Napoléon sténographié au Conseil d’Etat en 1804 et en 1805

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Napoléon sténographié au Conseil d’Etat en 1804 et en 1805
Revue des Deux Mondes6e période, tome 9 (p. 359-385).
NAPOLÉON STÉNOGRAPHIÉ
AU CONSEIL D’ÉTAT
EN 1804 ET 1805

Pour revivre l’époque impériale, nous n’avons que les récits des contemporains qui ont approché Napoléon ; mais, à n’en pas douter, presque toutes les paroles de l’Empereur qui nous sont parvenues ont été passées au polissoir, et l’histoire s’en contente avec peine. C’est pourquoi j’exhume ces fragmens qui ont le mérite de la précision et de la littéralité. Aimablement communiqués par M. le baron Pierre de Bourgoing, ils se composent de vingt-quatre feuilles manuscrites portant pour titre : Séances du Conseil d’Etat sténographiées par M. L... auditeur au Conseil. Quel personnage fixa ainsi en 1804 et 1805 les phrases nettes, coupantes que le maître prodiguait dans la haute assemblée ? Lecoulteux, Leblanc-Pommard sont les seuls auditeurs dont le nom commence par la lettre L, qui assistèrent aux séances pendant ces deux années. Je penche pour Lecoulteux, lequel avait l’habitude de prendre de nombreuses notes. Ces papiers seraient donc les originaux des comptes rendus qu’après beaucoup de corrections et de retouches, on livrait comme officiels : ils reproduisent les mots vrais prononcés jadis à Saint-Cloud et aux Tuileries.

Pour bien connaître la manière dont parlait l’Empereur, il ne faut pas s’en référer aux divers ouvrages écrits par les anciens membres du Conseil d’État. Tous l’ont revu, corrigé, déformé. Pelet de la Lozère ne donne que des tirades bien fourbies auxquelles il a enlevé le naturel ; Thibaudeau lui-même a commis parfois la même faute et sa rédaction s’arrête en 1803 ; Miot de Melito, Boulay de la Meurthe, Rœderer racontent les séances sans en détailler les digressions, les épisodes. Le Mémorial de Sainte-Hélène cite les conversations de l’illustre captif sur cinquante sujets différens touchant le Conseil d’État, mais le héros accumulait alors les matériaux de son histoire prodigieuse et le soin qu’il avait de se composer une attitude devant la postérité permet de n’accepter son récit que sous bénéfice d’inventaire. D’autre part, les archives qui renfermaient les rapports, les exposés, le travail entier de tant d’hommes éminens, ont été détruites par la Commune en 1871. L’unique relation frôlant la vérité est celle d’un ex-auditeur dont la Gazette des Tribunaux communiqua jadis quelques souvenirs[1]. Malheureusement, l’auteur laissa aussi courir sa plume et s’abandonna oiseusement à la narration. Dans les pages suivantes, on juge de la façon intime avec laquelle l’Empereur entretenait les membres de la grande assemblée. Le Conseil d’État a été la pièce maîtresse du travail administratif et politique à cette époque. L’Empereur s’y sentait, s’y mettait particulièrement à l’aise, donnant libre cours à la fougue de ses pensées sans en surveiller l’expression. On croit l’entendre en lisant les notes rapides prises au vol même de sa parole dont un auditeur ignoré nous a laissé la fidèle reproduction.


Saint-Cloud, 23 prairial an XII (12 juin 1804).


Cérémonie du couronnement.
LE TEMPS, LE LIEU, L’ENDROIT


{{c[LE TEMPS }}

L’Empereur demande si le Conseil est d’avis de faire la cérémonie cette année ou de la remettre à l’année prochaine. La Commission a voté pour cette année afin d’éviter l’air d’hésitation. Plusieurs membres appuient cette opinion, entre autres Portalis, Treilhard et SÉGUR, qui font observer que la nation s’attend à celle grande cérémonie et qu’on ne saurait à quels motifs attribuer ce retard.

Aux voix : Cette année.

LE LIEU

La Commission propose Paris. On avait pensé à Reims.

REGNAUD. — « Ce serait déshériter Paris de l’avantage de posséder V. M. Ce serait l’affliger.

LACUÉE. — « La Commission a pensé qu’il fallait laisser l’option à l’Empereur.

MIOT. — « Il est essentiel de ne consacrer aucun droit à cet égard.

SÉGUR. — « On avait pensé à Aix-la-Chapelle.

PORTALIS. — « Si on n’était pas à Paris, il faudrait y venir. »

Aux voix : Paris.

L’ENDROIT

L’EMPEREUR propose le Champ-de-Mars.

REGNAUD. — « Ce local assure à la cérémonie le caractère purement politique et civil qui lui est nécessaire et essentiel.

MIOT. — « C’est se mettre dans la dépendance du temps. Le mauvais temps rendit le 14 juillet de 1790 ridicule. » (Il propose d’adjoindre aux Tuileries une salle bâtie en bois, avec un balcon sur lequel l’Empereur se montrerait au peuple.)

DEFERMON réfute l’opinion de son collègue sur le 14 juillet en protestant que, malgré la pluie, il n’y eut jamais de fête si brillante par l’expansion et l’unanimité des sentimens. Dix mille personnes étant partie nécessaire, il faut un local qui puisse contenir trois à quatre cent mille hommes.

SIMÉON opine pour qu’on multiplie les cérémonies, le serment aux Tuileries, la revue au Champ-de-Mars, le sacre à la cathédrale, etc.

SÉGUR. — « Il faut que la fête soit populaire : Le Champ-de-Mars. »

Aux voix : Le Champ-de-Mars.

L’EMPEREUR propose une question nouvelle : Convient-il d’y appeler le Pape ?

PORTALIS interrogé croit que l’intervention du Pape a toujours produit un grand effet tant au dedans qu’au dehors. Les abus qui étaient à craindre au XIIIe siècle ne le sont plus aujourd’hui. Charlemagne ne s’imagine point tenir son pouvoir du Pape ; au contraire c’est un hommage rendu au premier souverain de l’Europe. Toutes les fois qu’il y a eu un changement de dynastie, on a été jaloux de faire agir ce grand ressort.

TREILHARD. — « Il est une question préliminaire à décider. La cérémonie sera-t-elle politique ou religieuse? En supposant qu’on se décide pour la dernière, a-t-on bien senti les inconvéniens d’une telle démarche? Je crois bien que Charlemagne ne craignit point l’influence du Pape, puisque celui-ci tenait tout de lui, mais les suites en furent funestes et irréparables.

PORTALIS. — « Vous ne voulez pas établir un divorce entre le ciel et la terre. Tout ce qui tend à rendre sacré celui qui gouverne est un grand bien. Le malheur de nos jours est qu’on raisonne trop la puissance. Quand les peuples la croyaient conférée par la divinité, ils la regardaient comme sacrée.

TREILHARD. — « Ce ne fut jamais sans de grands inconvéniens qu’on joignit la religion à la politique.

« Cette démarche sera-t-elle conséquente dans le moment où la nation proclame la liberté des cultes ? De quel œil croyez-vous qu’elle sera considérée des Cabinets protestans? Et si jamais un des successeurs de l’Empereur est protestant, il changera donc le cérémonial. » Ne serait-il pas bien plus sage d’établir un mode constant et indépendant de tout culte ?

