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Notes sur le Japon, la Chine et l’Inde/Chine 1, traité

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TRAITÉ DE TIEN-TSIN



NAPOLÉON,

Par la grâce de Dieu et la volonté nationale, Empereur des Français,

À tous présents et à venir, salut :

Sa Majesté l’Empereur des Français et Sa Majesté l’Empereur de la Chine, animés l’un et l’autre du désir de mettre un terme aux différends qui se sont élevés entre les deux Empires, et voulant rétablir et améliorer les relations d’amitié, de commerce et de navigation qui ont existé entre les deux Puissances, comme aussi en régulariser l’existence, en favoriser le développement et en perpétuer la durée, ont résolu de conclure un nouveau Traité, basé sur l’intérêt commun des deux pays, et ont, en conséquence, nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir :

Sa Majesté l’Empereur des Français, le sieur Jean-Baptiste-Louis, baron Gros, grand officier de la Légion d’honneur, grand-croix de l’ordre du Sauveur de Grèce, commandeur de l’ordre de la Conception de Portugal, etc., etc., etc. ;

Et Sa Majesté l’Empereur de la Chine, Kouéi-Liang, haut commissaire impérial de la dynastie Ta-Tsing, grand ministre du Palais-Oriental, directeur général des affaires du conseil de justice, etc., etc., etc. ; et Houa-Cha-Na haut commissaire impérial de la dynastie Ta-Tsing, président du conseil des finances, général de l’armée Sino-Tartare de la Bannière bordée d’azur, etc., etc., etc. ;

Lesquels, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs, qu’ils ont trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

Art. 1er. Il y aura paix constante et amitié perpétuelle entre Sa Majesté l’Empereur des Français et Sa Majesté l’Empereur de la Chine, ainsi qu’entre les sujets des deux Empires, sans exception de personnes ni de lieux.

Ils jouiront tous également, dans les États respectifs des Hautes Parties contractantes, d’une pleine et entière protection pour leurs personnes et leurs propriétés.

Art. 2. Pour maintenir la paix si heureusement rétablie entre les deux Empires, il a été convenu entre les Hautes Parties contractantes, qu’à l’exemple de ce qui se pratique chez les nations de l’Occident, les agents diplomatiques dûment accrédités par Sa Majesté l’Empereur des Français auprès de Sa Majesté l’Empereur de la Chine pourront se rendre éventuellement dans la capitale de l’Empire, lorsque des affaires importantes les y appelleront.

Il est convenu entre les Hautes Parties contractantes que, si l’une des puissances qui ont un traité avec la Chine obtenait, pour ses agents diplomatiques, le droit de résider, à poste fixe, à Pékin, la France jouirait immédiatement du même droit.

Les agents diplomatiques jouiront réciproquement, dans le lieu de leur résidence, des privilèges et immunités que leur accorde le droit des gens, c’est-à-dire que leurs personnes, leur famille, leur maison et leur correspondances seront inviolables ; qu’ils pourront prendre à leur service les employés, courriers, interprètes, serviteurs, etc., etc., qui leur seront nécessaires.

Les dépenses de toute espèce qu’occasionneront les missions diplomatiques de France en Chine seront supportées par le Gouvernement français. Les agents diplomatiques qu’il plaira à Sa Majesté l’Empereur de la Chine d’accréditer auprès de Sa Majesté l’Empereur des Français seront reçus en France avec tous les honneurs et toutes les prérogatives dont jouissent, à rang égal, les agents diplomatiques des nations accréditées à la cour de Sa Majesté l’Empereur des Français.

Art. 3. Les communications officielles des agents diplomatiques et consulaires français avec les autorités chinoises seront écrites en français, mais seront accompagnées, pour faciliter le service, d’une traduction chinoise aussi exacte que possible, jusqu’au moment où, le Gouvernement impérial de Pékin ayant des interprètes pour parler et pour écrire correctement le français, la correspondance diplomatique aura lieu dans cette langue pour les agents français, et en chinois pour les fonctionnaires de l’Empire. Il est convenu que jusque là, et en cas de dissidence dans l’interprétation à donner au texte français et au texte chinois au sujet des clauses arrêtées d’avance dans les conventions faites de commun accord, ce sera le texte français qui devra prévaloir.

Cette disposition est applicable au présent traité. Dans les communications entre les autorités des deux pays, ce sera toujours le texte original et non la traduction qui fera foi.

Art. 4. Désormais, les correspondances officielles entre les autorités et les fonctionnaires des deux pays seront réglées suivant les rangs et les positions respectives et d’après les bases de la réciprocité la plus absolue. Ces correspondances auront lieu entre les hauts fonctionnaires français et les hauts fonctionnaires chinois, dans la capitale ou ailleurs, par dépêche ou communication ; entre les fonctionnaires français en sous-ordre et les hautes autorités des provinces, pour les premiers par exposé, pour les seconds par déclaration ; entre les officiers en sous-ordre des deux nations, comme il est dit plus haut, sur le pied d’une parfaite égalité.

Les négociants et généralement tous les individus qui n’ont pas de caractère officiel se serviront réciproquement de la formule représentation dans toutes les pièces adressées ou destinées pour renseignements aux autorités respectives.

Toutes les fois qu’un Français aura à recourir à l’autorité chinoise, sa représentation devra d’abord être soumise au consul, qui, si elle lui paraît raisonnable et convenablement rédigée, lui donnera suite, et qui, s’il en est autrement, en fera modifier la teneur ou refusera de la transmettre. Les Chinois, de leur côté, lorsqu’ils auront à s’adresser au consulat, devront suivre une marche analogue auprès de l’autorité chinoise, laquelle agira de la même manière.

