Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/316

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ses principaux officiers furent inhumainement massacrés. Leurs corps mutilés furent traînés à travers les rues. L’empereur, qui résidait alors à Milan, apprit avec étonnement l’insolence et la cruauté effrénée du peuple de Thessalonique. Le juge le plus modéré aurait puni sévèrement les auteurs de ce crime, et le mérite de Botheric pouvait contribuer à augmenter l’indignation de Théodose. Le monarque fougueux, trouvant les formalités de la justice trop lentes au gré de son impatience, résolut de venger la mort de son lieutenant par le massacre d’un peuple coupable. Cependant son âme flottait encore entre la clémence et la vengeance. Le zèle des évêques lui avait presque arraché malgré lui la promesse d’un pardon général ; mais Ruffin, son ministre, armé des artifices de la flatterie, parvint à ranimer sa colère ; et l’empereur, après avoir expédié le fatal message, essaya, mais trop tard, de prévenir l’exécution de ses ordres. On confia avec une funeste imprudence le châtiment d’une ville romaine à la fureur aveugle des Barbares, et l’exécution fut tramée avec tous les artifices perfides d’une conjuration. On se servit du nom du souverain pour inviter les habitans de Thessalonique aux jeux du cirque ; et telle était leur avidité pour ces amusemens, qu’ils oublièrent, pour y courir en foule, tout sujet de crainte et de soupçon. Dès que l’assemblée fut complète, au lieu du signal des jeux, celui d’un massacre général fut donné aux soldats qui environnaient secrètement le cirque. Le carnage continua