Octobre en fleur/3/003

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Maison d’éditions et d’impressions Anct AD. Hoste, S. A. (p. 113-114).

III.

JOUR DE NOVEMBRE.


C’était un jour gris de Novembre,
T’en souvient-il ?
Dans l’atmosphère de la chambre
Planait comme un émoi d’Avril.
Mes cheveux effleuraient ta joue,
Tu lisais des vers de Ronsard :

— « Quand vous serez bien vieille… » et, tel l’enfant qui joue,

Tu prenais mon cœur, par hasard.
J’étais heureuse, je l’avoue,
Le désespoir viendrait plus tard.
Je vivais, jouissant de l’heure,
N’osant presque pas respirer,
De peur que mon souffle n’effleure

Ce bonheur frais et frêle et peu fait pour durer.

Oh ! ce dimanche de Novembre !

Tout-à-coup,

Te levant pour montrer un tableau, dans la chambre,

Tu m’as baisée au cou.


Je ne t’ai donné que mon rêve,
Je ne t’ai pas donné mon corps.
Et je ne sais pourquoi se lève
Ce souvenir d’entre les morts.

Tu ne m’as donné que ton rêve,
Nous avons dédaigné la chair.
Et je ne sais pourquoi je rêve
À ce baiser qui me fut cher.