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Nouvelles diverses/23 août 1896

La bibliothèque libre.
Bn, C. L.,
Heugel (no 34p. 269-271).

NOUVELLES DIVERSES


ÉTRANGER

De notre correspondant de Belgique (20 août). — On a rarement fait autant de musique — et de bonne musique, — pendant l’été, dans nos deux grandes « cités balnéaires », Ostende et Blankenberghe, que cette année. Musique de concert, exclusivement, les théâtres, peu importants, y étant voués exclusivement au vaudeville et à l’opérette. Après les grandes solennités que je vous ai signalées précédemment, le Kursaal d’Ostende en a eu d’autres encore, non moins attractives, en ce mois d’août qui est l’époque privilégiée des fêtes select ; plusieurs artistes de premier ordre y ont défilé devant le public, justement enthousiaste ; et, parmi eux, M. Van Dyck et Mlle Gabrielle Lejeune, ont été les plus acclamés, comme je le prévoyais l’autre jour. M. Van Dyck à Ostende, c’était tout un événement ! L’admirable ténor a chanté l’air de Joseph de Méhul, le « preislied » des Maîtres Chanteurs et le chant d’amour de Siegmund, de la Valkyrie ; les ovations qu’on lui a faites ont été, à peu de chose près, interminables, après l’air de Joseph, on l’a rappelé six fois, et le reste à l’avenant ; à la fin ne sachant comment satisfaire l’enthousiasme de l’auditoire, il a eu une idée géniale : il a redit en allemand le chant de Siegmund qu’il avait dit la première fois en français : alors, ç’a été du délire ! On en parlera longtemps sur la plage. L’accueil fait, la semaine suivante, à Mlle Lejeune n’a pas été moins chaleureux. Comme M. Van Dyck, Mlle Gabrielle Lejeune est Belge ; mais si le patriotisme a été pour quelque chose dans le succès fait aux deux artistes par le public cosmopolite d’Ostende, il n’y a eu qu’une part minime, le mérite a fait le principal. Mlle Lejeune a chanté deux fois, et deux fois elle a triomphé par le charme de sa personne et de son talent. Depuis son départ de la Monnaie, où elle a passé deux ans, elle n’avait plus guère paru en public : à la veille de débuter à l’Opéra-Comique, cette réapparition avait un intérêt particulier. Nous l’avons retrouvée avec sa voix pénétrante, son sentiment si personnel, ses qualités faites tout ensemble de grâce et d’émotion, qui en avaient fait à la Monnaie une des plus captivantes interprètes du rôle de Charlotte de Werther, et qu’elle a appliquées ici dans l’interprétation de deux airs de caractère pourtant bien différent, celui de la Traviata et celui du Freischütz. Son succès n’a pas été moins vif dans diverses mélodies, détaillées par elle d’une façon exquise : le Nil et Floraison de Leroux, Pensée d’automne et la gavotte de Manon de Massenet, Dansez marquise de Lemaire, et la Sérénade inutile de Brahms ; bis et rappels semblaient ne point vouloir prendre fin. Voilà qui est de bon augure pour l’entrée prochaine de Mlle Gabrielle Lejeune à l’Opéra-Comique.

— À Spa, également, la musique bat son plein et, parmi les derniers concerts au Kursaal, il faut signaler tout particulièrement celui de M. Isnardon, qui a été couvert d’applaudissements après le Poète et le Fantôme, de Massenet, les stances de Lakmé, et le trio de Faust chanté avec Mlle Adams et M. Affre. Quelques jours après M. Isnardon triomphait encore, dans la salle du Pouhon où est installée l’Exposition de Poupées. Dans un programme très spécialement et curieusement composé, l’excellent artiste a chanté les Sabots et les Toupies, les Polichinelles et le Dernier Joujou, de Cl. Blanc et L. Dauphin. À côté de lui, on a fêté aussi Mlle de Ter dans les Enfants de Massenet.

— Un opéra inédit en un acte Razzia, musique de M. Van Damme, a été joué avec succès à Gand.