REGNAUD. — « Il est important de constater que ce sont les peuples et non Dieu qui donnent les couronnes. La divinité les laisse donner. Il faut que la cérémonie soit indépendante de toute opinion religieuse, puisque vous y faites assister les chefs des Eglises protestantes. Si vous voulez y faire participer la religion, séparez donc les deux cérémonies. Que l’Empereur aille d’abord invoquer l’Eternel, il se rendra de là à la cérémonie qui sera purement civile et politique, puis on pourra la terminer par un Te Deum. »

MONTALIVET observe qu’outre la qualité de chef de l’Eglise, le Pape réunit encore celle de souverain temporel ; il ne voit point la nécessité de la présence du Pape pour faire intervenir la religion.

L’EMPEREUR. — « Ce n’est point Charlemagne, c’est Pépin qui fut couronné à Paris par le pape Etienne.

« Ce n’est plus le siècle où l’on peut craindre l’influence du clergé. Nous ne sommes plus au temps où un concile coupait les cheveux a l’Empereur. Toute idée exclusive de religion est passée. On ne change plus de religion. Chacun vit dans celle où il est né.

« Ce qu’on doit conséquemment considérer ici, c’est si cette démarche sera utile à la masse de la nation, si ce n’est pas un moyen de nous attacher les nouveaux pays et ceux qui ont été aliénés : le Piémont, la Belgique, la Vendée. Il existe des discussions religieuses, il y a encore des prêtres qui correspondent avec leurs anciens évêques. Tous ces troubles cesseront quand le Pape viendra. Personne n’aura plus rien à dire quand on dira : J’ai vu le Pape !

« Dans aucun pays on n’a fait de cérémonies civiles sans la religion. En Angleterre, on jeune.

« Enfin je suis sûr que, si je parcourais la France avec le Pape, tout le monde me laisserait pour courir voir le Pape. »

SIMÉON cite les voyages de Pie VI à Vienne et à Valence où l’affluence du peuple était extrême sur son passage.

L’EMPEREUR. — « Il faut juger de l’avantage que nous en retirerons par le déplaisir qu’en auront nos ennemis. Qu’en diront les Bourbons ? »

(Plusieurs membres disent qu’ils en concevront le plus grand dépit. Treilhard interpellé bat en retraite. Tout le monde est de l’avis de Sa Majesté.)

CAMBACÉRÈS. — « Avant d’opiner s’il viendra ou s’il ne viendra pas, il faudrait savoir ce qu’il viendra faire. Viendra-t-il donner la couronne? ce serait une grande faute ! Voulez-vous rétablir ce déplorable système qui fit attribuer aux papes le droit d’ôter ou de donner des couronnes? Tant que vous avez un gouvernement ferme, rien de semblable n’est à craindre ; mais répondez-vous des suites? Le Pape ne peut pas venir créer l’Empereur, puisqu’il l’a déjà reconnu.

L’EMPEREUR. — « Le légat vient de recevoir ses lettres de créance.

CAMBACÉRÈS. — « Si le Pape vient, il faut qu’il vienne pour consacrer. Point des 36 maires, c’est une idée fausse ; ce ne sont point les représentans de la nation ; c’est réveiller toutes les idées de féodalité.

« Suivant moi, l’Empereur doit arriver à la cérémonie la Couronne sur sa tête, il se dépouille devant le Seigneur, le Pape le bénit ; après quoi, l’Empereur remet lui-même sa couronne sur sa tête.

REGNAUD. — « Il n’y a plus de Sainte-Ampoule.

PLUSIEURS MEMBRES. — « On a déjà retrouvé à Naples le sang de saint Janvier. »

CAMBACÉRÈS écarte la plaisanterie en faisant observer que tous les princes de l’Europe se font oindre et sacrer.

MIOT établit une différence entre le couronnement et le sacre. Le Roi n’allait point à Reims pour être couronné, mais seuleMENT sacré. Ce n’est pas là ce qui le faisait Roi. Il tenait ses droits non pas de son sacre, mais de sa naissance.

CAMBACÉRÈS. — « Quant aux observations sur les protestans, elles tombent d’elles-mêmes. Le souverain est toujours de la religion de la majorité ; on ne peut citer que la Saxe.

L’EMPEREUR. — « Et c’est un Etat sans organisation. Malheur aux protestans si jamais l’Empereur était protestant ! L’Empereur doit toujours être de la religion de la majorité. Le changement de religion n’est plus regardé comme important. Le paradis a bien des chemins, et l’honnête homme a toujours su trouver le sien depuis Socrate jusqu’à Quaker. Voilà ma profession de foi.

REGNAUD. — « Que diront les soldats quand ils verront l’Empereur revêtu d’habits blancs pour recevoir des onctions ! Je suis bon catholique, mais... »

Aux voix : Point de consécration.


Les Sceaux.

CRÉTET, au nom de la Commission, propose successivement l’aigle, le lion, l’éléphant. La Commission s’est décidée pour le coq. Il propose encore l’égide de Minerve, une fleur, le chêne, l’épi de blé.

MIOT dit qu’il faut distinguer le sceau des armes. Les fleurs de lys ne furent jamais le sceau. Il propose l’Empereur assis.

L’EMPEREUR. — « Le coq est de basse-cour. C’est un animal trop faible. »

SÉGUR vote pour le lion parce qu’il vaincra le léopard.

LAUMONT propose l’éléphant avec l’épigraphe Mole et mente.

SIMÉON observe que le lion est hostile.

CAMBACÉRÈS propose les abeilles comme l’emblème de la situation actuelle de la France ; une république qui a un chef.

LACUÉE. — « D’autant mieux qu’elles ont à la fois l’aiguillon et le miel. »

SÉGUR y voit l’emblème du travail et non celui de la puissance.

Aux voix : Le coq.

L’EMPEREUR. — « Le coq n’a point de force, il ne peut pas être l’image d’un Empire tel que la France. Il faut choisir entre l’aigle, l’éléphant ou le lion.

MIOT. — « On ne dira pas le coq de l’empire, ni l’empire du coq. »

(On observe contre l’aigle qu’il serait difficile de le distinguer de l’aigle autrichien et de l’aigle prussien.)

LEBRUN observe que les trois lys ont été les armes de toutes les dynasties. Ce sont les armes de France ; il propose d’y revenir.

REGNAUD. — « On ne reviendra pas à la religion des lys comme à celle de Rome.

L’EMPEREUR. — « Il faut prendre un lion étendu sur la carte de France, la patte prête à dépasser le Rhin : Malheur à qui me cherche. »


Légende des monnaies.

D’un côté : Napoléon Empereur.

De l’autre : République française.


Code criminel

« La déclaration du jury sera-t-elle rendue à l’unanimité ou à un certain nombre de voix ? »

TREILHARD, rapporteur, expo.se les différens systèmes qui ont été adoptés dans le cours de la révolution.

Assemblée Constituante 3/4 plus 1.
An V Unanimité.
Plus tard Majorité.

La Commission propose les 2/3 c’est-à-dire 8 voix contre 4.

CAMBACÉRÈS. demande 7 contre 5.