Art. 5. Sa Majesté l’Empereur des Français pourra nommer des consuls ou des agents consulaires dans les ports de mer ou de rivière de l’empire chinois dénommés dans l’article 6 du présent Traité pour servir d’intermédiaires entre les autorités chinoises et les négociants et les sujets français, et veiller à la stricte observation des règlements stipulés.

Ces fonctionnaires seront traités avec la considération et les égards qui leur sont dus. Leurs rapports avec les autorités du lieu de leur résidence seront établis sur le pied de la plus parfaite égalité. S’ils avaient à se plaindre des procédés de ladite autorité, ils s’adresseraient directement à l’autorité supérieure de la province, et en donneraient immédiatement avis au ministre plénipotentiaire de l’Empereur. En cas d’absence du consul français, les capitaines et les négociants français auraient la faculté de recourir à l’intervention du consul d’une puissance amie, ou, s’il était impossible de le faire, ils auraient recours au chef de la douane, qui aviserait au moyen d’assurer à ces capitaines et négociants le bénéfice du présent Traité.

Art. 6. L’expérience ayant démontré que l’ouverture de nouveaux ports au commerce étranger est une des nécessités de l’époque, il a été convenu que les ports de Kiung-Tchau et Chaou-Chaou dans la province de Kouang-Ton, Taïwan et Taashwi dans l’île de Formose, province de Fo-Kien ; Tan-Tchau dans la province de Chan-Tong, et Nankin dans la province de Kiang-Nan, jouiront des mêmes privilèges que Canton, Chang-Haï, Ning-Pô, Amoy et Fou-Tchéou.

Quant à Nankin, les agents français en Chine ne délivreront de passe-ports à leurs nationaux pour cette ville que lorsque les rebelles en auront été expulsés par les troupes impériales.

Art. 7. Les Français et leurs familles pourront se transporter, s’établir et se livrer au commerce ou à l’industrie en toute sécurité et sans entrave d’aucune espèce, dans les ports et villes de l’Empire chinois situés sur les côtes maritimes et sur les grands fleuves dont l’énumération est contenue dans l’article précédent.

Ils pourront circuler librement de l’un à l’autre s’ils sont munis de passe-ports ; mais il leur est formellement défendu de pratiquer, sur la côte, des ventes ou des achats clandestins, sous peine de confiscation des navires et des marchandises engagés dans ces opérations, et cette confiscation aura lieu au profit du gouvernement chinois, qui devra cependant, avant que la saisie et la confiscation soient légalement prononcées, en donner avis au consul français du port le plus voisin.

Art. 8. Les Français qui voudront se rendre dans les villes de l’intérieur, ou dans les ports où ne sont pas admis les navires étrangers, pourront le faire en toute sûreté, à la condition expresse d’être munis de passe-ports rédigés en français et en chinois, légalement délivrés par les agents diplomatiques ou les consuls de France en Chine, et visés par les autorités chinoises.

En cas de perte de ce passe-port, le Français qui ne pourra pas le présenter, lorsqu’il en sera requis légalement, devra, si l’autorité chinoise du lieu où il se trouve se refuse à lui donner un permis de séjour, pour lui laisser le temps de demander un autre passe-port au consul, être reconduit au consulat le plus voisin, sans qu’il soit permis de le maltraiter, ni de l’insulter en aucune manière.

Ainsi que cela était stipulé dans les anciens Traités, les Français résidant ou de passage dans les ports ouverts au commerce étranger pourront circuler sans passe-port dans leur voisinage immédiat, et y vaquer à leurs occupations aussi librement que les nationaux ; mais ils ne pourront dépasser certaines limites qui seront fixées, de commun accord, entre le consul et l’autorité locale.

Les agents français en Chine ne délivreront de passe-ports à leurs nationaux que pour les lieux où les rebelles ne seront pas établis dans le moment où ce passe-port sera demandé. Ces passe-ports ne seront délivrés par les autorités françaises qu’aux personnes qui leur offriront toutes les garanties désirables.

Art. 9. Tous les changements apportés d’un commun accord, avec l’une des puissances signataires des Traités avec la Chine, au sujet des améliorations à introduire au tarif actuellement en vigueur, ou à celui qui le serait plus tard, comme aussi aux droits de douane, de tonnage, d’importation, de transit et d’exportation, seront immédiatement applicables au commerce et aux négociants français, par le seul fait de leur mise à exécution.

Art. 10. Tout Français qui, conformément aux stipulations de l’art. 6 du présent Traité, arrivera dans l’un des ports ouverts au commerce étranger, pourra, quelle que soit la durée de son séjour, y louer des maisons et des magasins pour déposer ses marchandises, ou bien affermer des terrains, et y bâtir lui-même des maisons et des magasins. Les Français pourront, de la même manière, établir des églises, des hôpitaux, des hospices, des écoles et des cimetières. Dans ce but, l’autorité locale, après s’étre concertée avec le consul, désignera les quartiers les plus convenables pour la résidence des Français, et les endroits dans lesquels pourront avoir lieu les constructions précitées.

Le prix des loyers et des fermages sera librement débattu entre les parties intéressées, et réglé, autant que faire se pourra, conformément à la moyenne des prix locaux. Les autorités chinoises empêcheront leurs nationaux de surfaire ou d’exiger des prix exorbitants, et le consul veillera, de son côté, à ce que les Français n’usent pas de violence ou de contrainte pour forcer le consentement des propriétaires. Il est bien entendu, d’ailleurs, que le nombre des maisons et l’étendue des terrains à affecter aux Français, dans les ports ouverts au commerce étranger, ne seront point limités, et qu’ils seront déterminés d’après les besoins et les convenances des ayants droit. Si des Chinois violaient ou détruisaient des églises ou des cimetières français, les coupables seraient punis suivant toute la rigueur des lois du pays.

