Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/320

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service toute l’influence qu’elle possède sur son mari, est une des causes déterminantes du soulèvement de la Vendée.

Est-ce seulement par ces constatations, d’ailleurs indirectes il faut le reconnaître, qu’on peut, à défaut de manifestations ouvertes plus nombreuses, déterminer la persistance du sentiment religieux chez la femme française ?

vii. Les femmes et le jansénisme

Une autre preuve, et très forte celle-là, que les Françaises continuèrent, pour la plupart, non seulement de pratiquer machinalement les rites du catholicisme, mais de lui rester attachées au fond de leur cœur, c’est le rôle immense que les femmes ont joué dans le développement du jansénisme qui lui, minorité persécutée, a son histoire, alors que le catholicisme n’en a pas.

Deux faits d’une extrême importance semblent dominer l’histoire du jansénisme au xviiie siècle : le jansénisme est une doctrine dont les adeptes se recrutent en majorité dans la bourgeoisie et dans le peuple. Les femmes ont pris une part prépondérante dans toutes ses manifestations : n’y a-t-il pas entre ces deux faits une liaison évidente ? C’est surtout dans les classes de la société où les femmes n’ont pas perdu leur foi, où elles sont capables de se passionner pour les problèmes d’ordre religieux, que le jansénisme est florissant.

L’étude complète du rôle joué par les femmes dans le jansénisme serait l’histoire même de cette doctrine. Nous ne pouvons songer à la retracer ici. Il suffit de montrer par quelques traits caractéristiques la place qu’a tenue, dans les grandes luttes entre le jansénisme et l’orthodoxie, l’élément féminin.

Au cours des querelles qui avaient précédé la destruction de Port-Royal, les religieuses du célèbre couvent s’étaient montrées animées d’un zèle et d’une ardeur qui avait fait d’elles les âmes de la résistance.

Au début du règne de Louis XV, Port-Royal a disparu, les religieuses sont rentrées dans le siècle ou dispersées en d’autres couvents. Mais le jansénisme, malgré la disparition de son élite intellectuelle et morale, n’en demeure pas moins vivant et il continue de trouver dans les femmes, particulièrement dans celles de la bourgeoisie et du peuple, des adeptes passionnées.

S’il faut en croire Montesquieu, la bulle Ugénitus était, en 1718,