Notice historique et statistique sur Douy-La-Ramée et La Marre/Chapitre 4

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et Auguste Béguin
Imprimerie Destouches (p. 35-39).


CHAPITRE IV
TERROIR. — AGRICULTURE. — IMPOTS


Le terroir de la paroisse de Douy-la-Ramée contenait d’après le plan topographique levé par ordre de l’intendant vers 1780, 1.348 arpents grande mesure (ou 693 hectares), déduction faite des chemins, places, sols de maisons et dépendances. Les biens d’église, (Faremoutiers, Fontaines, la cure, la fabrique, la chapelle et aussi la fabrique de l’église de Puisieux, celle de l’église de Brégy, le collège de Montaigu, l’église métropolitaine de Paris), en occupaient 800 arpents[1], le seigneur en possédait 407, biens nobles pour la plus forte partie ; il restait moins de 130 arpents de terre de roture libres.

La propriété de ce sol n’était pas divisée et ne pouvait pas se diviser, les établissements ecclésiastiques n’ayant pas la faculté d’aliéner et le seigneur n’aliénant pas. Aujourd’hui encore quatre propriétaires possèdent plus de 630 hectares. Sur Douy-la-Ramée les ventes des biens ecclésiastiques n’ont guère contribué à la division de la propriété ; la qualité civile des propriétaires a changé, mais les propriétés sont restées compactes. Par suite aussi le morcellement est moindre sur Douy-la-Ramée que sur la plupart des communes de notre contrée ; il ne s’y trouve pour 773 hectares que 723 parcelles.

En 1770, l’exploitation du terroir de Douy-la-Ramée (1.154 arpents de terre et pré), se partageait entre neuf détenteurs : Pierre Benoist occupait Nongloire compté pour 412 arpents ; Jean-Baptiste Berson père et son fils occupaient les deux fermes seigneuriales comptées pour 423 arpents ; Nicolas Tronchon, Fontaines avec 162 arpents et cinq autres se partageaient 152 arpents. Il existe de même aujourd’hui quatre grandes exploitations et cinq petites de 5 à 10 hectares ; sous ce rapport encore Douy-la-Ramée n’a pas changé[2].

Ce qui a moins varié encore, s’il est possible, c’est la nature des productions du territoire de Douy-la-Ramée : les céréales y dominent dans une large proportion ; pour leur faire plus large espace a été défriché et transformé en terre arable le bois de la seigneurie qui en était un des agréments « percé de douze routes se réunissant au milieu en un rond point ».

En 1770, on comptait dans la paroisse de Douy-la-Ramée, suivant le rôle de la taille, 55 chevaux, 75 vaches, 1.000 bêtes à laine. En 1882, on y constatait 82 chevaux, 20 bœufs de travail, 76 vaches et taureaux et 1.675 bêtes à laine non compris 356 agneaux au-dessous d’un an. L’accroissement de ce matériel vivant est sensible sur deux des articles.

A Douy, comme dans tout le Multien et le Valois, les fermages ont suivi durant la deuxième moitié du XVIIIe siècle une progression très sensible. Les fermes de Douy et de la Ramée affermées à Jean-Baptiste Berson, père et fils, le 28 juin 1762, moyennant 4.410 livres, se renouvelaient au profit de la même famille, en 1773 moyennant 6,500 livres et trouvaient preneur en 1782 au prix de 8.130 livres de fermage annuel.

De même les 39 arpents de la cure, qui, en 1753, rapportaient 350 livres de fermage par an, en rapportaient au moment de la Révolution 740, non compris diverses charges.

De même encore la terre et seigneurie de Sainte-Fare, Oppigny-Nongloire ou plus simplement Nongloire dont le fermage en 1729 était de 3,070 livres en deniers et quelques menues prestations en nature, était affermée en 1773 moyennant 5,500 livres, plus 18 septiers de blé à livrer au chapelain de Sainte-Fare et 4,000 livres de pot-de-vin.

C’est une preuve qu’à ce moment l’agriculture jouissait d’une grande prospérité.

L’accroissement des fermages a continué dans ce siècle jusque vers 1875 ; depuis, la baisse est survenue et s’accentue d’année en année.

L’impôt principal sous l’ancien régime était la taille à laquelle s’ajoutaient le taillon et autres accessoires ; à sa suite venaient la capitation et les vingtièmes[3]. En 1788, la paroisse de Douy-la-Ramée payait au roi pour la taille et ses accessoires et pour la capitation 6,640 livres, en outre pour les vingtièmes 818 l. 19 s., au total 7,458 1. 19 s. (représentant aujourd’hui près de 20,000 francs). Les trois premières contributions actuelles (contribution foncière, personnelle-mobilière, portes et fenêtres), qui ont remplacé la taille, la capitation et les vingtièmes, ne s’élèvent pour Douy-la-Ramée qu’à 6,666 fr. 25 en principal revenant à l’État (rôle de 1884). De ce chef la charge est infiniment moindre qu’en 1788. Il est vrai que la commune paie, en outre de ce principal, 8,671 fr. 80 pour centimes départementaux et communaux (même rôle) ; mais cette somme est employée au profit de la commune, immédiatement pour les centimes communaux (4,772 fr. 85) et médiatement par l’intermédiaire du département pour les centimes départementaux ; réunis, le principal et les centimes additionnels n’égalent pas la valeur de ce qui avant 1789 allait en entier et sans retour dans le trésor du roi. De même l’imposition pour les routes qui était le cinquième de la taille et de la capitation s’élevait à plus de 1,600 livres (plus de 4,000 francs d’aujourd’hui) ; or, la prestation qui a remplacé la corvée, (on sait avec quel avantage), ne s’élève qu’à 1,445 fr. 35 (rôle de 1884).