Art. 11. Les Français, dans les ports ouverts au commerce étranger, pourront choisir librement, et à prix débattu entre les parties ou sous la seule intervention des consuls, des compradors, interprètes, écrivains, ouvriers, bateliers et domestiques. Ils auront, en outre, la faculté d’engager des lettrés du pays pour apprendre à parler ou à écrire la langue chinoise et toute autre langue ou dialecte usités dans l’Empire, comme aussi de se faire aider par eux, soit pour leurs écritures, soit pour des travaux scientifiques ou littéraires. Ils pourront également enseigner à tout sujet chinois la langue de leur pays ou des langues étrangères, et vendre sans obstacles des livres français ou acheter eux-mêmes toutes sortes de livres chinois.

Art. 12. Les propriétés de touts nature appartenant à des Français dans l’Empire chinois seront considérées par les Chinois comme inviolables et seront toujours respectées par eux. Les autorités chinoises ne pourront, quoi qu’il arrive, mettre embargo sur les navires français ni les frapper de réquisition pour quelque service public ou privé que ce puisse être.

Art. 13. La religion chrétienne ayant pour objet essentiel de porter les hommes à la vertu, les membres de toutes les communions chrétiennes jouiront d’une entière sécurité pour leurs personnes, leurs propriétés et le libre exercice de leurs pratiques religieuses, et une protection efficace sera donnée aux missionnaires qui se rendront pacifiquement dans l’intérieur du pays, munis des passe-ports réguliers dont il est parlé dans l’art. 8. Aucune entrave ne sera apportée par les autorités de l’Empire chinois au droit qui est reconnu à tout individu en Chine d’embrasser, s’il le veut, le christianisme et d’en suivre les pratiques, sans être passible d’aucune peine infligée pour ce fait.

Tout ce qui a été précédemment écrit, proclamé ou publié en Chine, par ordre du Gouvernement, contre le culte chrétien, est complètement abrogé, et reste sans valeur dans toutes les provinces de l’Empire.

Art. 14. Aucune société de commerce privilégiée ne pourra désormais s’établir en Chine, et il en sera de même de toute coalition organisée dans le but d’exercer un monopole sur le commerce.

En cas de contravention au présent article, les autorités chinoises, sur les représentations du consul ou de l’agent consulaire, aviseront au moyen de dissoudre de semblables associations, dont elles s’efforceront, d’ailleurs, de prévenir l’existence par des prohibitions préalables, afin d’écarter tout ce qui pourrait porter atteinte à la libre concurrence.

Art. 15. Lorsqu’un bâtiment français arrivera dans les eaux de l’un des ports ouverts au commerce étranger, il aura la faculté d’engager tel pilote qui lui conviendra pour se faire conduire immédiatement dans le port ; et, de même, quand après avoir acquitté toutes les charges légales il sera prêt à mettre à la voile, on ne pourra pas lui refuser des pilotes pour le sortir du port sans retard ni délai.

Tout individu qui voudra exercer la profession de pilote pour les bâtiments français pourra, sur la présentation de trois certificats de capitaine de navire, être commissionné par le consul de France, de la même manière que cela se pratiquerait pour d’autres nations. La rétribution payée aux pilotes sera réglée par l’équité, pour chaque port en particulier, par le consul ou agent consulaire, lequel la fixera convenablement en raison de la distance et des circonstances de la navigation.

Art. 16. Dès que le pilote aura introduit un navire de commerce français dans le port, le chef de la douane déléguera un ou deux préposés pour surveiller le navire, et empêcher qu’il ne se pratique aucune fraude. Ces préposés pourront, selon leurs convenances, rester dans leurs propres bateaux ou se tenir à bord du bâtiment.

Les frais de leur solde, de leur nourriture et de leur entretien seront à la charge de la douane chinoise, et ils ne pourront exiger aucune indemnité ou rétribution quelconque des capitaines ou des consignataires. Toute contravention à cette disposition entraînera une punition proportionnelle au montant de l’exaction, laquelle sera en outre intégralement restituée.

Art. 17. Dans les vingt-quatre heures qui suivront l’arrivée d’un navire de commerce français dans l’un des ports ouverts au commerce étranger, le capitaine, s’il n’est dûment empêché, et, à son défaut, le subrécargue ou le consignataire devra se rendre au consulat de France et remettre entre les mains du consul les papiers de bord, les connaissements et le manifeste. Dans les vingt-quatre heures suivantes, le consul enverra au chef de la douane une note détaillée indiquant le nom du navire, le rôle d’équipage, le tonnage légal du bâtiment, et la nature de son chargement. Si, par suite de la négligence du capitaine, cette demière formalité n’avait pas pu être accomplie dans les quarante-huit heures qui suivront l’arrivée du navire, le capitaine sera passible d’une amende de cinquante piastres par jour de retard au profit du Gouvernement chinois ; ladite amende, toutefois, ne pourra dépasser la somme de deux cents piastres.

Aussitôt après la réception de la note transmise par le consulat, le chef de la douane délivrera le permis d’ouvrir la cale. Si le capitaine, avant d’avoir reçu le permis précité, avait ouvert la cale et commencé à décharger, il pourrait être condamné à une amende de cinq cents piastres, et les marchandises débarquées pourraient être saisies, le tout au profit du Gouvernement chinois.