L’EMPEREUR. — « Il faut établir un ordre judiciaire très ferme si vous ne voulez point de tyrannie. Quand on fait un acte arbitraire, on en fait trente et quarante. Qu’arrive-t-il de cette facilité à acquitter ? Tous les jours, le Grand Juge arrive. Il faut empêcher de mettre tel homme en liberté ! Celui qui a été acquitté par la tribunal reste en prison, et je suis un tyran. C’est humanité de punir un criminel. On acquitte des brigands... On m’écrit : Tout est perdu ! Je ne fais que des actes arbitraires et le peuple dit ; Il n’y a plus de sûreté pour moi.

« Au contraire, vous avez bien plus de ressource contre le trop de sévérité. D’abord, le droit de grâce. Puis les juges peuvent adjoindre au jury trois nouveaux membres. Il n’y a pas de quinze jours que je ne sois forcé à un acte arbitraire de cette nature. J’aimerais mieux qu’on me coupât un doigt. Il n’y a que justice dans le magistrat ; il ne peut laisser la société veuve de justice. C’est l’humanité des Italiens. Tout est douteux dans le monde. Dès que la majorité dit que l’accusé est coupable, il est probable qu’il est coupable. Vous mettez l’arbitraire en administration, vous consacrez la tyrannie en France. Il n’y a de liberté civile que là où les tribunaux sont forts. Il ne faut point d’avocats pour défenseurs ; c’est une absurdité. Avocats contre juges, à la bonne heure. Corsaires contre corsaires ; mais contre les jurés, il faut des hommes simples comme eux.

« La société a besoin d’une justice rigoureuse ; c’est là l’humanité d’État, l’autre est l’humanité d’opéra. Combien de fois ne m’a-t-il pas fallu sacrifier un bataillon pour sauver l’armée ! »

Le Rapporteur observe qu’il y a une grande différence entre n’être pas condamné et obtenir sa grâce.

CAMBACÉRÈS. — « Les considérations accessoires ont beaucoup d’influence sur les jurés. Ils sont toujours enclins à la clémence. Ils ne croient point charger leur conscience en acquittant, et c’est avec de tels juges que vous voulez faire décider par huit contre quatre… Au moins sept contre cinq ! »

L’EMPEREUR. — « Il faut être un peu moins philanthrope et plus philosophe. Léopold tant vanté ne condamnait point à mort, mais aussi il signait par jour cinquante injustices. Le magistrat n’est point père ; il est juste et sévère. Il n’y a que les tyrans qui soient pères.

« Interrogez le préfet de police ; il vous dira que la veille de toutes les fêtes, deux cents filous se rendent en prison. Ils lui disent : Il y aura demain des mauvais coups, vous nous soupçonnerez, nous venons vous prouver que ce ne sera pas nous.

« Depuis le 1er vendémiaire, il y a déjà plus de soixante réclamations.

BERLIER. — « Les jurés ne sont donc pas si doux ! »

Aux voix : La majorité.

Le RAPPORTEUR continue d’exposer le projet de la Commission qui propose de remplacer les présidens des tribunaux criminels par des préteurs ambulans. Beaucoup de tribunaux criminels, dit-il, n’ont rien à faire. Le nombre des présidens peut être réduit à vingt ; l’économie qu’on y trouverait, fournirait les moyens de leur donner plus de représentation. Leur réunion à Paris offrirait d’autres avantages ; ils pourraient s’y communiquer leurs idées, exposer la situation des départemens et proposer les améliorations.

L’EMPEREUR. — « Nous sommes faits pour diriger l’opinion publique et non la discuter. »

BIGOT se déclare contre les préteurs ambulans.

Un des juges de la Commission observe qu’il n’y a point assez de procès pour occuper un président ambulant et que, vu l’impossibilité de réduire les tribunaux criminels, il faut donner à un président plusieurs départemens. Les juges ambulans étaient une institution de Charlemagne que la féodalité a détruite. Elle est justifiée encore par l’ambulance des préfets, des sénateurs dans leurs sénatoreries, etc.

PORTALIS. — « Il ne faut pas calculer en matière criminelle comme en matière civile. Tous les inconvéniens des localités subsistent. Jadis la justice était ambulante, mais, quand les crimes sont devenus plus fréquens, elle est devenue sédentaire. Pourquoi rétrograder ? »


Saint-Cloud, 7 messidor an XII (26 juin 1804).


Cérémonie du couronnement.

L’EMPEREUR. — « Si on plaçait l’autel au milieu du Champ-de-Mars, ce serait une cérémonie populacière. Il est bien important que le peuple de Paris ne se croie pas la nation. C’est se soumettre aux brouhahas de la populace. Cela n’est bon qu’au commencement d’une révolution où chaque partie de la nation, chaque faubourg se dit, se croit le peuple.

« Quand vous m’emmailloterez de tous ces habits-là, j’aurai l’air d’un magot. Avec vos. habits impériaux, vous n’en imposerez pas au peuple de Paris qui va à l’Opéra où il en voit de plus beaux à Laïs et à Chéron qui les portent beaucoup mieux que moi. Est-ce que vous ne pouvez pas ajuster votre manteau pardessus mon habit comme je suis là ? »

On discute si l’Empereur se rendra à la cérémonie avec la couronne et les ornemens impériaux.

L’EMPEREUR. — « La cérémonie se fait en face « le la nation. L’Empereur y va, mais il est déjà Empereur. Ceux qui n’en veulent pas baissent la tête. Nous ne sommes plus au commencement de la révolution où le peuple était en effervescence et gouvernait le Roi. Il ne faut plus qu’il se mêle d’affaires politiques.

« Cette cérémonie doit se faire devant toute la nation ; c’est par hasard qu’elle se fait à Paris.

« S’il fallait élever l’Empereur sur le pavois, ce serait au camp. Je rassemblerais deux cent mille hommes au camp de Boulogne. Là j’aurais une population couverte de blessures dont je serais sûr. Si c’est une masse sans représentation légale qui doit faire un Empereur, c’est l’armée. Il y a là des hommes de tous les pays, de tous les départemens. Pourquoi donner au peuple de Paris le droit de faire un Empereur ? Tant que je gouvernerai, la ville de Paris ne sera que la capitale et non toute la France. »

Le préfet de Versailles, interrogé, croit qu’il ne faut pas s’exposer aux témoignages de contentement ou de mécontentement du peuple.

L’EMPEREUR. — « Ce n’est point une fête pour amuser le peuple, c’est une cérémonie qui doit avoir la plus grande influence sur le sort de l’Etat. »

TALLEYRAND cite le sacre de Louis XVI où le peuple n’est entré qu’après la cérémonie achevée.

La question posée si le sacre aura lieu dans un endroit public ou fermé, la majorité décide pour un endroit fermé.


Saint-Cloud, messidor an XII (juin-juillet 1804).

Cérémonie du couronnement'.

