Page:Abensour - Les vaillantes, 1917.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Il était seul, traqué, la nuit, caché à l’abri d’un recoin, dans une ville du Nord que venait de submerger le flot de l’invasion. Au petit jour, il avise une femme. Il l’appelle, lui fait signe qu’il veut se couvrir de son long manteau. Elle le lui jette et l’attend quelques pas plus loin. Il la rejoint et la supplie de lui donner l’hospitalité pendant quelques heures, afin de prendre un peu de repos. Sans hésiter, elle accepte et le cache dans un grenier. De là, il entend des commères qui, en bas, tiennent conseil avec son hôtesse. Toutes la dissuadent de garder le soldat : les Allemands ont édicté la peine de mort contre quiconque cacherait des Français. Ils brûleront la maison. Elle ne va pas courir inutilement de tels risques ? Mais la femme ne veut rien entendre. Elle est Lorraine. Son mari est sous-officier. Peut-être, lui aussi, s’évade-t-il en ce moment ?

— Je serai peut-être fusillée. Mais je ne le livrerai pas.

La patrouille allemande surgit et perquisitionne. La femme tient tête aux soldats, leur offre ses clefs, leur verse à boire. Ils s’éloignent sans avoir découvert le réfugié dans son grenier.

Ses vicissitudes ne se bornent pas là. Vêtu en ouvrier, se cachant le jour, marchant la nuit, se nourrissant de betteraves arrachées à la terre, il s’achemine vers les lignes françaises. Souvent, dans les villages, on lui refuse l’hospitalité. La terrible menace a produit son effet : peine de mort contre qui abritera un soldat français. La porte qu’il heurte reste close ou s’entr’ouvre prudemment : « Non. Non. Plus loin. Là-bas, peut-être… » Et l’huis se referme. Et c’est encore une femme qui l’accueille ».

Combien de soldats ainsi rendus à la patrie !

La grande héroïne des premières batailles du Nord est Marcelle Semmer en qui se réunissent toutes les vaillances, le courage actif et la ténacité, l’abnégation de l’infirmière, le sang froid de l’agent de liaison, l’élan du soldat. C’est dans ces rôles, multiples en effet,