Art. 18. Les capitaines et négociants français pourront louer telles espèces d’alléges et d’embarcations qu’il leur plaira pour transporter des marchandises et des passagers, et la rétribution à payer pour ces alléges sera réglée de gré à gré par les parties intéressées, sans l’intervention de l’autorité chinoise et, par conséquent, sans sa garantie, en cas d’accident, de fraude ou de disparition desdites alléges. Le nombre n’en sera pas limité, et le monopole n’en pourra être concédé à qui que ce soit, non plus que celui du transport, par portefaix, des marchandises à embarquer ou à débarquer.

Art. 19. Toutes les fois qu’un négociant français aura des marchandises à embarquer ou à débarquer, il devra d’abord en remettre la note détaillée au consul ou agent consulaire qui chargera immédiatement un interprète reconnu du consulat d’en donner communication au chef de la douane. Celui-ci délivrera sur-le-champ un permis d’embarquement ou de débarquement. Il sera alors procédé à la vérification des marchandises dans la forme la plus convenable pour qu’il n’y ait chance de perte pour aucune des parties.

Le négociant français devra se faire représenter sur le lieu de la vérification (s’il ne préfère y assister lui-méme) par une personne réunissant les qualités requises, à l’effet de veiller à ses intérêts au moment où il sera procédé à cette vérification pour la liquidation des droits, faute de quoi toute réclamation ultérieure restera nulle et non avenue.

En ce qui concerne les marchandises taxées ad-valorem, si le négociant ne peut tomber d’accord avec l’employé chinois sur la valeur à fixer, chaque partie appellera deux ou trois négociants chargés d’examiner les marchandises, et le prix le plus élevé qui sera offert par l’un d’eux sera réputé constituer la valeur desdites marchandises.

Les droits seront prélevés sur le poids net ; on déduira, en conséquence, le poids des emballages et contenants. Si le négociant français ne peut s’entendre avec l’employé chinois sur la fixation de la taxe, chaque partie choisira un certain nombre de caisses et de ballots parmi les colis objets du litige ; ils seront d’abord pesés bruts, puis tarés ensuite, et la tare moyenne des colis pesés servira de tare pour tous les autres.

Si, pendant le cours de la vérification, il s’élève quelque difficulté qui ne puisse être résolue, le négociant français pourra réclamer l’intervention du consul, lequel portera sur-le-champ l’objet de la contestation à la connaissance du chef des douanes, et tous deux s’efforceront d’arriver à un arrangement amiable ; mais la réclamation devra avoir lien dans les vingt-quatre heures, sinon il n’y sera pas donné suite. Tant que le résultat de la contestation restera pendant, le chef de la douane n’en portera pas l’objet sur ses livres, laissant ainsi toute latitude pour l’examen et la solution de la difficulté.

Les marchandises importées qui auraient éprouvé des avaries jouiront d’une réduction de droits proportionnée à leur dépréciation. Celle-ci sera déterminée équitablement et, s’il le faut, par expertise contradictoire, ainsi qu’il a été stipulé plus haut pour la fixation des droits ad valorem.

Art. 20. Tout bâtiment entré dans l’un des ports de la Chine, et qui n’a point encore levé le permis de débarquement mentionné dans l’art. 19, pourra, dans les deux jours de son arrivée, quitter le port et se rendre dans un autre port sans avoir à payer ni droits de tonnage, ni droits de douane, attendu qu’il les acquittera ultérieurement dans le port où il effectuera la vente de ses marchandises.

Art. 21. Il est établi, de commun accord, que les droits d’importation seront acquittés par les capitaines ou négociants français au fur et à mesure du débarquement des marchandises et après leur vérification. Les droits d’exportation le seront de la même manière, lors de l’embarquement ; Lorsque les droits de tonnage et de douane dus par un bâtiment français auront été intégralement acquittés, le chef de la douane délivrera une quittance générale, sur l’exhibition de laquelle le consul rendra ses papiers de bord au capitaine et lui permettra de mettre à la voile.

Le chef de la douane désignera une ou plusieurs maisons de change qui seront autorisées à recevoir la somme due par les négociants français au compte du Gouvernement, et les récépissés de ces maisons de change pour tous les payements qui leur auront été faits, seront réputés acquits du Gouvernement chinois. Ces payements pourront s’opérer, soit en lingots, soit en monnaies étrangères dont le rapport avec l’argent sycé sera déterminé de commun accord entre le consul ou agent consulaire français et le chef de la douane dans les différents ports, suivant le temps, le lieu et les circonstances.

Art. 22. Après l’expiration des deux jours mentionnés dans l’art. 20, et avant de procéder au déchargement, chaque bâtiment de commerce français acquittera intégralement les droits de tonnage ainsi réglés pour les navires de cent cinquante tonneaux, de la jauge légale et au-dessus, à raison de cinq maces (un demi-taêl) par tonneau ; pour les navires jaugeant moins de cent cinquante tonneaux, à raison de un mace (un dixième de taèl) par tonneau. Toutes les rétributions et surcharges additionnelles, antérieurement imposées à l’arrivée et au départ, sont expressément supprimées et ne pourront être remplacées par aucune autre.

Lors du payement du droit précité, le chef de la douane délivrera au capitaine ou au consignataire un reçu en forme de certificat constatant que le droit de tonnage a été intégralement acquitté, et, sur l’exhibition de ce certificat au chef de la douane de tout autre port où il lui conviendrait de se rendre, le capitaine sera dispensé de payer de nouveau pour son bâtiment le droit de tonnage, tout navire français ne devant en être passible qu’une seule fois à chacun de ses voyages d’un pays étranger en Chine.