L’EMPEREUR. — « Pourquoi ne pas choisir une autre ville que Paris où il y a tant de canaille ? Quand ce ne serait que pour faire voir aux Parisiens qu’on peut gouverner sans eux ! Le préfet de Paris qui en est le premier magistrat en laisse-t-il ainsi égarer l’opinion ! Il est bon de montrer à Paris son mécontentement. Tant que j’aurai du sang dans les veines, je ne me laisserai pas faire la loi par les Parisiens. Il ne me faudra pas deux cent mille hommes, j’en ai assez de quinze cents pour mettre Paris à la raison. Je finirai par mettre la main sur ces messieurs, et les envoyer à deux cents lieues. J’ai dormi pendant quinze jours. J’ai voulu voir comment Paris se gouvernait tout seul ; ça commençait à aller pas mal. J’ai dormi quinze jours, mais le lion se réveillera. Je frapperai, et je frapperai juste. Je n’ai pas accepté l’Empire sur l’avis de la ville de Paris qui change d’intérêt et d’opinion deux fois du matin au soir, mais c’est sur le vœu des départemens, de l’armée et de toute la France. Les Parisiens ont fait voir leur regret que la conspiration n’ait pas réussi. Ils prennent la défense de Georges. Ils sont fâchés qu’on ne m’ait pas tué ! »

(Murmure général. Tous les membres se récrient sur l’injustice de cette opinion. Plusieurs membres ajoutent que les rapports qu’on fait à l’Empereur sont exagérés.)

L’EMPEREUR. — « M. P…, M. B… ! Ce sont des boute-feux ! Ils répandent l’argent dans le peuple pour le séduire. Ce sont des gens à p… dessus[2] ! »

Le PRÉFET DE PARIS engage son honneur pour M. P…

L’EMPEREUR. — « Si j’ai jamais eu la folie de croire à l’attachement des Parisiens, j’en suis bien revenu. Au reste, ils ont toujours été de même et n’ont jamais aimé personne. N’est-il pas honteux qu’on dise partout aujourd’hui que Pichegru a été étranglé dans sa prison ? »

Le PRÉFET DE LA SEINE dit qu’il faut l’attribuer aux diverses proclamations déplacées dans les circonstances, s’il ose se servir de cette expression, et qui n’étaient faites que pour accréditer ces bruits, loin de les étouffer.

L’EMPEREUR. — « Le préfet de la Seine ne devrait pas souffrir que de tels bruits se répandent. N’est-ce pas à lui à diriger l’opinion de la ville de Paris ? Ne pouvait-il pas rassembler chez lui les chefs de corporations pour éclairer leur opinion. »

Le PRÉFET DE PARIS dit que ce serait donner un fondement à ces bruits que de les traiter d’une manière si importante.

L’EMPEREUR. — « Je ne crains rien tant que je serai à Saint-Cloud ou aux environs. Ne dit-on pas encore qu’on se bat à Boulogne, soldat contre soldat, tandis qu’il n’a jamais régné plus belle union. »

Plusieurs membres discréditent ces bruits. Ils observent que le gouvernement ne trouve aucun obstacle à ses projets. Il n’y a point d’opposition.

L’EMPEREUR. — « Je crois bien ! Il ne peut pas y en avoir.

PLUSIEURS MEMBRES. — « On est tranquille.

L’EMPEREUR. — « Parce qu’on ne peut plus bouger !

CAMBACÉRÈS. — « Les sortes de gens qui répandent ces bruits voudraient faire tomber l’indignation de Votre Majesté sur la ville de Paris. »


Code criminel.

Y aura-t-il des magistrats qui pourront tenir des assises dans un ou plusieurs tribunaux criminels de départemens?

TREILHARD, rapporteur, expose l’avis de la Commission et développe son système de préteurs ambulans.

SIMÉON. — « Les meilleures lois sont celles auxquelles on est accoutumé. Il faut qu’un capitaine connaisse ses soldats. Le président permanent conduira bien mieux le jury qu’un étranger qui ne connaît ni les localités, ni les mœurs. Le préteur inspirera plus d’effroi que de respect, on le regardera comme un homme pressé d’expédier son affaire. Il ne fera point cas de l’opinion. Je ne suis point pour une justice bottée.

Le GRAND JUGE. — « Ce sont les relations politiques du président permanent que je redoute plus que tout. »

MURAIRE préfère une institution qui existe et qui va bien.

CRÉTET. — « Le juge doit être regardé par abstraction comme l’opposant du jury. »

L’EMPEREUR approuve cette opinion et dit en conséquence qu’il faut qu’un arrêt de la Cour de Cassation ou un règlement d’administration interdise aux juges de manger chez un défenseur.

« L’opinion publique n’a pas de sens commun en fait de tribunaux. Il faut donc un homme qui en impose, et ce ne peut pas être un homme de la localité. Il y a beaucoup de brigandage dans un département. Eh bien ! on y envoie un homme sévère et vice versa. Le plus grand moyen d’un gouvernement, c’est la justice. Si l’ordre judiciaire n’est pas dans la main du gouvernement, il faut des actes arbitraires.

« Il faut les choisir dans le tribunal de Cassation, qui jouit déjà d’une considération nationale. Nous n’avons point de justice criminelle en France ; la preuve, c’est qu’il nous faut des tribunaux spéciaux. Quand il n’y aura que trente préteurs, ils seront connus du gouvernement, et on choisira chaque fois l’homme propre au pays. Je voudrais qu’on put y envoyer des conseillers d’Etat, section de législation.

CAMBACÉRÈS. — « La source de tant de maux et de tergiversations est dans le système. Si j’avais cru que cela dût nous mener à la justice ambulante, je me serais opposé au jury. Les présidons se sont tous bien conduits ; il n’y en a pas qui mérite de reproches, pas un seul.

L’EMPEREUR. — « Tous, ils ont laissé saper les bases de l’Etat. Voulez-vous les parlemens ?

CAMBACÉRÈS. — « Oui !

Le GRAND JUGE. — « C’est le seul moyen. »

TARGET consulté développe avec beaucoup d’éloquence le projet de la Commission. Il relève l’avantage de la centraliser.

REGNAUD déplore la perte de la distinction des rangs. Le juge a perdu sa considération en se familiarisant. Le juge n’impose point au jury, tandis qu’au contraire l’avocat a la plus grande influence.

Le GRAND JUGE défend les présidens. Il attaque vigoureusement le projet. « C’est substituer l’incertain au certain. La France est fatiguée de tous les changemens. Si nous avions table rase et qu’il fallût choisir, à la bonne heure ; vous pourriez hésiter, discuter. Mais quand l’institution marche, pourquoi la renverser sur la seule espérance d’en établir une meilleure ?

CAMBACÉRÈS. — « Vous n’accoutumerez jamais les Français à voir rendre la justice criminelle par un seul homme. Vous ne recueillerez aucun avantage et vous aurez le grand inconvénient d’avoir innové quand il faut stabiliser. »

Aux voix : In statu quo.


Saint-Cloud, 24 vendémiaire an XIII (16 octobre 1804), la séance s’ouvre à 7 h. 1/2 du matin.


Convocation du Corps législatif.

Le Corps législatif sera convoqué pour assister à la cérémonie du couronnement. Ce ne sera point l’ouverture de la session.


'Proclamation.

Une proclamation doit annoncer que la cérémonie du couronnement est fixée au 18 brumaire et y appelle tous ceux qui ont droit d’y assister, L’Empereur observe que les lettres closes ne peuvent renfermer que des invitations et non des ordres, sans quoi tous les services seraient désorganisés.


Préséance.

L’EMPEREUR demande à M. de SÉGUR s’il est vrai qu’il se soit élevé des difficultés entre le Conseil d’Etat et le Corps législatif pour la place au couronnement.

