plus d’éclat et de puissance que personne. Parmi ces principes, il en est qui peuvent être contestés, et, d’une manière générale, on peut dire que le romantisme, en tant qu’école littéraire, a abouti à un avortement ou du moins à une rapide décadence ; mais les tendances littéraires qui l’ont guidé ont triomphé, et Victor Hugo a été pour beaucoup dans ce triomphe. Ces tendances générales, c’est l’abandon des anciens genres littéraires et des prétendues règles de la littérature classique, en un mot, la liberté dans l’art : liberté de combiner le tragique et le comique, l’épique et le lyrique, le lyrique et le satirique, liberté de renoncer aux unités d’Aristote, de choisir ses sujets dans tous les temps et dans tous les pays ; c’est ensuite la recherche de la vérité individuelle et de la couleur locale substituée à la recherche exclusive de la vérité générale et des sentiments humains universels ; c’est encore l’élargissement de l’horizon intellectuel des Français par la connaissance des littératures étrangères ; c’est enfin le désir de ressaisir par l’étude du Moyen âge le secret de nos origines nationales. Par ces justes et légitimes tendances, par ces heureux et nobles efforts, le romantisme, malgré tout ce qu’eurent d’excessif, de superficiel et d’artificiel un certain nombre des œuvres qu’il a produites, est lié à tout ce que notre siècle a fait de grand dans les lettres ; aux formes nouvelles de la poésie et du roman, que ce soit le roman social et psychologique de Balzac, le roman d’aventure de Dumas ou le roman de passion de George Sand ; aux recherches sur la littérature du Moyen âge et sur les littératures étrangères ; enfin et surtout à la rénovation de l’histoire par Augustin Thierry et Michelet. Victor Hugo n’a pas été, à proprement parler, un historien, mais, comme romancier et comme poète, soit dramatique, soit épique, il a fait œuvre historique. Que cette histoire soit toujours vraie, je ne l’affirmerais pas, mais elle est assurément grande et saisissante. Hugo n’est pas un critique, il n’est même pas un savant ; il avait la science en petite estime, et en cela il était en désaccord avec l’esprit de notre temps ; mais il était un voyant, et, par la puissance de son imagination, il rendait la vie aux époques et aux hommes disparus.

Nous touchons ici à ce qui, dans son œuvre, est le plus vraiment grand et original, à son génie épique. On peut lui dénier le génie dramatique, car il n’a pas la variété de ton qu’exige le théâtre, sa psychologie est superficielle, les sujets de ses drames sont plus étranges qu’émouvants ; ils sont tous le développement d’une antithèse morale péniblement construite, non de passions humaines vivantes et complexes. On peut lui préférer, dans la poésie lyrique, les poètes qui, comme Shelley, révèlent une âme d’une délicatesse, d’une profondeur et d’une sensibilité extraordinaires, et qui, par la magie des mots, nous donnent la subite intuition des mystères de la vie, de la nature et de l’infini ; on peut trouver sa philosophie bien vague et bien simple en comparaison de la subtilité émue d’un Sully Prudhomme. Mais Victor Hugo a doté la France contemporaine d’une littérature épique. Il a fait mentir le jugement fameux : les Français n’ont pas la tête épique. Il a renoué la tradition interrompue de la poésie épique du Moyen âge. Le plus beau de ses drames, les Burgraves, est une épopée dialoguée ; la plus belle pièce des Châtiments, l’« Expiation », se compose de quatre morceaux épiques ; dans la Légende des siècles, nous trouvons l’épopée familière avec les Pauvres gens, l’épopée militaire moderne avec le Cimetière d’Eylau, l’épopée du Moyen âge sous toutes ses formes, française, espagnole, sarrazine, l’épopée biblique avec Ruth et Booz. Le merveilleux même n’en est pas absent. Enfin, dans la poésie de Hugo tout entière, le lyrisme affecte la forme épique, et il voyait si naturellement les hommes et les choses avec la simplicité et le grossissement épiques, qu’on peut dire de ses romans, depuis Notre-Dame de Paris jusqu’à Quatre-vingt-treize, qu’ils sont des épopées en prose. Ce génie épique est servi par l’imagination la plus forte, la plus colorée, la plus riche, la plus grandiose qui ait jamais été. D’autres ont parlé à l’âme et au cœur un langage plus passionné, plus tendre ou plus mélodieux ; nul n’a ébranlé les sens par des images plus éclatantes et plus inattendues. C’est par là qu’il peut être nommé à côté des plus puissants génies. On ne peut sans doute l’égaler à Dante ou à Shakespeare ; mais, à coup sûr, s’il n’est pas aussi grand, il est aussi extraordinaire ; comme eux, il est unique, car jamais cerveau humain n’a eu à ce degré le don de créer des images. Ses visions sont des hallucinations qui prêtent la réalité, même à l’impossible. En même temps, sa bonté de cœur, sa sympathie pour les foules et pour les souffrants donnent à ses créations épiques un côté profondément humain. Ce ne sont point des marbres et des bronzes peints comme les héros de Leconte de Lisle, ce sont des hommes grandis et exaltés. La simplicité même des pensées de Victor Hugo, ce que ses détracteurs ont appelé sa banalité, le don merveilleux, qu’il a possédé presque seul de notre temps, de rendre, par l’éclat du style et de l’imagination, la nouveauté et l’originalité aux grands sentiments fondamentaux de l’humanité, ont fait pénétrer la poésie dans beaucoup d’âmes qui ne la goûtent pas d’ordinaire. Par là il a mérité cette popularité qu’il aimait et recherchait trop, et qu’il a acquise, entre tous les écrivains qui aient jamais vécu, à un degré peut-être unique.

Victor Hugo a donc beaucoup donné à son siècle, et il en a été la plus éclatante représentation. On a dit quelque fois qu’il était un phénomène isolé, qu’il ne représentait pas le génie français, fait de mesure, d’esprit, de grâce et d’harmonie, ennemi de la déclamation et du mauvais goût. On pourrait discuter si cette définition de l’esprit français est aussi rigoureusement exacte qu’on le croit quelquefois. Elle ne s’applique guère à l’épopée du Moyen âge ; la déclamation a toujours été un défaut français ; on le trouve chez d’Aubigné comme chez Corneille, chez Crébillon comme chez Diderot ; le mauvais goût abonde au xvie siècle et dans toute la première moitié du xviie. Mais, en outre, la France démocratique du xixe siècle n’est plus l’ancienne France ; elle a changé d’âme en littérature comme en politique et en religion. Si un poète comme Musset appartient à la lignée des classiques, des hommes tels que Lamartine d’un côté, Baudelaire de l’autre, sont des phénomènes tout nouveaux, et Victor Hugo, avec ses emphases, ses gaîtés cyclopéennes, ses affectations, son amour maladif de la popularité, sa religiosité vague, son socialisme attendri, son humanitarisme crédule, son syncrétisme politique, ses grandes visions historiques, son âme mobile, aimante, ardente et vibrante, me paraît un produit naturel et un représentant authentique de la France démocratique, un peu entachée de rudesse et de vulgarité, inquiète, mal équilibrée, théâtrale et déclamatoire, mais toujours puissante, féconde et généreuse, prompte à l’enthousiasme, avide de progrès, croyante en sa mission civilisatrice, que nous a léguée la Révolution.


  1. Nous avons sur Victor Hugo trois livres qui méritent d’être lus tous trois si l’on veut se rendre compte de la vraie puissance de ce génie bien plus complexe qu’il ne semble à première vue ; ce sont ceux de MM. Renouvier, Ernest Dupuy et Mabillieau.