Sont exemptés des droits de tonnage, les barques, goêlettes, bateaux caboteurs et autres embarcations françaises, pontées ou non, employées au transport des passagers, bagages, lettres, comestibles et généralement de tous objets non sujets aux droits. Si lesdites embarcations transportaient en outre des marchandises, elles resteraient dans la catégorie des navires jaugeant moins de cent cinquante tonneaux et payeraient à raison d’un dixième de taêl (un mace) par tonneau. Les négociants français pourront toujours affréter des jonques et autres embarcations chinoises, lesquelles ne seront soumises à aucun droit de tonnage.

Art. 23. Toutes marchandises françaises, après avoir acquitté, dans l’un des ports de la Chine, les droits de douanes liquidés d’après le tarif, pourront être transportées dans l’intérieur sans avoir à subir aucune autre charge supplémentaire que le payement des droits de transit suivant le taux modéré actuellement en vigueur, lesquels droits ne seront susceptibles d’aucune augmentation future.

Si les agents de la douane chinoise, contrairement à la teneur du présent Traité, exigeaient des rétributions illégales ou prélevaient des droits plus élevés, ils seraient punis suivant les lois de l’Empire.

Art. 24. Tout navire français entré dans l’un des ports ouverts au commerce étranger, et qui voudra n’y décharger qu’une partie de ses marchandises, ne payera les droits de douane que pour la partie débarquée ; il pourra transporter le reste de sa cargaison dans un autre port et l’y vendre. Les droits seront alors acquittés.

Dans le cas ou des Français, après avoir acquitté dans un port les droits sur des marchandises, voudraient les réexporter et aller les vendre dans un autre port, ils en préviendraient le consul ou agent consulaire ; celui-ci, de son côté, en informera le chef de la douane, lequel, après avoir constaté l’identité de la marchandise et la parfaite intégrité des colis, remettra aux réclamants une déclaration attestant que les droits afférents auxdites marchandises ont été effectivement acquittés.

Munis de cette déclaration, les négociants français n’auront, à leur arrivée dans l’autre port, qu’à la présenter par l’entremise du consul au chef de la douane, qui délivrera pour cette partie de la cargaison, sans retard et sans frais, un permis de débarquement en franchise de droits ; mais, si l’autorité découvrait de la fraude ou de la contrebande parmi ces marchandises ainsi réexportées, celles-ci seraient, après vérification, confisquées au profit du Gouvernement chinois.

Art. 25. Aucun transbordement de marchandises ne pourra avoir lieu que sur permis spécial, et dans un cas d’urgence. S’il devient indispensable d’effectuer cette opération, il devra en être référé au consul, qui délivrera un certificat, sur le vu duquel le transbordement sera autorisé par le chef de la douane. Celui-ci pourra toujours déléguer un employé de son administration pour y assister.

Tout transbordement non autorisé, sauf le cas de péril en la demeure, entraînera la confiscation, au profit du Gouvernement chinois, de la totalité des marchandises illicitement transbordées.

Art. 26. Dans chacun des ports ouverts au commerce étranger, le chef de la douane recevra pour lui-même, et déposera au consulat français, des balances légales pour les marchandises et pour l’argent, ainsi que des poids et mesures exactement conformes aux poids et aux mesures en usage à la douane de Canton, et revêtus d’une estampille et d’un cachet constatant cette conformité. Ces étalons seront la base de toutes les liquidations de droits et de tous les payements à faire au Gouvernement chinois. On y aura recours en cas de contestation sur le poids et la mesure des marchandises, et il sera statué d’après les résultats qu’ils auront donnés.

Art. 27. Les droits d’importation et d’exportation prélevés en Chine sur le commerce français seront réglés conformément au tarif annexé au présent Traité sous le sceau et la signature des plénipotentiaires respectifs. Ce tarif pourra être revisé de sept en sept années, pour être mis en harmonie avec les changements de valeur apportés par le temps sur les produits du sol et de l’industrie des deux Empires.

Moyennant l’acquit de ces droits, dont il est expressément interdit d’augmenter le montant dans le cours des sept années et que ne pourra aggraver aucune espèce de charge ou de surtaxe quelconque, les Français seront libres d’importer en Chine des ports français ou étrangers, et d’exporter également de Chine pour toute destination, toutes les marchandises qui ne seraient pas, au jour de la signature du présent Traité, et d’après la classification du tarif ci-annexé, l’objet d’une prohibition formelle ou d’un monopole spécial.

Le Gouvernement chinois renonçant à la faculté d’augmenter, par la suite, le nombre des articles réputés contrebande ou monopole, aucune modification ne pourra être apportée au tarif qu’après une entente préalable avec le Gouvernement français et de son plein et entier consentement.

À l’égard du tarif aussi bien que pour toute stipulation introduite ou à introduire dans les Traités existants ou qui seraient ultérieurement conclus, il demeure bien et dûment établi que les négociants, et en général tous les citoyens français en Chine, auront droit toujours et partout au traitement de la nation la plus favorisée.

Art. 28. La publication d’un tarif convenable et régulier ôtant désormais tout prétexte à la contrebande, il n’est pas à présumer qu’aucun acte de cette nature soit commis par des bâtiments du commerce français dans les ports de la Chine. S’il en était autrement, toute marchandise introduite en contrebande par des navires ou par des négociants français dans ces ports, quelles que soient d’ailleurs sa valeur et sa nature, comme aussi toute denrée prohibée débarquée frauduleusement, seront saisies par l’autorité locale et confisquées au profit du Gouvernement chinois. En outre, celui-ci pourra, si bon lui semble, interdire l’entrée de la Chine au bâtiment surpris en contravention et le contraindre à partir aussitôt après l’apuration de ses comptes. Si quelque navire étranger se couvrait frauduleusement du pavillon de la France, le Gouvernement français prendrait les mesures nécessaires pour la répression de cet abus.