SÉGUR. — « Le Conseil d’Etat avait toujours servi d’escorte au Premier Consul. Maintenant que l’Empereur est environné des grands dignitaires, de ses ministres et de ses chefs militaires, la place du Conseil d’Etat s’est établie naturellement vis-à-vis du Sénat. C’est là contre que le Corps législatif croit avoir le droit de réclamer comme corps constitué de l’Etat.

L’EMPEREUR. — « Le Corps législatif réclamera toujours. Il faut trouver moyen d’arranger cela.

SÉGUR. — « Il n’y en a qu’un. C’est de mettre le Conseil d’Etat des deux côtés sur les gradins du trône.

L’EMPEREUR. — « Oui, de tous côtés, tout autour au pied du trône.

FOURCROY. — « Comme cela, tout le monde sera content.

DEFERMON, — « C’est la place que nous aimons le plus. »

L’EMPEREUR demande l’avis de l’Archi-Trésorier.

LEBRUN dit que c’est fort bien, parce que les membres du Corps législatif sont les représentans de la nation.

L’EMPEREUR. — « Nous sommes tous les représentans de la nation. Le premier représentant de la nation, c’est l’Empereur.

« L’Empereur, le Sénat, le Conseil, le Corps législatif et le Tribunal composent toute la machine gouvernementale. Ensemble ils peuvent faire tout ce qu’ils veulent. Ils représentent la nation. L’Empereur, qui est le chef de tous, est héréditaire parce qu’il faut choisir entre les inconvéniens et qu’il y a moins d’inconvéniens à ce qu’il soit héréditaire qu’électif, sans quoi, il serait électif.

Le GRAND JUGE. — « Dès 89, on appelait le Roi le représentant héréditaire.

L’ARCHI-TRÉSORIER. — « Proprement, les représentans de la nation sont ceux qu’elle a choisis, ses mandataires.

L’EMPEREUR. — « Bah ! Ce sont des idées de 89 !

L’ARCHI-TRÉSORIER. — « Non, sire, ce sont des idées de tous les temps.

BÉRENGER. — « L’Assemblée Constituante était composée de représentans du peuple ; mais ces mandataires mirent bientôt leurs mandats de côté et se firent souverains. »

L’EMPEREUR demande à M. REGNAUD son avis sur le sacre.

REGNAUD. — « J’ai déjà énoncé mon opinion sur ce sujet. Ce qui me répugne, c’est l’idée de voir l’Empereur s’humilier, se prosterner.

(Murmures. Plusieurs voix : Devant Dieu !)

L’EMPEREUR. — « Ah ! devant l’autel ! C’est plus important que vous ne croyez, surtout pour toutes les puissances, et aussi pour l’intérieur.

REGNAUD. — « Pour les nouveaux départemens peut-être.

L’EMPEREUR. — « Pour toute la France et pour toute l’Europe. Ce n’est pas que l’on croie par là consacrer le droit de la naissance. On ne croit plus que c’est Dieu et la naissance qui donnent les trônes ; nous croyons, nous, que c’est Dieu et les hommes. »

LACUÉE se récrie sur les prétentions de la Cour de Rome.

L’EMPEREUR. — « Le Pape ne demande point à donner la couronne ; ii demande, s’il ne la donne point, qu’aucun autre ne la donne.

LACUÉE. — « Il veut rétablir le droit que nul autre que lui ne peut disposer des couronnes.

L’EMPEREUR. — « Non. La Cour de Rome dit : « Vous voulez faire venir le Pape ? Fort bien, mais qu’en voulez-vous faire ? Ce n’est pas pour en faire un spectateur. S’il ne la donne pas, au moins qu’aucun autre ne la donne. » C’est assez juste. J’arriverai avec la couronne, je la mettrai sur l’autel, le Pape ou, s’il ne vient pas, celui qui le représentera la bénira, et je la remettrai sur ma tête. »


Corps des avocats.

L’EMPEREUR n’est point satisfait de l’arrêté pris pendant son absence sur la discipline des avocats. Il s’étend très au long sur les inconvéniens de l’indépendance des avocats. Il répète ce qu’il a déjà dit dans d’autres séances sur l’influence de l’avocat sur les jurés qui sont le plus souvent leurs cliens, ont intérêt à les ménager et sont accoutumés à regarder leurs paroles comme articles de foi. « Dans tous les tribunaux, ce sont les avocats qui dirigent la discussion. Dans aucun tribunal de France, vous n’avez un homme de courage et de tête comme M. Hémart ; eh bien ! c’est toujours par les avocats qu’est posée la majeure. »

Il veut que les avocats soient soumis au Grand Juge et puissent être destitués ou interdits par lui.

CAMBACÉRÈS, TREILHARD et LEBRUN plaident pour l’indépendance des avocats.

BERLIER dit qu’avec le gouvernement actuel, on ne pourrait craindre aucun abus de cette mesure, qui est peut-être nécessaire pour les circonstances ; mais il croit que, par la suite, elle pourrait avoir des conséquences funestes et devenir une arme fatale dans les mains d’un gouvernement malintentionné. Il demande qu’elle ne soit établie que pour dix ans.

LEBRUN témoigne aussi son effroi sur les suites d’une telle mesure. Il dit qu’il est trop ami de la liberté et de la propriété pour tout concentrer en une seule main.

L’EMPEREUR se récrie beaucoup sur la faiblesse de l’ordre judiciaire. « Il n’y a point d’ordre judiciaire en France. C’est à qui la perdra. Autrefois, n’avez-vous pas vu le duc de Richelieu revêtu de dignités, défaveurs, de richesses, et même couvert de gloire, ne l’avez-vous pas vu traîner devant les tribunaux ? Aujourd’hui tel homme s’est couvert de crimes qui font frémir la nature, eh bien ! parce qu’il est général, personne n’ose l’attaquer. Un homme puissant et riche ne sera jamais jugé. »

Le Grand Electeur présente au serment M. Goyon de Matignon, auditeur à la section de la Guerre.


Saint-Cloud, 1er brumaire an XIII (23 octobre 1804), la séance s’ouvre à 8 heures du matin.


Diminution des frais de justice

TREILHARD, rapporteur, propose de remplacer les huissiers par des gendarmes pour porter les assignations. : Les huissiers ne s’acquittent point de leur emploi et se font payer un prix exorbitant.

RÉAL et LACUÉE observent que la gendarmerie est déjà trop peu nombreuse, qu’il faudra augmenter son traitement, que cela la distraira de son service, etc.

CAMBACÉRÈS. propose de la faire agir concurremment avec les huissiers.

Le GRAND JUGE objecte que les huissiers dépendent uniquement des tribunaux, tandis que les gendarmes resteraient encore sous la dépendance de leurs chefs naturels.

CAMBACÉRÈS. propose que les mêmes huissiers exploitent pour tous les tribunaux civils et criminels du même arrondissement?

L’EMPEREUR. — « Il ne sera accordé aux huissiers aucun frais de déplacement.

(Adopté.)

CAMBACÉRÈS. — « Vous ne ferez point marcher un homme sans le payer.

L’EMPEREUR. — « Nous n’avons point d’argent.

CAMBACÉRÈS. — « La justice est la première dette du gouvernement. »


Postes.

LAVALETTE, directeur général des Postes, demande le privilège exclusif.

