blancs d’un tombeau de saint homme, d’une maison écroulée. On se croirait dans la planète Mars : ce sont les limites marines du désert.
Les poissons volants filent sous l’étrave comme des grenouilles. À l’approche de certaines côtes volent dans la mâture des oiseaux singuliers.
Les péninsules s’étalent sur l’eau comme des mains et on voit dans le lointain les hautes épines dorsales de ces morts. La mer est bombée comme une tortue, ses volutes se défont et respirent avec un bruit de vapeur. La mer a des mouvements d’animaux en gelée, elle gonfle, étire, rétracte, souffle un protoplasme vitrifié. Elle ne ressemble pas à une femme capricieuse, mais à la plus primitive des bêtes.
Des palmiers bas sur pattes comme des bassets, des grues métalliques, des toits rouges apparaissent un matin. Cette apparition est l’escale de Port Soudan. Le long des quais des bandes de requins se retournent maladroitement sur le dos et quêtent de la nourriture comme des ours, éblouis le soir par le feu du projecteur ils dansent des ballets de guêpes : ils ressemblent à tous les autres animaux.
Les employés des douanes britanniques montent la garde entre les parois de longs couloirs bordés de caisses d’essence, à l’orée desquels on aperçoit des rideaux de paille blanche et rouge, un ciel noir habité par des nébuleuses torrides, des vautours et des lampes à arc.
On essaie de descendre à terre : les forçats avec leurs gros boulets empierrent les rues, arrosent des arbres de cinquante centimètres. Des Soudanais vendent des porte-cigarettes en ivoire, des colliers pour les femmes, des fouets de cuir. Quand on a bu les coudes sur des tables de tôle, on rentre pour ne plus voir les fonctionnaires jouer au bridge sous les vérandas de leurs maisons des femmes à côté d’eux. Alors il est