Monographie de l’abbaye de Fontenay/Chapitre 19

La bibliothèque libre.
Librairie Saint-Joseph (p. 115-117).

CHAPITRE XIX

Vente mobilière de Fontenay


La fureur révolutionnaire a triomphé. Les communautés religieuses sont abolies, nos moines expulsés de la demeure qu’ils s’étaient choisie pour y habiter toujours, les cloîtres de Fontenay, les salles capitulaires, l’église sont veufs de leurs propriétaires, les échos de la vallée ont cessé de répéter le chant du départ, un silence de mort succède à l’animation de l’abbaye, Fontenay est devenu désert, solitaire, comme aux jours des ermites Martin et Millon, mais un crêpe étendu sur ces constructions annonce qu’il y a un mort dont il faut partager les dépouilles.

Au nom de la Nation, le Directoire de Semur se hâte de prendre possession du monastère, fait de suite un inventaire minutieux de tous les objets mobiliers, et délègue le notaire de Rouvray, Pinard, pour procéder à la vente. Celui-ci choisit pour assesseur, un sieur Charmot, et pour crieur, Renier de Semur. Il fixe la vente au mois d’octobre 1791.

Aussitôt, comme les oiseaux de proie qui s’élancent à tire d’aile sur leurs victimes, une vingtaine de tripiers et de brocanteurs s’abattent sur Fontenay. Les lots se succèdent rapidement, adjugés à des prix ridicules à cause de leur modicité ; la bibliothèque est partagée en quatre lots d’une quarantaine de volumes chaque, au profit d’un Maréchal de Montbard et d’un Melot de Semur qui a pu faire passer quelques livres de sa demeure à la bibliothèque de la ville.

L’horloge et ses 6 timbres ont été achetés par Edme Noirot de Montbard pour 510 francs payés comptant en assignats. Sans une interpellation un peu vive du maire de Marmagne, elle aurait été cédée pour 200 francs.

La boiserie, les stalles, l’autel ont été adjugés à M. Maréchal de Montbard. La boiserie orne la chapelle du couvent de Montbard, l’autel et les stalles sont à l’église de la paroisse.

La belle sainte Vierge de la famille Froment de Touillon a été payée 6 livres.

L’argenterie, comprenant l4 grands couverts, 4 grandes cuillers à ragoût, une poche et une cuiller à olives a été achetée par la Monnaie pour 595 fr. l3 deniers.

Les quatre cloches pesant la première 2163 livres, la 2e 1500, la 3e 860, la 4e 685 furent emmenées au district à Semur pour en faire des canons ou du billon.

Cette vente dura 7 jours, et produisit à peu près 5000 fr. Deux moines ayant enlevé de leurs chambres quelques minimes objets inventoriés furent obligés de les payer, et comme ils n’avaient pas d’argent le prix en fut retenu sur leur pension. (Cah. des ventes aux archives.)

L’Assemblée nationale avait commandé que la vente se fît sous la surveillance des maires des communes dont dépendaient les monastères. Le sieur Pinard invitait le maire de Montbard qui ne voulait pas s’y rendre, et ne convoquait pas celui de Marmagne qui y allait chaque jour pour faire l’opposition qu’on trouvera aux pièces justificatives.


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