Notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/7
VII
DESSIN DE LA FIGURE
1. Méthode pour dessiner la figure. — Voici un fait à mettre au nombre des plus curieux que recèle le livre de Villard de Honnecourt : cette application de la géométrie au dessin de la figure, tant de fois proposée depuis la Renaissance, elle était connue et pratiquée au XIIIe siècle. J’en demande bien pardon aux hommes d’esprit qui dans ces derniers temps ont immolé l’art antique à celui du moyen âge en prétendant que ce qui se faisait à une époque avec les entraves de l’imitation matérielle, n’était dans l’autre que le produit de l’inspiration pure. Un bon dessinateur du bon siècle du moyen âge se charge lui-même de leur prouver que ses contemporains et lui ne dédaignent pas de chercher dans les prosaïques combinaisons de la géométrie les formes de la nature organique. Quatre pages du manuscrit sont remplies de ces combinaisons, mises par l’auteur sous ce triple intitulé :Chi commence le mate de la portraiture[1]. — Incipit materia portraiture. — Ci commence li force des trais de portraiture si con ars de jometrie les ensaigne por legièrement ovrer[2].
Définir au juste cette méthode serait difficile ; sans doute elle était très arbitraire dans l’application. Ses procédés consistaient à réduire les attitudes à de simples lignes, ou a ramener les plans des corps aux figures élémentaires telles que le triangle et le carré ; mais cela se faisait sans le secours du calcul ni d’aucun autre moyen de précision, de sorte que la géométrie n’y intervenait que pour fournir les termes d’une approximation plus ou moins contestable. Aussi acquérait-on par l’étude de ces procédés, non pas la science du dessin, mais l’art de retrouver les poses en ne gardant que la mémoire de certains traits convenus ; l’œil et la main y contractaient aussi certaines habitudes qui, parce qu’elles dispensaient de regarder de plus près la nature, rendaient l’ouvrage facile, suivant l’expression de Villard de Honnecourt. La matière de portraiture n’est donc qu’une routine, de même que les dessins qui l’accompagnent ne sont que des patrons pour un certain nombre de sujets prévus. C’est ce que reconnaîtront les personnes habitués à l’art du XIIIe siècle, lorsqu’elles verront que les poses, à la reproduction desquelles s’attache la méthode, sont précisément celles qu’ont rendues avec une prédilection marquée les sculpteurs et miniaturistes du temps.
Pour que la démonstration soit complète, je mettrai sous les yeux du lecteur plusieurs de ces dessins.
Les fig. 1, 2 et 3 donnent le type de tous les analogues :la tête de vieillard large et basse du front, étroite et longue de la face ; le visage de femme rond et tendant à la bouffissure, la tête du cheval courte et rentrée dans l’encolure.Fig. 4. Pose de l’homme ; campé, une main sur la hanche, le tête inclinée, le ventre en avant.
Fig. 5. Pose de la femme, la tête tout à fait baissée, les bras rapprochés du corps, dans l’attitude de la soumission.Fig. 6. Pose de la Vierge avec l’enfant Jésus sur les genoux pour les scènes de l’adoration des bergers ou des mages.
Fig. 7. Pose du roi siégeant comme juge, le sceptre à la main, les cuisses croisées.
Fig. 8. Type de la figure équestre reproduite à satiété sur les sceaux.
Qu’il suffise de ces exemples qui résument en eux le reste de la méthode.
2. De la pratique de l’auteur. — Les dessins de Villard de Honnecourt se ressentent de sa théorie. Tous ils en présentent l’application à un degré plus ou moins marqué. Sans parler de quelques-uns de ses croquis qui sont de pures triangulations, on voit qu’il procède dans ses esquisses par surfaces polygones et par contours anguleux. A la vérité, il possède une entente des draperies qui lui fait corriger le vice de cette préparation, à mesure qu’il soigne davantage ; cependant, la forme des nus, dont il n’a pas le sentiment, conserve toujours chez lui quelque chose de maigre, de heurté, de linéaire.Deux figures montreront cela d’une manière plus nette que les paroles (voy. Fig. 9 et pl. IX, fig. 1).
La première est celle d’une dame en habit de chasse, le faucon sur un poing ; un gant dans l’autre main :elle n’a point de légende.
La seconde, également dénuée d’explication, représente un personnage affaissé par la douleur et vêtu à l’antique.
