Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/144

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les affaires… C’est avec elle seulement et son entourage qu’il se sent en sûreté. »

Aussi Mme  de Pompadour fut-elle amenée par le seul fait que le roi dès l’abord la prit comme confidente de ses soucis politiques, à s’occuper des affaires de l’État.

L’évolution qu’elle subit à ce point de vue est assez curieuse. Elle se contenta d’abord de profiter de sa situation pour faire obtenir à son entourage de financiers de fructueuses affaires et s’enrichir elle-même. Elle apparaît à la Cour comme la représentante des fermiers généraux, des financiers, les Paris-Duverney et Montmartel, les Bouret et, si elle n’introduisit pas, comme le veut Sénac de Meilhan[1], la mode chez les femmes de la Cour de s’intéresser aux affaires financières (maints exemples nous montrent que cette mode existait bien avant elle), contribua cependant à la répandre et à la développer.

À partir de 1747, elle intervient plus directement dans les affaires. Lorsque Machault d’Arnouville devient contrôleur général, on attribue avec quelque raison cette nomination à l’influence de la marquise. Dès ce moment, elle a pris dans les affaires financières une grande influence, non sans résistance de la part du roi, il est vrai.

Peu à peu, cette influence s’accroît et, dès 1748, elle s’est arrangée pour écarter du souverain toute autre influence que la sienne. « Du temps du cardinal, écrit à cette date d’Argenson, on pouvait encore faire passer quelques mémoires ou avis. Mais Mme  de Pompadour tient tous les valets, tant les grâces, l’argent des Paris, l’obsession étaient terribles[2]. »

Cette influence grandit encore lorsqu’elle a réussi à faire renvoyer Maurepas et, à partir de ce moment, les contemporains voient en elle un véritable ministre.

« Elle est un vrai ministre en ce qui concerne l’intérieur, écrit Barbier en 1749. » « La favorite est un premier ministre », écrit à cette même date d’Argenson, et le mot revient vingt fois sous sa plume.

Jusqu’à quel point cette assertion est-elle justifiée ? Mme  de Pompadour fut-elle vraiment premier ministre et eut-elle en effet une politique personnelle ?

Sans refaire l’histoire de la marquise, qui a été faite mais d’un autre point de vue, essayons du moins d’élucider cette question.

  1. Portraits et caractères.
  2. D’Argenson. Mémoires.