— Une erreur d’impression nous a fait dire, dans notre dernier numéro, que Mlle Sibyl Sanderson avait signé un engagement avec l’Opéra Impérial de Vienne. C’est l’Opéra Impérial de Saint-Pétersbourg qu’il faut lire, et ce sont les Russes qui auront la primeur d’Esclarmonde, avec la créatrice dans le rôle de la protagoniste. M. Van Dyck a été également engagé pour une série de représentation, au cours desquelles il chantera, entre autres ouvrages, Manon et Werther.

— La saison du Théâtre-Lyrique à Milan ouvrira vers le milieu de septembre avec les représentations de Mme Nevada dans Lakmé ; puis viendront celles de Mme de Nuovina avec la Navarraise et celles de Mlle Simonnet dans Mignon. Plus tard Mlle Sanderson dans Manon et Phryné. On voit que, comme toujours, M. Sonzogno fait large part au répertoire français. On devrait bien lui rendre un peu la pareille à Paris pour ses opéras italiens. Mais il paraît que c’est impossible ! Tout prendre et ne rien donner, c’est une devise commode, mais pas très morale en soi.

— Un nouvel opéra intitulé Marietta, musique de M. G. Buceri a subi un échec à sa première représentation au théâtre Bellini, de Palerme.

— On annonce que la Bohême de Leoncavallo sera joué pour la première fois à la Scala de Milan qui jouera aussi le nouvel opéra japonais de Mascagni. L’Argentina de Rome jouera pour la première fois, Camargo de M. de Leve et le théâtre San-Carlo de Naples produira pour la première fois Pourceaugnac de M. Franchetti.

— Le ministre de l’instruction publique à Berlin a ordonné la construction d’un nouveau monument pour le Conservatoire de musique et a ouvert à cet effet un concours. Nous connaissons plus d’un conservatoire de musique, à commencer par celui de Paris, qui aurait grandement besoin d’un nouvel abri.

M. Goldmark, l’heureux auteur du Grillon du foyer, a commencé la composition d’un nouvel opéra dont M. Willner, le librettiste de l’œuvre nommée, lui a fourni les paroles.

M. Ignace Brüll a terminé la partition de son nouvel opéra Gloria. Cette œuvre, dont on nous dit beaucoup de bien, sera jouée au commencement de la prochaine saison à l’Opéra de Hambourg.

— On vient de terminer à Dresde une grande salle de concert qui manquait depuis longtemps à cette capitale. La nouvelle salle dont l’acoustique est excellente, contient 1.400 places et sera pourvue d’un orgue. Dès à présent plus de cent concerts y sont déjà annoncés pour la saison prochaine.

— À l’Exposition des Arts industriels de Dresde, les Wendes, un peuple de race slave qui était autrefois fort nombreux dans une partie du royaume actuel de Saxe et qui habitent encore en nombre de plus en plus restreint la province saxonne de Lusace, attirent l’attention non seulement des ethnographes, mais aussi des musiciens. Comme tous les peuples de race slave, les Wendes ont un talent inné pour la musique, et un concert qu’ils viennent de donner, a de nouveau affirmé leurs aptitudes pour la musique. On y a d’abord chanté, avec paroles slaves, de ravissantes mélodies populaires, tristes pour la plupart et dans le genre des dumkas russes, mais aussi quelques chansons gaies que la jeunesse accompagne de danses. Deux de ces chansons à danser : Stup dalej (Approche-toi) et Hanka ty sy moja (Sois à moi, Annette), chantées à capella avec une précision extraordinaire ont ravi le public qui ne comprenait naturellement pas le premier mot du texte. Puis les compositeurs nationaux ont produit leurs œuvres : K.-A. Kocor, Frejschlak et Krawec, un jeune compositeur qui fit en même temps fonction de chef d’orchestre et dont la symphonie nationale Aux bords de la Lubosta a eu beaucoup de succès. Les Wendes donneront peut-être un jour quelque œuvre musicale d’intérêt général comme les Tchèques qui ont trouvé en Smetana et Dvorak des compositeurs connus bien au delà des frontières de leur patrie.

