Napoléon et la conquête du monde/I/08

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H.-L. Delloye (p. 35-37).

CHAPITRE VIII.

HAMBOURG.



L’empereur quitta Saint-Pétersbourg et la Russie au commencement du mois d’avril 1813. Il avait eu la pensée de laisser dans cette capitale une armée d’occupation ; mais, cédant aux prières d’Alexandre, et satisfait d’ailleurs par d’autres garanties importantes, il fit évacuer cette ville par ses troupes, laissa des forces considérables à Cronstadt, et s’embarqua dans ce port pour Stockholm.

Le czar avait accompagné Napoléon jusqu’à Cronstadt ; Charles XIV, roi de Suède, vint aussi à sa rencontre avec les clés de sa ville, car il semblait qu’il n’eût déjà plus que des rois pour gardes. Il entra en vainqueur et comme en maître dans cette capitale, et le drapeau tricolore flotta seul sur tous les édifices, afin qu’on sût bien que Stockholm était remplie par Napoléon.

Il accomplissait ainsi sa destinée de fouler du pied toutes les capitales du monde.

Son séjour à Stockholm fut court ; cette ville agréable, mais médiocre en population et en puissance, l’ennuya vite. La Suède est une nation qui n’a pas de force par elle-même, et qui peut seulement placer un poids dans la balance des coalitions européennes. Cette politique de satellite avait si peu d’importance, surtout à cette époque, aux yeux de l’empereur, qu’il ne crut pas devoir s’occuper de la mesurer ou de l’affaiblir, et, dégagé bientôt de ces rapports inutiles avec Charles XIV, il s’embarqua pour Dantzig.

Il s’arrêta peu de temps dans cette ville, et se rendit presque aussitôt à Hambourg, où il avait convoqué, pour le 11 mai, un congrès des rois du continent.

Déjà tous les rois étaient arrivés, attendant le maître, ayant amené avec eux les magnificences de leurs cours, et les confondant toutes pour en faire une cour et une magnificence dignes de Napoléon.

Rien ne fut plus splendide que cette réunion. Les fêtes de Dresde, qui, à pareil mois de l’année précédente, avaient jeté un si grand éclat, n’étaient pas comparables à celles-ci. Alors deux souverains y manquaient, ennemis déclarés qu’on allait combattre, et aujourd’hui ils augmentaient la foule, vaincus et tributaires.

Partout et au premier rang apparaissait Napoléon, à qui l’on ne disputait plus le titre de roi des rois.

Mais la pompe et le faste de ces fêtes n’occupaient qu’en apparence la pensée de l’empereur. Il avait d’autres soins. Sous cette splendeur, la réunion de Hambourg recélait de grands événements, et c’est là que fut agité le sort de l’Angleterre.