La fig. 9 simplement esquissée, offre de la hardiesse et de l’élégance. Villard de Honnecourt n’a pas toujours réussi à produire du premier coup des ensembles aussi satisfaisants. D’ordinaire ses préparations sont maladroites et disgracieuses ; sans doute parce que la recherche de la pose préoccupait plus qu’elle n’a fait ici. L’attitude de son personnage est en effet de celles qu’il devait savoir par cœur, à en juger par la quantité d’analogues qu’on retrouve dans les monuments figurés du XIIIe siècle. Mais indépendamment de cela, ce qu’il importe de remarquer, c’est le visage de la femme indiqué par un cercle, ce sont ses mains réduites en polygones, c’est la forme du chien qui est comme taillé à facettes.
La fig. 1 de la pl. IX est un dessin fini. Je ne ferai pas honneur à Villard de Honnecourt de la belle expression dont elle est empreinte, puisque j’ignore si c’est lui qui l’a composée ; mais à ne voir que l’œuvre du dessinateur, il est impossible de na pas trouver digne d’éloge la manière dont sont rendus la chevelure et les draperies. Malgré leur nombreux détails, elles n’ont rien fait perdre à la pose de sa souplesse, et la vérité de l’ajustement domine l’attention au point de dissimuler de très grands défauts d’emmanchement et de perspective. A côté de cela, il y a dans le pied, le seul nu qui apparaisse, une pauvreté d’exécution telle qu’on ne dirait plus l’ouvrage de la même main. Tout y manque, la proportion, la correction, le sentiment. C’est une pièce de rapport, une réminiscence des formes enseignées par la méthode géométrique.
Les remarques qu’on vient de faire s’appliquent à toutes les grandes figures de l’album. Elles offrent toutes ce contrastes de draperies extrêmement bien traitées à côté d’une imperfection choquante des nus. Manquer les formes du corps était pour Villard de Honnecourt quelque chose de constant et, pour ainsi dire, de fatal. Ce défaut lui est-il particulier ou n’a-t-il pas été plutôt celui de son siècle ?L’habitude du tracé géométrique est-elle ce qui a rendu si faible dans une partie du dessin des artistes qui se tiraient de l’autre avec un incontestable talent ?Voilà des questions qui pourraient se présenter ici, mais que je laisse à d’autres le soin de traiter, ne voulant que mettre au jour les faits positifs qui ressortent de mon manuscrit.
3. Études d’après l’antique. — Des écrivains et des archéologues ont nié de nos jours que les artistes du XIIIe siècle se fussent inspirés de l’antique, les uns, parce qu’ils ne trouvaient pas dans leurs œuvres la marques d’une telle imitation ; les autres, parce qu’ils supposaient qu’un préjugé pieux devait rendre abominables ou au moins indifférents à leurs yeux des modèles profanes. La pratique de Villard de Honnecourt attestée par son album fait tomber ces raisons ainsi que l’opinion qui cherche à se fonder sur elles. Il copiait l’antique sans croire enfreindre ses devoirs de chrétien et sans acquérir à cet exercice le sentiment du nu qui lui manquait. C’est encore par des dessins qu’il faut prouver cela.
Dans la figure gravée sur notre pl. X, n°1, tout le monde reconnaît un personnage grec, vêtu de la chlamyde :j’en dirai tout à l’heure l’attribution probable. Certainement ce n’est pas au moyen âge qu’on aurait imaginé ce costume. Il est vrai que ce n’est pas non plus dans l’antiquité qu’on rendait de cette façon les formes humaines. Mais, d’après ce qu’on a déjà dit du talent de Villard de Honnecourt, tout s’explique. D’un beau modèle qu’il avait sous les yeux il a rendu convenablement la seule partie qu’il fût capable d’interpréter, le vêtement. Le reste s’est transformé sous sa main en un à peu près, satisfaisant pour lui, mais qui nous prouve jusqu’à quel point son œil était rebelle à de certaines perceptions.
Ailleurs, la copie d’un modèle antique est, si cela se peut, encore plus incontestable, car elle est avouée par une légende. De tel manière, dit l’auteur, fu li sepouture d’un Sarrazin que jo vi une fois, « ainsi était faite la sépulture d’un Sarrasin que je vis une fois ; » et il dessine au-dessous le sujet de notre pl. VIII. Sarrazin est l’équivalent d’antique et de païen ; murs sarrasins ou sarrasinois signifie toujours les ruines romaines dans les textes du moyen âge. Ce serait donc là un tombeau romain que Villard de Honnecourt nous aurait conservé ; mais il est probable qu’il a aussi jugé de la destination que de la provenance du monument. Dans ce prétendu tombeau, je vois les honneurs divins décernés à un empereur. En haut, Rémus et Romulus soutenant une couronne de feuillage ; l’empereur assis sur un pulvinar, à ses pieds un autel desservi par deux augustales.