Quelque lourds que soient les impôts directs grevant l’agriculture, ils étaient, on le voit, beaucoup plus lourds encore avant 1789[4].

Parmi les ouvriers et agents agricoles de Douy-la-Ramée, la Société d’agriculture, sciences et arts de l’arrondissement de Meaux a honoré de ses récompenses, en 1840, Pierre Boyard charretier durant 25 ans en la ferme de la Ramée (médaille d’argent) ; en 1843 et en 1854, François Boutrel, berger, depuis plus de 40 ans, en la ferme de Nongloire (médaille de bronze, puis médaille d’argent et prime de 150 francs) ; en 1861, Auguste Ambroise Goulas, batteur, conducteur de machine à battre, durant 33 ans, en la ferme de Douy (médaille de bronze), et en 1886, Jean-Auguste Dusautoy, ouvrier depuis 62 ans dans la ferme de M. Fouillaux, à la Ramée (médaille d’argent).

Il existait et existe encore en la commune de Douy-la-Ramée deux moulins à eau, mus par la Thérouanne ; l’un dépendant de Fontaines-les-Nonnes, n’est mentionné ici que pour ordre ; l’autre à la Ramée, était le moulin banal de la seigneurie de Douy-la-Ramée, c’est-à-dire que tous les manants et habitants de le paroisse sauf Fontaines et Nongloire), devaient y faire moudre leurs grains, non ailleurs, et que nul meunier ne pouvait venir quêter du grain ni apporter de la farine sur cette paroisse. En 1741, Pierre Leroy, meunier du moulin de Brégy, osa enfreindre cette règle : Boucot de Pontevrard obtint contre lui sentence de la justice de Douy et arrêt du Parlement, et malgré l’intervention de Messire de Flesselles, marquis de Brégy, un arrêt de la Chambre des requêtes du Palais, du 4 mai 1745, consacra de nouveau la banalité du moulin de la Ramée et défendit à Leroy et à tous autres d’y porter atteinte désormais.

Le droit de mouture était d’un minot sur 12.

Le moulin de la Ramée était affermé 300 livres en 1763, 400 livres en 1767, 800 livres en 1779.

On sait que la Révolution a supprimé les banalités comme contraires à la liberté et au progrès.

Des débats ont eu lieu à plus d’une reprise entre le propriétaire du moulin de la Ramée et celui du Moulin-Rouge situé au-dessus ;

il serait sans intérêt de les relater, il suffit de mentionner une sentence des eaux et forêts rendue à la Table de marbre du Palais à Paris, le 10 mars 1701, entre Christophe Dalmas, seigneur de Boissy-le-Chatel et François Joisel, seigneur de Douy-la-Ramée ; laquelle a fixé le niveau de l’eau et déterminé les obligations de chacune des parties quant au curage.

Il existait sur Nongloire, dépourvu de cours d’eau, un moulin à vent dont il ne subsiste plus que la tourelle.


  1. Voir plus loin le tableau de la vente des biens d’église.
  2. Les quatres grandes fermes sont : 1° Celle de Douy appartenant à Mmes  Brazier et Poisson, cultivée par M. Thirion, gendre de M. Lefèvre dont la famille y est établie depuis 1827 ; 2° La ferme de Nongloire, acquise de la Nation par Mme Quatresols de la Motte, le 16 mai 1791, revendue par elle le 22 thermidor an XI à Claude Dassy, passée par succession à la baronne de Vandœuvre, sa fille, et appartenant aujourd’hui à ses petits-fils MM. Charles et Amédée Dassy ; elle a eu pour fermiers en 1729, Charles Gibert, laboureur à Rozoy-en-Multien ; en 1736, Jeanne-Angélique Gibert, veuve de Jean Hanoteau ; en 1747, Pierre Benoist, de Fayel, paroisse de Baillet, puis sa descendance jusqu’en 1326 ; à cette dernière époque, Pierre-Augustin Heurlier, dont un descendant du même nom l’occupe encore aujourd’hui ; 3° La ferme de la Ramée avec le moulin, appartenant à M. et Mme Béguin-Lefèvre, de La Marre, cultivée par M. Fouillaux ; 4° Et la ferme de Fontaines, appartenant à M. Aubry-Vitet, cultivée par M Delagarde.
  3. On trouvera à l’appendice la copie du rôle de la taille (sans taillen ni accessoires) pour 1770. Voir sur ces impôts la notice concernant Lizy-sur-Ourcq.
  4. Grâce à la nouvelle sous répartition foncière opérée en 1858, 1859 et 1860, entre les arrondissements du département de Seine-et-Marne et dont M. Frédéric Benoist, conseiller général du canton de Lizy, a été un des principaux promoteurs, la commune de Douy-la-Ramée a été déchargée de 561 fr. en principal et d’environ 1,000 fr. par année, si on tient compte des centimes généraux et départementaux qui se seraient ajoutés à cette somme.
    Dans les premières années de l’établissement de la contribution foncière, la charge des paroisses rurales a été écrasante. En 1792, Douy-la-Ramée fut imposé
    de 12,356 livres 5 sous pour contribution foncière et de 4,832 livres 1 sou 9 deniers pour contribution mobilière ; en 1793, de 15,340 livres pour contribution foncière et de 1,815 livres pour contribution mobilière. En l’an IX le total de ces deux contributions n’était plus que de 8,183 fr. 80 c. y compris les dépenses du département et de l’arrondissement, et malgré l’adjonction de la contribution des portes et fenêtres, le principal a été diminuant jusqu’en 1821, époque depuis laquelle ce principal n’a plus subi d’autre variation que celle résultant de l’augmentation et de la diminution de la matière imposable.