Art. 29. Sa Majesté l’Empereur des Français pourra faire stationner un bâtiment de guerre dans les ports principaux de l’Empire où sa présence serait jugée nécessaire pour maintenir le bon ordre et la discipline parmi les équipages des navires marchands et faciliter l’exercice de l’autorité consulaire. Toutes les mesures nécessaires seraient prises pour que la présence de ces navires de guerre n’entraîne aucun inconvénient, et leurs commandants recevraient l’ordre de faire exécuter les dispositions stipulées dans l’article 33 par rapport aux communications avec la terre et à la police des équipages. Les bâtiments de guerre ne seront assujettis à aucun droit.

Art. 30. Tout bâtiment de guerre français croisant pour la protection du commerce sera reçu en ami et traité comme tel dans les ports de la Chine où il se présentera. Ces bâtiments pourront s’y procurer les divers objets de rechange et de ravitaillement dont ils auraient besoin, et s’ils ont fait des avaries, les réparer et acheter dans ce but les matériaux nécessaires ; le tout sans la moindre opposition.

Il en sera de même à l’égard des navires de commerce français qui, par suite d’avaries majeures ou pour toute autre cause, seraient contraints de chercher refuge dans un port quelconque de la Chine.

Si quelqu’un de ces bâtiments venait à se perdre sur la côte, l’autorité chinoise la plus proche, dès qu’elle en serait informée, porterait sur-le-champ assistance à l’équipage, pourvoirait à ses premiers besoins et prendrait les mesures d’urgence nécessaires pour le sauvetage du navire et la préservation des marchandises. Puis elle porterait le tout à la connaissance du consul ou agent consulaire le plus à portée du sinistre, pour que celui-ci, de concert avec l’autorité compétente, pût aviser au moyen de rapatrier l’équipage et de sauver les débris du navire et de la cargaison.

Art. 31. Dans le cas où, par la suite des temps, la Chine entrerait en guerre avec une autre puissance, cette circonstance ne porterait aucune atteinte au libre commerce de la France avec la Chine ou avec la nation ennemie. Les navires français pourraient toujours, sauf le cas de blocus effectif, circuler sans obstacle des ports de l’une aux ports de l’autre, y trafiquer comme à l’ordinaire, y importer et en exporter toute espèce de marchandises non prohibées.

Art. 31. S’il arrive que des matelots ou autres individus désertent des bâtiments de guerre ou s’évadent des navires de commerce français, l’autorité chinoise, sur la réquisition du consul ou, à son défaut, du capitaine, fera tous ses efforts pour découvrir et restituer sur-le-champ, entre les mains de l’un ou de l’autre, les susdits déserteurs ou fugitifs.

Pareillement, si des Chinois déserteurs ou prévenus de quelque crime vont se réfugier dans des maisons françaises ou à bord des navires appartenant à des Français, l’autorité locale s’adressera au consul, qui, sur la preuve de la culpabilité des prévenus, prendra immédiatement les mesures nécessaires pour que leur extradition soit effectuée. De part et d’autre, on évitera soigneusement tout recel et toute connivence.

Art. 33. Quand des matelots descendront à terre, ils seront soumis à des règlements de discipline spéciale qui seront arrêtés par le consul et communiqués à l’autorité locale, de manière à prévenir, autant que possible, toute occasion de querelle entre les marins français et les gens du pays.

Art. 34. Dans le cas où les navires de commerce français seraient attaqués ou pillés par les pirates, dans des parages dépendants de la Chine, l’autorité civile et militaire du lieu le plus rapproché, des qu’elle aura connaissance du fait, en poursuivra activement les auteurs, et ne négligera rien pour qu’ils soient arrêtés et punis conformément aux lois. Les marchandises enlevées, en quelque lieu et dans quelque état qu’elles se trouvent, seront remises entre les mains du consul, qui se chargera de les restituer aux ayants droit. Si l’on ne peut s’emparer des coupables, ni recouvrer la totalité des objets volés, les fonctionnaires chinois subiront la peine infligée par la loi en pareille circonstance ; mais ils ne sauraient être rendus pécuniairement responsables.

Art. 35. Lorsqu’un sujet français aura quelque motif de plainte ou quelque réclamation à formuler contre un Chinois, il devra d’abord exposer ses griefs au consul qui, après avoir examiné l’affaire, s’efforcera de l’arranger à l’amiable. De même, quand un Chinois aura à se plaindre d’un Français, le consul écoutera ses réclamations avec intérêt et cherchera à ménager un arrangement à l’amiable ; mais si, dans l’un ou l’autre cas, la chose était impossible, le consul requerra l’assistance du fonctionnaire chinois compétent, et tous deux, après avoir examiné conjointement l’affaire, statueront suivant l’équité.

Art. 36. Si, dorénavant, des citoyens français éprouvaient quelques dommages, ou s’ils étaient l’objet de quelque insulte ou vexation de la part de sujets chinois, ceux-ci seraient poursuivis par l’autorité locale, qui prendra les mesures nécessaires pour la défense et la protection des Français : à bien plus forte raison, si des malfaiteurs ou quelque partie égarée de la population tentaient de piller, de détruire ou d’incendier les maisons, les magasins des Français, ou tout autre établissement formé par eux, la même autorité, soit à la réquisition du consul, soit de son propre mouvement, enverrait en toute hâte la force armée pour dissiper l’émeute, s’emparer des coupables, les livrer à toute la rigueur des lois ; le tout sans préjudice des poursuites à exercer par qui de droit pour indemnisation des pertes éprouvées.

