Ouverture du parlement anglais — Discours du trône

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OUVERTURE DU PARLEMENT ANGLAIS.
(3 novembre.)
DISCOURS DU TRÔNE.


Milords et Messieurs,

J’éprouve une vive satisfaction de vous voir ici réunis en parlement, et de pouvoir recourir à vos conseils dans la conjoncture présente.

Depuis la dissolution du dernier, il est arrivé sur le continent européen des événemens de haute importance et de grand intérêt.

La branche aînée de la maison de Bourbon a cessé de régner en France, et le duc d’Orléans a été appelé au trône avec le titre de roi des Français. Ayant reçu du nouveau souverain la déclaration du désir qu’il avait d’entretenir la bonne intelligence, et de respecter les engagemens existans entre les deux nations, je n’ai point hésité à continuer mes relations diplomatiques avec la cour de France, et l’harmonie qui régnait dans les rapports mutuels n’a point été interrompue.

J’ai vu avec un profond regret l’état des affaires dans les Pays-Bas. Je m’afflige de ce que l’administration éclairée du roi n’a pu préserver ses états de la révolte, et de ce que la sage et prudente mesure qui avait été adoptée de soumettre à une assemblée extraordinaire des états-généraux les plaintes et les vœux du peuple, n’a pas amené de résultat satisfaisant. Dans le but de rétablir la tranquillité, je m’efforce, de concert avec nos alliés, de trouver des moyens qui garantissent à la fois aux Belges un bon gouvernement, et aux autres états une continuation de sécurité.

Des apparences de tumulte et de désordres en diverses parties de l’Europe ont fait naître des inquiétudes ; mais les assurances de dispositions amicales que je continue à recevoir des puissances étrangères, me confirment dans l’espoir que je pourrai conserver à mon peuple les bienfaits de la paix. Convaincu de tout temps de la nécessité de respecter la foi des engagemens nationaux, j’ai pensé qu’en me déterminant à maintenir, de concert avec mes alliés, les traités généraux sur lesquels se fonde le système politique de l’Europe, je travaillerais le plus efficacement possible à assurer la tranquillité du monde.

Je n’ai pas encore accrédité mon ambassadeur près de la cour de Lisbonne ; mais le gouvernement portugais est résolu à faire un grand acte de justice et d’humanité en accordant une amnistie générale. Je pense que le moment ne tardera pas où l’intérêt de mes sujets exigera le renouvellement des relations qui ont si long-temps existé entre les deux pays.

La vive sollicitude que je ressens pour le bonheur de mon peuple m’oblige à recommander d’une manière très-pressante à votre attention les mesures qu’il conviendrait de prendre pour l’exercice de l’autorité royale, dans le cas où il plairait à Dieu de terminer ma vie avant que mon successeur eût atteint l’âge de maturité.

Je serai tout prêt à concourir avec vous à l’adoption des mesures qui sembleront les plus propres à maintenir la dignité et la stabilité de la couronne, et à affermir de la sorte pour mon peuple les garanties des libertés civiles et religieuses.

Messieurs de la Chambre des Communes,

J’ai ordonné qu’on plaçât sous vos yeux l’estimation des sommes pour la partie des dépenses publiques à laquelle n’avait pas pourvu le dernier parlement. L’estimation pour l’année prochaine sera faite conformément aux plus strictes règles d’économie, et la même économie sera observée dans toutes les branches des dépenses publiques : j’y suis fermement résolu.

Par le fait du décès de mon bien-aimé frère le feu roi, le revenu de la liste civile a cessé.

Je remets sans réserve entre vos mains mes intérêts, tant en ce qui touche aux revenus héréditaires qu’à ceux provenant des droits de la couronne ou de l’amirauté, des redevances des Indes occidentales, et tout autre revenu casuel, soit dans mes possessions étrangères, soit dans le royaume uni.

En remettant ainsi à votre disposition la fixation de revenus qui précédemment étaient réservés aux droits de la couronne, lorsqu’en formant la liste civile je me trouve heureux de pouvoir vous donner une preuve de l’extrême confiance que j’ai, d’une part, en votre attachement respectueux à ma personne, et de l’autre en votre empressement à voter tous les fonds nécessaires pour le soutien de l’administration civile, de l’honneur et de la dignité de ma couronne.


Milords et Messieurs,

Je vois avec une peine extrême que dans quelques cantons les propriétés de mes sujets ont été mises en danger par suite de coalitions pour la destruction des machines, et que des incendies dus à la malveillance ont été la cause de pertes considérables.

Je ne puis voir sans douleur et sans indignation les efforts qu’on fait malicieusement pour exciter dans le peuple un esprit de mécontentement et de désaffection, et pour troubler la concorde heureusement existante entre ces parties de mes domaines qui trouvent dans leur union la force et la félicité. Je suis déterminé à faire tous mes efforts, à user dans toute leur extension des moyens que la constitution et les lois mettent à ma disposition, pour punir la sédition et réprimer promptement les désordres. Au milieu de toutes les difficultés des conjonctures présentes, je me reporte avec la plus haute satisfaction vers l’idée de l’attachement loyal et affectueux qu’a pour ma personne la grande masse de la nation. Je sais qu’elle apprécie convenablement tous les avantages d’une forme de gouvernement, qui, avec la faveur divine, a fait jouir pendant une longue suite d’années ce pays d’une somme de paix intérieure, de prospérité commerciale et de vraie liberté, plus grande que celle qui est échue en partage à aucun autre peuple au monde. Ce sera la grande affaire de ma vie que de conserver pour mon peuple des biens si précieux, et de les transmettre intacts aux générations prochaines. En remplissant ce devoir sacré, je suis soutenu par la confiance que j’ai en la sagesse du parlement, et en la coopération cordiale de mes loyaux et fidèles sujets.