— À l’occasion du dixième anniversaire de la mort de Franz Liszt le Journal de Weimar propose l’érection d’une statue du maître à Weimar, où se trouve déjà un musée destiné à perpétuer son souvenir. Les innombrables élèves de Liszt qui lui doivent tant et dont plusieurs, comme Mme Sophie Menter, la châtelaine d’Itter, ont fait de grandes fortunes, ne devraient-ils pas à eux seuls, s’acquitter de cette dette de reconnaissance ? Contre le choix de Weimar les Hongrois réclameront peut-être, bien qu’ils aient déjà une statue de Liszt, placée devant l’Opéra royal de Budapesth ; mais l’Allemagne a certes des droits incontestables sur l’œuvre du maître. Ce qui est le plus étonnant c’est que ni Richard Wagner ni Franz Liszt ne possèdent encore de monument en Allemagne. On se moque souvent des Français qui ont, dit-on, le marbre et le bronze facile ; après tout, il vaut mieux qu’un seigneur de moindre importance dans le royaume des arts et des lettres obtienne sa petite statue ou son buste que de ne pas payer ce tribut à un maître véritable.

Bn.

— La ville de Leipzig va célébrer le centième anniversaire de son théâtre municipal. Jusqu’en 1725, la Compagnie du théâtre royal de Dresde avait possédé le privilège de jouer aussi à Leipzig. Ce n’est qu’en 1796 que la ville obtint le droit, moyennant une redevance annuelle de cinq cents thalers, d’avoir un théâtre à elle. Le théâtre actuel, un des plus beaux d’Allemagne, n’est pas le même que celui qui existait en 1796.

— La société allemande d’acteurs et autres travailleurs de théâtre qui a été fondée à Weimar en 1871, va célébrer le vingt-cinquième anniversaire de son existence.

— À l’Opéra impérial de Vienne, qui a rouvert le 15 de ce mois, Mlle Emma Teleky, du Théâtre-Royal de Dresde, vient d’être engagée. La jeune artiste, élève, à Vienne, du baron Victor Rokitansky, dont nous avons annoncé dernièrement le décès, a fait déjà une carrière assez brillante. On pourra donc reprendre, à Vienne, Hamlet qui manquait d’une Ophélie convenable et maint autre opéra nécessitant la présence d’une chanteuse légère di primo cartello.

— Le Carlthéâtre de Vienne prépare un nouvel opéra-comique les Sorciers de Nil, musique de M. Victor Herberth.

— On vient de trouver chez Mme Mayerhofer, à Vienne, trois lieder inconnus de Franz Schubert. Nous ne sommes pas encore renseignés sur la valeur artistique de cette trouvaille, mais nous nous rappelons que Mayerhofer, poète viennois insignifiant, a été lié avec Schubert qui a mis en musique plusieurs poésies médiocres de son ami. La propriétaire actuelle des autographes de Schubert est une petite-fille du poète. Il ne faut nullement s’étonner de ce qu’on trouve encore des œuvres inconnues de Schubert, car sa fécondité n’a été égalée que par sa facilité.

— L’Opéra royal de Budapest était menacé, il y a quelques jours, d’une grève des membres de l’orchestre. On leur avait promis, pour la durée de l’exposition, une augmentation d’appointements de 20 %, mais on ne leur avait donné qu’un supplément de 10 %, sous prétexte que le théâtre faisait de mauvaises affaires. Les membres de l’orchestre ont alors adressé une requête au surintendant général, M. le baron Nopcsa, pour réclamer leur dû et pour annoncer leur retraite au cas où l’Opéra ne tiendrait pas ses promesses. Grâce à l’intervention du surintendant général, l’orchestre obtient satisfaction et la grève n’eut pas lieu.

— On a inauguré à Budapest un nouveau théâtre exclusivement destiné à la comédie jouée en langue hongroise. La nouvelle salle, qui est fort jolie, contient 1850 places, dont 600 à l’orchestre et 46 loges.

— Le théâtre municipal de Cracovie vient de jouer avec succès un opéra inédit Goplana, paroles de M. German, musique de M. Stanislas Zelenski.