Art. 37. Si des Chinois, à l’avenir, deviennent débiteurs de capitaines ou de négociants français et leur font éprouver des pertes par fraude ou de toute autre manière, ceux-ci n’auront plus à se prévaloir de la solidarité qui résultait de l’ancien état de choses ; ils pourront seulement s’adresser, par l’entremise de leurs consuls, à l’autorité locale, qui ne négligera rien, après avoir examiné l’affaire, pour contraindre les prévenus à satisfaire à leurs engagements, suivant la loi du pays. Mais si le débiteur ne peut être retrouvé, s’il est mort ou en faillite, et s’il ne reste rien pour payer, les négociants français ne pourront point appeler l’autorité chinoise en garantie.

En cas de fraude ou de non-payement de la part des négociants français, le consul prêtera, de la même manière, assistance aux réclamants, sans que, toutefois, ni lui ni son Gouvernement puissent, en aucune manière, être rendus responsables.

Art. 38. Si, malheureusement, il s’élevait quelque rixe ou quelque querelle entre des Français et des Chinois, comme aussi dans le cas où, durant le cours d’une semblable querelle, un ou plusieurs individus seraient tués ou blessés, soit par des coups de feu, soit autrement, les Chinois seront arrêtés par l’autorité chinoise, qui se chargera de les faire examiner et punir, s’il y a lieu, conformément aux lois du pays. Quant aux Français, ils seront arrêtés à la diligence du consul, et celui-ci prendra toutes les mesures nécessaires pour que les prévenus soient livrés à l’action régulière des lois françaises, dans la forme et suivant les dispositions qui seront ultérieurement déterminées par le Gouvernement français.

Il en sera de même en toute circonstance analogue et non prévue dans la présente Convention, le principe étant que, pour la répression des crimes et délits commis par eux en Chine, les Français seront constamment régis par les lois françaises.

Art. 39. Les Français en Chine dépendront également, pour toutes les difficultés ou les contestations qui pourraient s’élever entre eux, de la juridiction française. En cas de différends survenus entre Français et étrangers, il est bien stipulé que l’autorité chinoise n’aura à s’en mêler en aucune manière. Elle n’aura pareillement à exercer aucune action sur les navires français ; ceux-ci ne relèveront que de l’autorité française et du capitaine.

Art. 40. Si, dorénavant, le Gouvernement de Sa Majesté l’Empereur des Français jugeait convenable d’apporter des modifications à quelques-unes des clauses du présent Traité, il sera libre d’ouvrir, à cet effet, des négociations avec le Gouvernement chinois, après un intervalle de douze années révolues à partir de l’échange des ratifications. Il est d’ailleurs entendu que toute obligation non consignée expressément dans la présente Convention ne saura être imposée aux consuls ou aux agents consulaires, non plus qu’à leurs nationaux, tandis que, comme il a été stipulé, les Français jouiront de tous les droits, privilèges, immunités et garanties quelconques qui auraient été ou qui seraient accordés par le Gouvernement chinois à d’autres puissances.

Art. 41. Sa Majesté l’Empereur des Français, voulant donner à Sa Majesté l’Empereur de la Chine une preuve des sentiments qui l’animent, consent à stipuler, dans des articles séparés ayant la même force et valeur que s’ils étaient insérés mot à mot au présent Traité, les arrangements convenus entre les deux Gouvernements au sujet des questions antérieures aux événements de Canton et aux frais qu’ils ont occasionnés au Gouvernement de Sa Majesté l’Empereur des Français.

Art. 42. Les ratifications du présent Traité d’amitié, de commerce et de navigation, seront échangées à Pékin, dans l’intervalle d’un au à partir du jour de la signature, ou plus tôt si faire se peut, par Sa Majesté l’Empereur des Français et par Sa Majesté l’Empereur de la Chine. Après l’échange de ces ratifications, le Traité sera porté à la connaissance de toutes les autorités supérieures de l’Empire dans les provinces et dans la capitale, afin que sa publicité soit bien établie.

En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé le présent Traité et y ont apposé leurs cachets.

Fait à Tien-Tsin, en quatre expéditions, le vingt-septième jour du mois de juin de l’an de grâce 1858, correspondant au dix-septième jour de la cinquième lune de la huitième année de Hien-Foung.

(L. S.) Signé : Baron GROS.
(L. S.) Les signatures des plénipotentiaires chinois.

Articles séparés servant de complément au Traité conclu entre Sa Majesté l’Empereur des Français et Sa Majesté l’Empereur de la Chine, à Tien-Tsin, dans la prov ince de Tcheli, le 27 juin 1858.


Art. 1er. Le magistrat de Si-li-hien coupable du meurtre du missionnaire français Auguste Chapdelaine sera dégradé et déclaré incapable d’exercer désormais aucun emploi.

Art. 2. Une communication officielle adressée à Son Excellence M. le Ministre de France en Chine lui annoncera l’exécution de cette mesure, qui sera rendue publique et motivée convenablement dans la gazette de Pékin.

Art. 3. Une indemnité sera donnée aux Français et aux protégés de la France dont les propriétés ont été pillées ou incendiées par la populace de Canton avant la prise de cette ville par les troupes alliées de la France et de l’Angleterre.

Art. 4. Les dépenses occasionnées par les armements considérables qu’ont motivés les refus obstinés des autorités chinoises d’accorder à la France les réparations et les indemnités qu’elle a réclamées, seront payées au Gouvernement de Sa Majesté l’Empereur des Français par les caisses de la douane de la ville de Canton.