L’EMPEREUR dit que tes Postes coûtent un million à l’Etat et que, l’année prochaine, il en faudra trois pour les soutenir.

CAMBACÉRÈS prohibe les relais.

SÉGUR. — « Deux moyens : liberté entière comme en Angleterre ou privilège exclusif.

L’EMPEREUR. — « Il faut obliger les diligences à se servir des chevaux de la poste au moins sur les dix routes principales. »

REGNAUD se plaint que la poste aux lettres ne se sert point des chevaux de la poste. On ne s’en sert qu’en les payant vingt-cinq sous.

Lavalette. — « Trois services : grande malle pour la poste, petite malle pour l’entreprise, service à cheval. » II se plaint que les poids énormes des diligences tuent tous les chevaux. Un cheval qui fait leur service est tué au bout de six mois, et c’est l’administration qui les paie.


Paris, 21 frimaire an XIII (18 décembre 1804).


Conscription.

LACUÉE lit le projet. A l’article 44, il observe que la 1re partie (les suppléans pris dans la commune), inscrite par ordre de Sa Majesté, a éprouvé la plus grande opposition à la discussion de la section. C’est anéantir les suppléans.

PETIET croit qu’il suffirait d’exiger que le suppléé présentât un homme de telle mesure, bien constitué.

LACUÉE demande la liberté de prendre dans l’arrondissement,

L’EMPEREUR. — « Nous voulons avoir de bons paysans, c’est là ce qui fait la force des armées, et non des garçons perruquiers qui sont accoutumés à se traîner dans la boue des villes. »

DEFERMON et BÉRENGER observent que l’opinion est absolument contraire à la conscription, que c’est un impôt qu’il faut rendre léger.

L’EMPEREUR. — » Nous avons aux armées un tas de canailles qui désertent à l’ennemi aussitôt qu’ils sont arrivés, ce qu’on n’avait jamais vu autrefois. J’aime encore mieux les exemptions et les privilèges. Le mode de remplacement est ridicule.

BÉRENGER. — « Si le remplacement n’a pas eu lieu, c’est à cause des difficultés.

L’EMPEREUR. — « Il n’y en avait point.

BÉRENGER. — « Il y a eu de grands désordres.

L’EMPEREUR. — « Sans doute, c’est une chose dure que la conscription, mais il n’y a pas de bien dans le monde. Tout est relatif. C’est une des conséquences de l’ordre social. Toutes les Puissances de l’Europe l’ont, la Prusse, l’Autriche, la Russie l’ont ; et l’Angleterre, n’est-ce pas bien pis encore ? Il n’en faut point faire ou la bien faire. »

DUMAS borne le remplacement au canton, c’est le rendre plus proportionnel et plus égal.

BÉRENGER. — « Tel canton ne trouvera point de remplaçans.

L’EMPEREUR. — « Eh bien ! il marchera ! C’est une loi de rigueur. Il vaut mieux suivre la conscription sous l’aigle français que sous l’aigle prussien ou allemand ;

«... Ajoutez, si vous voulez, que le remplaçant sera accepté quand il sera lié ou remplacé par un lien quelconque. Si un homme de Paris m’offre pour le remplacer un fermier qu’il a en Provence, je l’accepterai. Nous avons été forcés d’en réformer dix mille après les avoir habillés et nourris pendant un an, parce que c’était la canaille des villes.

BÉRENGER. — « La conscription a déjà été gâtée l’année dernière par le mode d’exécution.

LACUÉE. — « Il y a des communes où il ne se trouve que deux ou trois remplaçans. »

SIMÉON se récrie sur la disposition de l’article qui exclut du remplacement celui qui a été traduit à la police correctionnelle. Il demande qu’au moins on mette condamné.

LACUÉE (article 49) demande que le remplacé adopté ne soit garant de.son suppléant que pendant un an.

L’EMPEREUR. — « Deux ans, ce n’est pas trop. Je pars du principe qu’il faut que chacun serve. Il faut que le suppléant soit un homme sur. Quand on fournira l’enfant de son fermier, on en sera sûr. »

LACUÉE propose d’excepter de la conscription les colons réfugiés.

(Renvoyé aux sections de Guerre et de Marine.)


Calendrier.

FOURCROY lit le projet de décret.

Il sera institué une fête onze jours après le solstice d’hiver, en mémoire du couronnement, pour resserrer les liens des familles, et entretenir par des vœux réciproques 1er harmonie entre tous les Français.


Paris, 8 nivôse an XIII (29 décembre 1804).


Loi sur les douanes.

L’EMPEREUR. — « L’exportation des grains n’est pas l’objet de la loi. La détermination en varie à chaque instant. Voilà par exemple l’Espagne qui est dans le malheur. Elle vient de déclarer la guerre. Elle dit : « Je suis votre alliée, je ne tiens au monde que par vous, par les Pyrénées, vous ne pouvez pas m’abandonner. Dans un autre cas, je vous aiderai ; je vous aide encore par mes laines. » Il faut nourrir l’Espagne, mais, si le blé devenait plus rare, je dirais au roi d’Espagne : « Vous êtes fort aimable, mais moi je suis égoïste, parce que quand on a trente millions d’estomacs à contenter, il est permis de l’être.

« Aujourd’hui, voilà le Hanovre qui meurt de faim, il faut bien le nourrir, et la Suisse qui est une province qui a toujours dépendu de vous. C’est pour cela qu’il faut que le gouvernement gouverne. Que celui qui a des variations d’hypothèses puisse les expliquer. Au lieu que la loi suit toujours la même route ; c’est comme la lune que l’Eternel a placée une fois à une certaine distance de la terre et lui a indiqué son chemin pour toujours.

« On a prohibé les nankins parce qu’on a su que la Compagnie anglaise en ayant une grande quantité voulait les vendre à la Compagnie danoise pour les faire entrer en France.

« Les douanes étaient estimées dans le budget vingt-sept millions, elles en ont produit quarante-cinq. L’enregistrement en a produit aussi vingt de plus. »


Paris, 27 nivôse an XIII (17 janvier (1805).


Budget.
an IX : 539 millions
an X : 500 millions
an XI : 684 millions et demi
an XII : 762 millions
an XIII : 681 millions
Loi sur les finances.

L’EMPEREUR. — « Il faut considérer cette année et l’année passée comme les plus fortes, parce que je tiens mes armées comme si j’avais la guerre à la fois avec la mer et le continent. Je puis la faire aujourd’hui à l’Autriche, la Prusse et la Russie ensemble. Je suis mieux monté que je ne l’étais à l’époque de la paix d’Amiens. J’ai jeté trente millions dans la rivière l’année passée ; j’en jetterai encore autant cette année, ou plutôt ce n’est pas jeté dans la rivière, puisqu’ils ne sortent pas de France, mais ils sont sacrifiés, et alors je ne crains rien. J’ai dans mes magasins de quoi équiper vingt mille hommes d’ici à demain sans lever un centime de plus ; c’est pour cela que je n’ai pas la guerre, parce que tout le monde sait mon compte et que je ne le cache pas. Je ne demande que mes trente mille conscrits, et avec cela je suis content. Si les affaires d’Italie ne s’arrangent pas, j’y arrive en dix jours. Je suis sur leurs frontières avant qu’ils aient acheté leurs chevaux de cavalerie, et s’ils les achètent, je fais la guerre et je les attaque. Mais je n’en lèverai point un centime de plus. Le laboureur n’en poussera pas moins sa charrue. Cela vaut mieux que de sonner le tocsin et d’afficher le danger de la patrie sur tous les clochers. »


Paris, 16 pluviôse an XIII (5 février 1805).