— Le classique veilleur de nuit est mort un peu partout, sauf cependant en Espagne, où le brave sereno se promène encore nuitamment dans les rues et ouvre les portes aux retardataires qui ont oublié la clé de leur maison. Nous ne connaissons plus que par l’opéra ce fonctionnaire dont l’importance fut grande dans le temps. Le couvre-feu dans les Huguenots et la fameuse algarade des voisins de Hans Sachs dans les Maîtres chanteurs, où l’apparition du veilleur de nuit produit un effet vraiment poétique, nous conservent encore ce type de fonctionnarisme. En Allemagne et en Autriche, les veilleurs de nuit qui se promenaient, jusqu’en 1848, armés d’une hallebarde, d’un cor et d’une lanterne, avaient l’habitude de chanter après chaque heure, une petite chanson dont le texte et la mélodie, très différents selon la localité, étaient souvent de leur propre invention. Ces chansons avaient quelquefois une certaine valeur poétique et les amateurs de la poésie populaire ont vivement regretté leur disparition. Or, M. Joseph Wichner, à Krems-sur-le-Danube, entreprend une collection des anciennes chansons et mélodies des veilleurs de nuit en Autriche et en Allemagne et espère pouvoir publier bientôt les résultats de ses recherches. Cette publication ne manquera certes pas d’intérêt.

— L’acte constituant le comte de Grey, M. H.-V. Higgins et M. Maurice Grau, le directeur américain bien connu, propriétaires et administrateurs du Royal Italian Opera de Covent-Garden, à Londres, vient d’être enregistré. Le capital est de 377.000 francs, divisé en 150 actions ordinaires de 2.500 francs et 100 actions de 25 francs chacune.

— Le Royal College of Music de Manchester a remplacé sir Charles Hallé, premier professeur de piano, par M. William Dayas, compositeur et pianiste.

— Au Novelty Théâtre de Londres, il vient de se passer un drame aussi terrible qu’inexplicable. Dans un mélodrame, les Péchés de la nuit, un acteur, M. Temple E. Crozier, qui devait être tué à la fin par son collègue M. Wilfred M. Francks, a reçu un véritable coup de poignard en pleine poitrine et a succombé sur la scène après avoir proféré un cri que le public a vigoureusement applaudi à cause de son effet naturaliste. La victime, âgé de 24 ans seulement, vivait en parfaite intelligence avec son malheureux collègue dont il était le meilleur ami et ils n’avaient jamais eu la moindre dispute. Les acteurs qui se trouvaient sur la scène, ne remarquèrent pas tout d’abord que Crozier était mortellement frapé. Comme il ne se relevait pas, le régisseur s’approcha de lui et remarqua que le sang couvrait une partie de son costume. Tous les efforts pour rappeler à la vie le malheureux jeune homme furent inutiles. Le jury qui devait se prononcer, selon la loi anglaise, sur les causes de la mort, n’a pas pu démêler comment le coup fatal s’est produit ; mais il fut constaté que même à la répétition générale M. Franks n’avait pas eu entre les mains le poignard et avait seulement indiqué le coup. M. Franks a été traduit devant un jury, et il a été décidé qu’il ne serait pas poursuivi. Cet accident terrible prouve une fois de plus qu’au théâtre il ne faut pas pousser trop loin le « vérisme », comme disent les Italiens, et qu’on ne peut jamais trop soigner les « accessoires » aux répétitions.

— Sir William Robinson, le compositeur de l’opéra, la Fille du brigand, vient de terminer un nouvel opéra la Fille brune, paroles de M. Newton. Cette œuvre sera représentée à Londres, au commencement de la saison prochaine.

— La bicyclette, qu’on met maintenant à toute sauce est sérieusement recommandée en Angleterre aux jeunes élèves du chant. Un professeur de chant assez connu à Londres, vient de faire une conférence à Saint-James Hall pour exposer ses idées sur l’influence de la bicyclette sur la voix et a présenté à la nombreuse assistance plusieurs de ses meilleures élèves auxquelles la bicyclette avait énormément profité. Une d’elles avait considérablement augmenté l’étendue de sa voix par l’usage de la pédale et une autre, qui avait dû abandonner cette machine à la mode, avait tellement vu s’augmenter la capacité de ses poumons en prenant des leçons de chant qu’elle pouvait actuellement faire des courses considérables à bicyclette et même gravir des pentes assez dures. Nous avouons que cette conférence nous semble être une réclame bien sentie pour les fabricants de bicyclette et pour les faiseuses de chanteurs ou de chanteuses.