Quoi qu’il en soit, le monument est antique ; mais le dessin est gothique. L’architecture est déformée selon le goût du XIIIe siècle. L’empereur est devenu un roi du moyen âge avec son sceptre fleurdelisé dans la main. Les doigts effilés des personnages, leurs pieds en trapèzes, la singulière anatomie attribuée aux poitrines et aux hanches, tout cela nous renvoie à la méthode expliquée ci-dessus, tout cela prouve encore une fois qu’en copiant les anciens, le dessinateur ne les voyait point tels qu’ils étaient.
Plus loin, on trouvera la mention d’autres figures qui paraissent provenir de la même source.
4. Études d’après la nature nue. — Quelques figures nues de l’album pourraient bien être, non pas des copies de l’antique, mais de véritables académies posées par des modèles. Je mets de ce nombre deux lutteurs (fol. 15 v.) en béguins ou coiffes et en braies ou caleçons du XIIIe siècle. L’homme assis représenté sur notre pl. IX, fig. 2, me semble avoir la même origine. Sans m’appuyer sur la forme de son bonnet, qu’il serait permis d’imputer à une fantaisie de notre auteur, sa pose ne rappelle pas le moins du monde une statue antique. Elle est maniérée comme toutes celles que donnent les modèles de profession. D’un autre côté, le dessin offre une telle recherche, et, vu le savoir-faire de Villard, une telle réussite de l’exactitude anatomique, que pour être arrivé là, il semble qu’il lui ait fallu avoir sous les yeux quelque chose de plus voyant et de plus souple que les détails de la pierre ou du marre. Enfin la faute de perspective qui fait tomber perpendiculairement une jambe destinée à être vue en raccourci, est peut-être encore une preuve du modèle vivant. Une statue, par son immobilité, aurait mieux fait de comprendre au dessinateur la projection dont il avait à tenir compte.
Quoi qu’il en soit, il ne résulte pas moins de ce qui précède, que si les artistes du XIIIe siècle n’ont pas atteint la perfection de la forme corporelle, ce n’est pas faute d’avoir senti qu’il fallait l’étudier, ni faute d’avoir aspiré à la rendre.
5. Études d’animaux. — L’étude des animaux d’après nature ne peut pas faire de doute. Villard de Honnecourt déclare « contrefait au vif » un lion qu’il a dessiné de face et de profil (fol. 24 r. et v.) :Saciés bien que cis lions fu contrefais al vif. Le profil est fort bien réussi ; mais la vue de face est manquée. Ailleurs (fol. 26 r.) il se tire encore avec succès de la représentation de deux faucons sur une perche. Ses chevaux (fol. 8 v. et 23 v.) sont moins heureux. Des chats, une écrevisse, une sauterelle, une demoiselle, une mouche, qui remplissent comme études le fol. 7 v., ont été faits visiblement d’après nature. Ces dessins ne manquent pas d’un certain caractère, quoique traités dans plusieurs de leurs détails d’une façon tout à fait fantastique.
6. Sujets religieux. — Jésus-Christ dans l’attitude du jugement, les pieds nus et drapés dans un manteau d’un ajustement magnifique. Il trône sur un banc porté par des colonnettes. Le bras droit est élevé, mais la main n’est pas faite (fol. 16 v.).
Jésus assis et évangélisant, la main droite levée pour bénir, la gauche retenant un livre appuyé sur le genou. Le visage n’est qu’indiqué (fol. 11 r.).
Jésus prêchant debout, affublé du manteau des philosophes, le bras droit dégagé et dans la pose de la bénédiction ; le gauche enveloppé, la main est libre et tient un très petit rouleau (fol. 27 v.).
Jésus prosterné au jardin des Olives, ou au chemin du Calvaire, avec la légende :Ce est un imaje Deiu si cume il est cheus. « C’est une représentation de la manière dont Dieu est tombé » (fol. 17 r.).
Scènes de la présentation au peuple et de la flagellation ; simples esquisses où sont accusés seulement les contours des corps (fol. 28 v.).
Jésus crucifié, affaissé sur lui-même, la tête séparée du nimbe qui reste figuré à la rencontre des bras de la croix ; les deux pieds cloués d’un seul clou ; le subligaculum noué au-dessous du nombril et descendant jusqu’aux genoux (fol. 2 v.).
Descente de croix ; sujet à sept personnages, d’un mouvement remarquable et présentant quelque analogie pour la composition avec le célèbre tableau de Rubens (fol. 13 v.).
Esquisse à mi-corps d’une sainte Vierge tenant l’enfant Jésus sur ses genoux. L’enfant bénit de la main droite, et la mère tient de la gauche une plante à racine bulbeuse que je ne puis définir (fol. 10 v.).