Loi sur les jeux.

BIGOT DE PRÉAMENEU, rapporteur, lit le projet : Maisons de jeux de hasard défendues.

RÉAL souhaite que le projet puisse réussir, mais il en doute. On jouera toujours.

L’EMPEREUR. — « De ce qu’on assassine sur tous les chemins, s’ensuit-il qu’il faut donner privilège pour assassiner ? Le gouvernement tolère les jeux. Il y a des villes où les commissaires de police en font des spéculations honteuses. Tout cela se fait en mon nom, et mon nom en est déshonoré. C’est comme les filles, c’est affreux ! Les filles ne devraient point être souffertes dans les rues. La jeunesse ne peut pas se promener sans être attaquée et entraînée au mal. La police ne devrait pas souffrir un tel scandale. Un jeune homme de seize ans, de bonne famille, ne peut pas sortir de chez ses parens sans risque d’être pris au collet et conduit en mauvais lieu. Tous les philosophes avec leurs beaux principes nous diront que c’est nécessaire. Je ne vous demande pas d’empêcher ces femmes d’avoir une mauvaise vie, je ne vous demande pas de refréner le libertinage ; je vous demande qu’un jeune homme bien élevé et qui a de bonnes habitudes puisse se promener sans être violenté. Qu’elles l’appellent par la fenêtre, à la bonne heure ; s’il entre, c’est qu’il le veut bien. Mais je les vois tous les jours dans les rues ; elles y sont en faction.

« Il faudrait que toute femme qu’on arrête dans les rues à raccrocher fût condamnée à six mois de prison et de travail.

RÉAL. — « Il n’y a déjà pas assez de prisons.

L’EMPEREUR. — «. Il faut les établir en province dans quelques grands couvens où on les contiendra mieux qu’à Paris. Sûrement vous n’aurez pas moins de libertinage, mais au moins vous ne craindrez pas qu’un jeune homme qui quitte son précepteur et ne connaît pas le monde, soit au premier pas entraîné dans le vice.

RÉAL. — « Je demanderai à Votre Majesté de faire les établissemens avant de rendre la loi. »


Jeux

BIGOT DE PRÉAMENEU, rapporteur : Défendu de tenir des maisons de jeux de hasard.

L’EMPEREUR. — « En province, dans les grandes villes, il y a dans tous les théâtres des roulettes où les jeunes gens se perdent. »

Plusieurs difficultés s’élèvent sur la détermination des jeux de hasard. Quelques conseillers opinent pour qu’on en fasse l’énumération. On leur observe que le lendemain tous les noms seront changés.

L’EMPEREUR. — « Il faut mettre que tout jeu où on peut perdre dans la soirée plus de deux louis est défendu. »

RÉAL observe qu’il n’y a pas de jeu où on ne puisse perdre plus de deux louis. Le loto, le domino seront des jeux de hasard.

L’EMPEREUR. — « Il ne faut pas se faire tant de difficultés. Mettez : les maisons de jeux. Personne de nous ne saura les définir, mais tout le monde les distinguera.

REGNAUD. — « Quand on pense qu’il y a à Paris une maison où on peut aller jouer en masque ! Le caissier, l’homme public, le père de famille, la femme mariée, vont sous le masque, à l’abri de toute honte, jouer leurs fonds ou ruiner leur famille ! C’est chez Carchy. Il ne devrait pas y avoir de bals masqués ailleurs qu’à l’Opéra. »


Police de l’imprimerie'.

L’EMPEREUR. — « Il existe des moyens d’arrêter un ouvrage capable de faire du mal, mais il n’existe pas de droit, il faut se jeter dans un arbitraire affreux. Cela va bien en administration, mais l’administration n’est pas fondée sur la loi. »


Saint-Cloud, 3 germinal an XIII (26 mars 1805)[3], 10 heures du matin.


Forces départementales formées des conscrits de réserve.

LACUÉE rapporteur.

L’EMPEREUR. — « Nous n’avons que seize mille gendarmes point suffisans, et cependant trop nombreux. Il faut une force qui ne soit que force. Un jeune homme de dix-huit ans, dès qu’il a des bras et des jambes, pourra s’en servir !... » La gendarmerie réduite à huit mille hommes. Economie. Nécessité de donner une force aux préfets... « Elle représentera dans l’ordre politique la garde nationale. Ce sera la garde d’honneur des préfets. Chaque préfet aura cent vingt hommes, chaque sous-préfet quarante. Plus de troupes dans l’intérieur de la France. On vendra tous ces couvens, bâtimens qui ruinent le ministère de la guerre en réparations. En cinq jours, on pourrait réunir quatre à cinq mille hommes.. C’est organiser l’armée de réserve. Une augmentation de dix-huit mille hommes qui ne gêne pas la population, puisqu’ils ne sortent pas du département. Ce n’est pas comme s’ils tenaient à un corps qui serait aujourd’hui dans le royaume de Naples, demain dans le Hanovre. »

REGNAUD approuve, mais les villes seront fâchées de perdre les troupes, c’est la consommation de leurs produits.

L’EMPEREUR. — « Nous n’avons point de troupes pour boire le vin des marchands. On entretient quatre fois plus de logemens qu’il n’y a de troupes. Il y a une garde de Paris. Tout ce qui se commet de vols, ils y entrent pour quelque chose. Chaque département enverra deux hommes pour la (larde de Paris. »

MOUNIER et REGNAUD observent que ce sera une grande charge pour cette année.

L’EMPEREUR. — « Messieurs, combien Dieu a-t-il mis pour faire le monde? Sept jours. Eh bien ! vous mettrez sept ans.

MONTALIVET. — « On peut populariser l’institution en affranchissant les citoyens du service de la Garde nationale.

RÉAL. — « Point d’inconvéniens à la supprimer dans les campagnes. »

DEPERMON observe que dans les temps de trouble, les gens du pays se divisant en partis, les étrangers sont les seuls qui puissent rétablir la paix.

RÉAL. — « Les prisons ne sont point gardées. »

Aux voix : Adopté.


Bataillons de l’armée de réserve. Les octrois et les quatre centimes. Poudres et salpêtres.
Frères ignorantins pour les écoles d’instruction.

Rejeté par la section de l’Intérieur comme retour dangereux aux corporations.

CAMBACÉRÈS croit l’établissement utile.

MOUNIER et Berlier s’y opposent comme inutile et dangereux.

CAMBACÉRÈS. parle pour.

REGNAUD lit les statuts.

L’EMPEREUR. — « Les statuts ne peuvent être adoptés, mais avons-nous une instruction publique? Non. Les Lycées sont remplis de femmes. Nous avons tous été jeunes et nous savons Que c’est une fort mauvaise compagnie dans les collèges. Ceux qui arrivent là n’ont point fait de carrières autrefois. On n’a vu jusqu’ici de bons enseignemens que dans les corps ecclésiastiques. Je préfère voir les enfans d’un village entre les mains d’un homme qui ne sait que son catéchisme et dont je connais les principes, que d’un quart de savant qui n’a point de base pour sa morale et point d’idée fixe. La religion est la vaccine de l’imagination, elle la préserve de toutes les croyances dangereuses et absurdes. Un frère ignorantin suffit pour dire à l’homme du peuple : « Cette vie est un passage... »

« Si vous ôtez la foi au peuple, vous n’avez que des voleurs de grand chemin.