Ces indemnités et ces frais d’armements s’élevant à peu près à une somme de deux millions de taëls (2,000,000), cette somme sera versée entre les mains du ministre de France en Chine, qui en donnera quittance.

Cette somme de deux millions de taëls sera payée à Son Excellence M. le Ministre de France en Chine, par sixièmes, payables d’année en année, et pendant six ans, par la caisse des douanes de Canton ; elle pourra l’être, soit en numéraire, soit en bons de douane, qui seront reçus par cette administration en payement des droits d’importation et d’exportation et pour un dixième seulement de la somme qu’on aurait à lui payer ; c’est-à-dire que, si un négociant doit à la douane de Canton une somme de dix mille taëls, par exemple, il pourra en payer neuf mille en espèces et mille en bons dont il s’agit.

Le premier sixième sera payé dans le cours de l’année qui suivra la signature du présent Traité, à compter du jour où elle aura lieu.

La douane de Canton pourra, si elle le veut, ne recevoir chaque année en payement de droits que le sixième des bons émis, c’est-à-dire pour une somme de trois cent trente-trois mille trois cent trente-trois taëls et trente quatre centièmes.

Une commission mixte, nommée à Canton par l’autorité chinoise et par le ministre de France, fixera d’avance le mode d’émission de ces bons et les règlements qui en détermineront la forme, la valeur et le mode de destruction dès qu’ils auront servi.

Art. 5. L’évacuation de Canton par les troupes françaises s’effectuera aussitôt que possible après le payement intégral de la somme de deux millions de taëls stipulée ci-dessus ; mais, pour hâter la retraite de ces troupes, ces bons de douanes pourront être émis d’avance par série de six années et déposés dans la chancellerie de la légation de France en Chine.

Art. 6. Les articles ci-dessus auront même force et valeur que s’ils étaient inscrits mot à mot dans le Traité dont ils font partie, et les plénipotentiaires respectifs les ont signés et y ont apposé leurs sceaux et leurs cachets.

Fait à Tien-Tsin en quatre expéditions, le vingt-septième jour du mois de juin de l’an de grâce 1858, correspondant au dix-septième jour de la cinquième lune de la huitième année de Hien-Foung.

(L. S.) Signé : Baron GROS.
(D. S.) Les signatures des plénipotentiaires chinois.

L’art. 9 du Traité signé à Tien-Tsin, le 27 juin dernier, par le plénipotentiaire de Sa Majesté l’Empereur des Français et les plénipotentiaires de Sa Majesté l’Empereur de la Chine, ayant prévu que des modifications pourraient être apportées, d’un commun accord, par le Gouvernement de Sa Majesté l’Empereur de la Chine, et ceux des puissances signataires des Traités de Tien-Tsin, au sujet d’améliorations à introduire dans le tarif qui fixe les droits d’importation, d’exportation, de transit, etc., et Sa Majesté l’Empereur de la Chine ayant, à cet effet, donné l’ordre aux commissaires Kouei-Liang, commissaire impérial de la dynastie Ta-Tsing, membre du conseil privé du Pavillon oriental, ministre de la justice, général en chef des troupes de la Bannière blanche, muni de pleins pouvoirs, etc., etc., etc. ; et Houd-Chà-Nà, commissaire impérial de la dynastie Ta-Tsing, lecteur de la Maison impériale, secrétaire d’État au département de l’intérieur, général en chef de l’armée Sino-Tartare de la Bannière bordée d’azur, muni de pleins pouvoirs, etc., etc., etc. ; auxquels Sa Majesté a jugé à propos d’adjoindre en la même qualité : , commissaire de la dynastie Ta-Tsing, second tuteur de l’héritier présomptif, secrétaire d’État au département de la guerre, vice-roi des deux Kiangs, muni de pleins pouvoirs, etc., etc., etc. ; Minn, commissaire impérial de la dynastie Ta-Tsing, fonctionnaire de deuxième rang, chargé des mouvements militaires, etc., etc., etc. ; et Touan, commissaire impérial de la dynastie Ta-Tsing, fonctionnaire de cinquième rang, membre du conseil général, attaché au ministère de la justice, etc., etc., etc. ;

De se rendre à Chang-haï, où se trouvait le plénipotentiaire de France, afin de s’entendre avec lui au sujet des modifications et des améliorations à apporter au tarif, il a été convenu, entre les Hautes-Parties contractantes, qu’après mûr examen, et après avoir consulté des personnes instruites en matière de commerce, il serait procédé à l’établissement d’un nouveau tarif accompagné de règlements commerciaux servant à faciliter sa mise à exécution.

Il a été également convenu que le nouveau tarif français et les règlements de commerce qui y sont annexés, pouvant, à bon droit, être considérés comme un Traité supplémentaire à celui du 27 juin dernier, ce tarif et ces règlements auraient, aux mêmes dates et aux mêmes conditions stipulées dans le Traité de Tien-Tsin, la même force et valeur que s’ils y étaient insérés mot à mot, et qu’à partir du jour où le Traité de Tien-Tsin sera mis à exécution, le tarif qui s’y trouve annexé en ce moment sera considéré comme nul et non avenu et remplacé par le nouveau tarif.

Le plénipotentiaire de France et ceux de l’Empire chinois ayant reconnu valables les pouvoirs dont ils sont revêtus, ont établi, d’un commun accord, ledit tarif et les règlements commerciaux qui le terminent.

En conséquence, les droits que les Français auront à payer aux autorités chinoises, par suite des opérations commerciales qu’ils pourraient faire en Chine, sont fixés, de commun accord, d’après le tarif divisé en marchandises d’importation et en marchandises d’exportation, énumérées dans chacune de ces deux grandes divisions, par ordre de lettres alphabétiques.