Les douze apôtres, assis sur des bancs dans douze attitudes différentes, tous munis de rouleaux. Par le style et l’ajustement ces figures se rapprochent beaucoup de celles des manuscrits carolingiens. Légende :Ci poeis vos trover les agies des xij. apostles en séant. « Ici vous pouvez trouvez les âges (physionomies) des douze apôtres assis. » (fol. 1 v.).
Tête d’étude d’un décimètre de haut, exécutée au trait et dans le plus grand détail pour servir à une représentation d’apôtre (fol. 18 r.).
Deux grandes figures drapées à l’antique et recueillies par l’auteur probablement comme représentations des prophètes. L’une est tournée de trois quarts, barbue, vêtue du manteau grec et de l’himation, un rouleau déployé à la main gauche ; la droite dans le geste de la démonstration. L’autre est de face, imberbe, complètement enveloppée dans une toge ; les pieds nus, et, aux jambes, des anaxyrides ou braies (fol. 28 r.).
Dessin très étudié pour les draperies, d’une jeune femme coiffée en cheveux, avec cette légende :Vesci l’une des ij. damoizieles de que li jugemens fu fais devant Salomon de leur enfant que cascune voloit avoir. « Voici l’une des deux demoiselles dont le jugement eut lieu devant Salomon à propos de l’enfant que chacune voulait avoir. » (Fol. 12 r.).
Grand dessin de sept personnages, celui de l’album qui est exécuté avec le plus grand soin. Il me paraît représenter saint Paul plaidant sa cause devant le roi Agrippa. Les costumes sont de convention, dans un goût mêlé de l’antique et du moyen âge. Au milieu de la composition, le roi assis avec ses insignes et dans l’attitude traditionnelle, écoute un homme à barbe agenouillé devant lui et qui semble parler avec chaleur. A droite deux assistants, dont l’un (peut-être le proconsul Festus) est drapé dans une toge. A gauche, un jeune homme chuchotant à l’oreille d’un personnage habillé d’un surcot comme les bourgeois du XIIIe siècle. Derrière ce groupe un sergent avec sa verge (fol. 13 r.).
L’Église personnifiée, debout, richement vêtue, couronnée, tenant d’une main le labarum et de l’autre le calice (fol. 4 v.).
Le martyre de saint Côme et saint Damien. Deux saints nimbés, agenouillés l’un devant l’autre ; deux satellites s’apprêtent à les décapiter. Légende :Vesci le labitement saint Come et saint Domyen (fol. 27 r.).
Un évêque assis sur un banc dans l’attitude de la majesté, bénissant de la droite, tenant une crosse de la gauche. Mitre basse, chasuble en cloche et flottante à l’antique, manipule étoffé comme une écharpe (fol. 1 r.).
Figures allégoriques de l’Humilité et de l’Orgueil :très beaux dessins conformes aux représentations analogues qui ornent d’ordinaire la grande porte des cathédrales. L’Humilité a la figure d’une vierge voilée et assise qui tient sur l’un de ses genoux un disque chargé d’une colombe. L’Orgueil est représenté par un seigneur qui tombe à bas de son cheval. Légendes :Humilité. — Orgieus, si cume il tribuche (fol. 3 v.).
La roue de Fortune ; esquisse par simples triangulations, pour le dessin d’un vitrail en forme de rose. La Fortune est au milieu, assise sur l’axe de la roue dont elle fait tourner les rais avec ses mains. Il y a six rais aboutissant à six lobes, dans lesquels sont figurés des rois plus ou moins à leur aise, suivant la position du lobe qu’ils occupent. Légende :Vesci desos les figures de le ruee de Fortune, totes les vij. Imagenes (fol. 21 v.). « Voici les figures de la rooue de fortune, rendue toutes les sept (comme il convient). » Interprète des artistes du XIIIe siècle qui avaient reproduit à satiété cette allégorie, Jean de Meung, dit de la Fortune :
Elle a une roe qui torne,
Et quant ele veut, ele met
Le plus bas amont, ou somet :
Et celi qui est sor la roe
Reverse à un tor en la boue.
Représentation symbolique d’une ville par un portail à pignons couvert d’un comble aigu d’où sélèvent deux petits clochetons. Des croix sur les profils des pignons latéraux indiquent une église. Au flanc gauche adhère un donjon dans une enceinte crénelée (fol. 18 v.).