« Sous le rapport politique, vous les surveillerez, vous aurez la direction dans la main.

« Vous ne pouvez pas dire au peuple qu’il y a une autre lumière que celle de la religion, celle de la raison naturelle... Au lieu que vous avez de petits coqs de village qui viennent on ne sait d’où, qui font ici un petit certificat faux et perdent la génération. Vous n’aurez point de solidité dans l’Etat si vous ne donnez pas de morale au peuple, et point sans religion. On a voulu y suppléer, le Père Girard, etc., en vain ! »

Décider que l’instruction de la première classe sera confiée aux ministres du culte.

MOUNIER et RÉAL. — « L’instruction religieuse séparée.

SÉGUR. — « Il faut au peuple une instruction positive. »

TREILHARD regarde les vœux comme contraires à la raison et à la liberté naturelle.


Saint-Cloud, 30 messidor an XIII (19 juillet 180S), la séance est ouverte à onze heures.


Droits féodaux en Piémont.

L’EMPEREUR est d’avis de publier simplement les lois de l’Empire pour éviter les bigarrures de législation. Pour le duché de Parme, autre code, mais il n’est pas réuni à la France, et quand il le serait...

« La Révolution qui a supprimé les droits féodaux est une espèce de jubilé... Ils m’ont dit qu’ils n’ont même pas besoin de distinction. Ils sont bien plus français que les départemens du Rhin, qui sont tous allemands. Le Piémont et la France sont enfans des Romains. »

MOUNIER expose les motifs de son arrêté. Tout droit féodal gênant l’agriculture, on a cru devoir les supprimer.

L’EMPEREUR. — « Vous ne me proposez pas d’être juste.

MOUNIER. — « Le plus possible, sire.

L’Empereur. — « Je n’entends pas ça. Je ne sais pas ce que c’est qu’une femme qui a le plus possible d’honneur. Elle a couché avec son amoureux ou elle n’y a point couché. La justice est comme l’honneur.


C’est une île escarpée et sans bords
On n’y peut plus rentrer quand on en est dehors.


« Je ne connais point de demi-justice, et puis ce serait trop soumettre à l’analyse ce qui s’est passé en France. Je ne dis pas que ce qui s’est passé en France est juste, je dis que c’est un jubilé qu’on appelle une révolution.

DEFERMON. — « Le point de fait n’était pas contesté.

DUCHATEL. — « Les rentes et les droits féodaux ne se paient pas plus en Piémont qu’en France. Les communes ont dit : « Si vous nous faites payer à nos seigneurs, nous ne paierons que les contributions au fisc. »

L’EMPEREUR. — « Ce qui s’est passé en France n’est pas si ancien qu’on ne puisse y revenir. Vous allez donner de l’inquiétude à tous les acquéreurs de domaines nationaux. Il faut que ce soit comme en France ; je ne puis pas faire autrement en Piémont et à Parme sans dire qu’on a mal fait en France. Or cela ne me regarde pas. Je dis : C’est un jubilé. L’ordre social a été renversé, le Roi a été guillotiné qui était le sommet de la légisInlion. Si veut le Roi, si veut la loi ; c’est un ancien axiome en France. Tout a été bouleversé. Il ne faut pas deux législations. Vous ne pouvez pas revenir sur ce qui s’est fait. Il faut que tous pas pays réunis soient comme la France, et si vous réunissez jusqu’aux Colonnes d’Hercule et jusqu’au Kamtchatka, il faut que les lois de la France s’y étendent. Et c’est la cause des petits que je plaide, les autres ont toujours de bons dîners, de bons salons qui plaident pour eux. A moins que vous ne vouliez abolir le jubilé, alors dites-moi-le, je saurai bien donner aux voiles du vaisseau une autre direction, et nous voguerons en sens contraire.

« La Constituante a violé la justice civile, mais elle l’a violée en tous points. Elle a attaqué toute propriété en attaquant la souveraineté. La Convention a été moins coupable, elle n’a été que conséquente, et puis elle a sauvé la patrie. Moi, je suis un peu conventionnel, parce que c’est là qu’a commencé ma carrière. Qu’est-ce qui a fait périr le Roi. » Ce n’est pas la Convention, ce sont les Girondins et les journaux de Brissot qui lui ont ôté toute considération. Enfin, sous la Convention, on ne pendait pas dans les rues ; il y avait des tribunaux, injustes, atroces, et dont je suis bien loin de faire l’éloge, mais sous la Constituante, on baissait une lanterne et on y accrochait un homme. C’est là la subversion de tout ordre social.

« Si je fais encore des conquêtes, je m’empare du quart du bien de ceux qui ont plus de dix milles livres de rente, comme faisaient les anciens Lombards, les (Francs ; car il est injuste que ceux qui se cassent bras et jambes n’aient rien, tandis que d’autres mangent des blancs de poulet. »


L’enregistreur de ces rapports ne s’est pas préoccupé, comme on le voit, de faire parler l’Empereur avec noblesse ; il a simplement écrit ce qu’il a entendu. Napoléon ne pouvait s’exprimer comme L’Hospital, Lamoignon ou d’Aguesseau. Au début de l’Empire, il n’avait que trente-cinq ans, et son langage, imprégné de l’égalité jacobine, n’avait pas encore complètement endossé la majesté impériale. Il resta d’ailleurs jusqu’à la fin spontané et familier dans son Conseil d’État. Il y discourait abondamment, monologuait avec des éclats de voix, des apostrophes, quelquefois même des accès de nervosité poussés jusqu’aux larmes, donnant libre cours à ses haines et à ses colères, « répandant par tourbillons de la flamme et de la fumée. » En parcourant les notes ci-dessus, en écoutant ce débit haché, ces objections vives, ces grondemens et ces bourrasques, le lecteur songera peut-être à la réflexion de Cormenin : « S’il n’y a guère de héros pour son valet de chambre, il n’y a guère plus d’orateur pour le sténographe. » À moins qu’il n’estime, avec Pascal, que « la vraie éloquence se moque de l’éloquence. »


ALFRED MARQUISET.

  1. Gazette des Tribunaux, 18 avril, 6 juin, 26 septembre 1838, 18 novembre 1839, 10 octobre, 7 novembre 1840. 29 janvier, 5 février 1841.
  2. Voici comment Pelet de la Lozère rapporte de façon plus réservée ces paroles un peu rudes :
    « On m’a fait faire de mauvais choix pour le conseil municipal ; je sais qu’un de ses membres, M. P…, a répandu de l’argent lors du procès de Moreau. Il n’est rien qu’on ne fasse pour indisposer la capitale contre moi. »
    (Opinions de Napoléon, page 86.)
  3. Tous ces comptes rendus ne portent que les dates du calendrier républicain. Celle-ci doit être erronée, car le 3 germinal l’Empereur se trouvait à la Malmaison. Je crois qu’il faut lire 8 germinal.