— Le « Cercle artistique musical » de Barcelone a organisé un concours pour la composition d’une cantate pour quatre soli, chœur et orchestre (prix : 500 francs), d’une suite d’orchestre en quatre mouvements (prix : 400 francs), d’une messe en l’honneur de sainte Cécile (prix : 300 francs) et de six mélodies pour chant et accompagnement de piano (prix : 200 fr.) Le concours est international et les paroles peuvent être écrites dans n’importe quelle langue latine. Les compositions doivent arriver à Barcelone avant le 15 octobre de cette année.

— La jeune reine des Pays-Bas dont le mariage occupe actuellement les chancelleries européennes, même dans les pays qui n’ont pas de prince-époux à proposer, vient de terminer son éducation musicale. Inutile de dire qu’elle a décoré, à cette occasion, son professeur de piano, M. Stortenbeker. Espérons que la jeune reine imitera l’exemple de la reine Victoria qui, étant déjà mariée et mère de famille, n’a pas abandonné ses chères études musicales et prit même des leçons chez Mendelssohn.

Mlle Nikita vient de donner à Copenhague un grand concert et le public l’a acclamée après la gavotte de Manon. À l’orchestre, on a trissé le prélude du 3e acte d’Hérodiade.

— Au théâtre de Helsingfors (Finlande), le jeune chef d’orchstre, M. Ferdinan Neisser, a produit avec beaucoup de succès une ouverture inédite à laquelle il a donné le nom indien Urvassi.

PARIS ET DÉPARTEMENTS

— À l’Opéra, on annonce, pour le 2 septembre, la rentrée de M. Renaud qui se fera par le rôle d’Hamlet qu’il interprète de si artistique manière, et pour le 7 du même mois, si toutefois Mme Rose Caron est de retour de congé, la reprise d’Hellé de M. Alphonse Duvernoy, qui servira également de rentrée à MM. Alvarez et Delmas, dont les vacances prennent fin le 1er septembre.

M. Massenet parcourt à présent les montagnes d’Auvergne, toujours fort occupé, chemin faisant, de sa nouvelle partition Sapho qui lui tient au cœur et « le tenaille », comme il dit : « On ne la quitte pas facilement, écrit quelque part Alphonse Daudet. Elle s’attache à vous et l’on souffre pour elle. »

M. Ch.-M. Widor a quitté Paris la semaine dernière se rendant à l’Arbresle, près de Lyon, où, durant les vacances, il va mettre la dernière main aux Pêcheurs de Saint-Jean, 3 actes, sur le livret de M. Henri Cain, que l’Opéra-Comique doit monter. {{M.|Widor ne rentrera à Paris que dans les premier jours d’octobre pour reprendre sa classe du Conservatoire.

— Dans les Deux Palémon, la comédie antique en 1 acte et en prose de M. Jules Truffier, que répète en ce moment la Comédie-Française, il y aura une petite partie musicale écrite par M. Charles Molé. M. Charles Molé, ancien chef de musique de la Garde impériale, est le père de Mme Molé, de l’Opéra-Comique, et, par conséquent, le beau-père de M. Truffier.

— À son passage à Rennes, le Président de la République a nommé MM. Jouannin et Henry, professeurs au Conservatoire, le premier officier d’académie, le second officier de l’instruction publique.

— D’Aix-les-Bains : au Grand Casino, les représentations de Mme de Nuovina dans Faust, Carmen et la Navarraise, ont été triomphales. Son succès personnel a été considérable. MM. Bouvet, Maréchal, Hermann-Devriès, Grivot et Mmes Eva Miquel, Eyrams ont partagé les honneurs de ces belles soirées.

— À Royan a eu lieu, la semaine dernière, la première représentation de Phryné, ballet-pantomime en 3 tableaux, de M. Auguste Germain, musique de M. Louis Ganne, qui a complètement réussi. Parmi les interprètes, il faut signaler Mlles de Mérode et Sandrini, de l’Opéra, et Mlle Médal, du Gymnase.

— Ce n’est pas qu’au Casino-Club, de Cauterets, que le maestro Danbé et son orchestre triomphent. La semaine dernière, ils ont pris possession de l’église, à l’occasion d’une œuvre de bienfaisance. On n’a pas applaudi, mais peu s’en est fallu. MM. Mondaud et Mlle Sirbain prêtaient leur gracieux concours. Recette superbe. Nul doute que le curé de Cauterets ne redemande encore à M. Danbé, l’appui de sa baguette magique.