7. Sujets profanes d’après l’antique. — Représentation présumée du culte rendu à un empereur. Voyez ci-dessus, p. 286.
Personnage d’un type grec mentionné également à la p. 286. Un antiquaire regrettable, feu M. Ad. Duchalais le considérait comme un Mercure dont le pétase a été déformé par le dessinateur. L’attitude et l’ajustement sont en effet ceux de plusieurs figurines de Mercure conservées au Cabinet des antiques de la Bibliothèque nationale.
Un homme imberbe, frisé et entièrement nu à l’exception des épaules, sur lesquelles est passée une palla. Il tient élevé de la main droite un vase à long col rempli de fleurs. Il se tourne du côté d’un cippe orné de moulures et sur lequel est jetée une chlamyde. Derrière le cippe est une petite figure de roi dans un encadrement d’architecture (fol. 11 v.). Ce dessin, seul entre tous ceux de l’album, a été lavé à l’encre par-dessus le trait à la plume.
Deux esclaves accroupis, occupés à jouer aux dés devant un abaque. L’un a l’air d’un Grec et l’autre d’un Barbare (fol. 9 r.).
Barbares combattant contre des lions. L’un d’eux a les cheveux retroussés à la mode des Sicambres (fol. 26 v.).
Combinaison de quatre figures nues assemblées comme quatre rais d’étoile sur la rencontre de deux perpendiculaires. Chacune des figures dessinées absolument sur le même profil, est à mi-corps avec une jambe levée, et sur le pied de cette jambe la figure suivante appuie un ciseau de la main gauche tandis que la droite, armée d’un marteau, est levée pour frapper. Je vois dans cette combinaison un motif d’ornement copié d’après une mosaïque (fol. 19 v.).
8. Sujets profanes du XIIIe siècle. — Un prince, ganté, le faucon sur le poing, et assis à côté de sa femme, sur un banc à double siège (fol. 14 r.). Dessin gravé dans l’ouvrage de Willemin.
Un chevalier armé en guerre, mettant le pied sur l’étrier pour monter à cheval (fol. 23 v.). Également publié par Willemin.
Un homme de guerre à pied, en haubergeon, cotte par-dessus et chapeau de fer, chausses de mailles lacées du talon au mollet ; au bras gauche un écu, une lance et un croc suspendu par une courroie (fol. 2 r.).
Deux cavaliers affrontés, habillés de tuniques avec chausses et éperons, les bras nus ainsi que la tête (l’un d’eux a pourtant un béguin ou coiffe), armés de lances et d’écus à boucle sans armoiries (fol. 8 v.).
Deux sergents dans l’attitude de combattants, l’un armé d’une longue lance et l’autre d’un arc. Ils ont pour vêtement de simples tuniques. Le premier porte avec cela des brodequins, une coiffe et une ceinture d’où pend une petite épée (fol. 25 v.).
Portrait assis d’un personnage laïque, barbu, habillé de cotte, surcot et manteau, coiffé d’un chapeau à basse forme et sans bords. Souliers découpés à la mode du temps.
Deux lutteurs ou champions se prenant à bras le corps ; dessin cité précédemment, p. 287.
9. Animaux symboliques, allégoriques et fantastiques. — Le lion et le bœuf ailés, chacun dans l’attitude d’animaux passants et tenant un livre dans leur bras ; types d’un grand caractère, dont la noblesse et la correction semblent indiquer une provenance antique (fol. 13 v.).
Un démon sous la figure d’un satyre accroupi, très velu, avec des mains crochues et des cornes ; type plus correct et plus noble que ne le sont d’ordinaire les représentations du diable au moyen âge (fol. 1 r.).
Un pélican sous la forme de convention que les artistes du moyen âge ont donnée à cet oiseau, moitié aigle, moitié faucon, posé de profil sur le bord d’un nid, battant des ailes et se déchirant le ventre (fol. 1 r.).
Une salamandre dans le goût du XIIIe siècle, pour la décoration d’une crosse dont la volute est indiquée sous les pieds de l’animal (fol. 11 r.).
Un hibou conforme au type des monuments égyptiens (fol. 1 r.).
Un ours et un cygne, dans l’attitude d’animaux passants. Types de toute beauté et conformes aux analogues qu’on trouve sur les bas-reliefs et dans les mosaïques de la meilleure époque romaine (fol. 4 r.).
Un aigle héraldique, d’un beau caractère. Le tracé en est indiqué par une étoile à cinq rais, dont une pointe aboutit à la tête de l’oiseau, deux, au deux extrémités de son envergure, deux dans les pattes qui sont étendues comme les ailes, suivant l’usage (fol. 18 v.).
Trois poissons assemblés sur une seule tête comme trois pétales autour d’un bouton. Le style est celui de ces lettres ornées de l’écriture lombarde qu’on appelle ichthyomorphes.