Odes (Horace, Séguier)/II/7 - À Pompéius Varus

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Odes et Épodes et Chants séculaires
Traduction par M. le Comte de Séguier.
A. Quantin (p. 63-64).


VII

À POMPÉIUS VARUS


Du temps de Brutus, ô toi qui, dans le rang,
Souvent comme moi crus ton heure accomplie,
         Quel miracle en Quirite te rend
   Aux dieux romains, au ciel d’Italie,

Varus, le premier compagnon de mes jeux,
Avec qui j’aimai tant de fois à m’ébattre,
      Coupe en main, des fleurs dans nos cheveux
   Tout reluisants de syrien malobathre ?

Phllippe aux fuyards nous vit mêlés tous deux,
Ma parmule, hélas ! restant dans la carrière,
      Quand périt la vertu, quand nos preux
   Eurent mordu la honteuse poussière.

Mais le prompt Mercure, au sein des bataillons,
M’enleva, tremblant, parmi d’épais nuages :
      Toi, la mer, rouverte à tes sillons,
   Te ramena vers de nouveaux carnages.

Donc à Jupiter offre les mets prescrits
Et, sous mon laurier retraitant ta vaillance

      Lasse enfin des combats entrepris,
   N’épargne pas ces vins de circonstance.

Remplis vivement d’un massique oublieux
Ton ciboire entier ; des profonds coquillages
      Verse à flots les onguents précieux.
   Garçons, qui court nous tresser les feuillages

De l’ache ou du myrte ? A qui, de par Vénus,
Le sceptre du boire ? Oh ! moi, tout comme un Thrace
      Je prétends me livrer à Bacchus
   Retour d’ami fait délirer Horace.