— La maîtrise si réputée de Notre-Dame de Versailles a chanté, pour l’Assomption, la Messe Pontificale de Théodore Dubois. Le maître de chapelle, M. A. Fauchet, avait confié la baguette de direction à son fils, un gamin âgé d’à peine quinze ans, qui a mené l’œuvre entière avec une sûreté, une autorité absolument surprenantes. Le jeune Paul Fauchet élève, pour l’orgue, de M. L. Vierne, est, au Consrvatoire dans la classe d’harmonie de M. Taudou.

— Très brillantes les fêtes musicales qui ont eu lieu dimanche et lundi à Moulins, grâce surtout à l’heureuse innovation des concours entre symphonies, quatuors à cordes et soli, lesquels ont été présidés par le violoniste compositeur Emile Levêque. Les Sociétés philharmoniques de Bourges et de Nevers ont tour à tour exécuté la Marche aux flambeaux (Meyerbeer), l’Ouverture de Ruy Blas (Mendelssohn), la Marche tzigane (Reyer), des fragments de la Symphonie en ut majeur (Beethoven) et la Réformation Mendelssohn) et ont obtenu le plus vif succès. Les quatuors à cordes orléanais et tourangeaux, dans l’interprétation du 4e quatuor de Beethoven et de l’op. 27 de Grieg, n’ont pas été moins bien accueillis. Le violoniste Magnus, d’Orléans, et M. Thomas Basile, violoncelliste à Tours, se sont fait vivement applaudir dans leur déchiffrage (assez difficile mais fort intéressant) écrit pour la circonstance par M. Levêque. La salle du théâtre extracomble, pendant ces fêtes, a dû refuser l’entrée à plus de deux mille personnes. Nombre d’harmonies, d’orphéons et de fanfares, se sont particulièrement distingués dans d’autres locaux. Il n’y a que des éloges à adresser aux organisateurs du concours musical de Moulins et particulièrement au président, M. Lavergne, et à M. Henry Loulier, le novateur des concours d’instruments à cordes.

C. L.

— Le dimanche 9 août a eu lieu, à l’église Saint-Valéry-en-Caux, une cérémonie au cours de laquelle a été chanté avec grand style le Panis angelicus de César Franck par Mlle Jeanne Teyssèdre, élève de M. Masson. L’orgue était tenu par M. L. Vierne.

NÉCROLOGIE

Cette semaine est mort, à l’âge de 72 ans, notre confrère Anatole Cerfbeer qui publia, en collaboration avec J. Christophe, le Répertoire de la Comédie humaine, et dirigea, de 1861 à 1865, le journal hebdomadaire le Théâtre. Anatole Cerfbeer s’était fait, en ses derniers temps, une spécialité avec de petites notes documentaires sur le théâtre, d’un tour très particulier, qu’il donnait à ses différents journaux.

— La semaine dernière, est morte Mme Wallet, la costumière en chef de l’Opéra-Comique, où elle avait été successivement employée sous les directions Crosnier, Perrin, Roqueplan, Beaumont, Ritt et enfin Carvalho.

— À Boston vient de mourir le fameux directeur de théâtre John B. Stettson, un homme fort original, qui n’avait pas la moindre éducation, mais qui sut néanmoins si bien conduire sa barque, qu’il laisse une fortune assez rondelette. Les artistes américains racontent les histoires les plus abracadabrantes sur ce « patron » incomparable, dont la plupart sont inventées ; mais il y en a aussi beaucoup d’authentiques dans le tas. Une fois il fit mettre en scène une imitation de la célèbre Passion que les paysans jouent à Ober-Ammergau, en Bavière, tous les dix ans, et voulut faire grandement les choses. Son régisseur lui présenta un jour, avant une répétition et devant tous les artistes du théâtre, une douzaine de beaux vieillards qui devaient figurer les apôtres. « Comment, vous n’avez que douze apôtres comme les paysans en Bavière ? apostropha le « patron », fi donc ! Nous, à Boston, nous aurons cinquante apôtres ! »


Henri Heugel, directeur-gérant.