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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

complet entre l’Assemblée, où elle se voit répudiée par les deux partis, au nom de Cavaignac ou de Louis Bonaparte, et le peuple qui s’indigne de son obstination à repousser un candidat trois fois élu, comme d’une atteinte à sa souveraineté.

La séance du 13 devait être pire encore. On allait entendre les rapports des bureaux chargés d’examiner la validité de l’élection du prince Louis Bonaparte. Admettre ou rejeter cette validité, c’est dans la circonstance présente maintenir ou renverser la commission exécutive.

M. Jules Favre, rapporteur du septième bureau, a le premier la parole. Depuis le procès de 1840, où il a défendu le lieutenant Aladenise, M. Jules Favre est resté en relations avec le parti bonapartiste ; ses récentes mésintelligences avec M. Ledru-Rollin contribuent plus encore à le rendre favorable au prince Louis ; son rapport est un plaidoyer. « Le nouvel élu, dit-il, n’a justifié encore ici ni son âge ni sa nationalité, cela est vrai ; mais s’arrêter à de telles chicanes serait indigne d’une grande Assemblée. Le gouvernement, d’ailleurs, n’a pas jugé sans doute que Louis-Napoléon ne fût pas éligible, puisqu’il n’a averti, avant l’élection, ni les électeurs ni le citoyen Bonaparte. Loin de là, il a ici même, par la bouche de son ministre de la justice, déclaré que la loi de 1832 est virtuellement abolie par la révolution de Février. »

« En présence de l’anxiété publique, ajoute M. Jules Favre, il ne faut pas d’attermoiement. Il convient d’aborder franchement les deux questions, légale et politique, que soulève l’élection. » La question légale, selon lui, a été antérieurement tranchée par l’admission de trois membres de la famille Bonaparte. Quant à la question politique, la raison d’État ne veut pas qu’on grandisse le citoyen Bonaparte, comme le ferait la commission exécutive par une exclusion timide. Traitant de folles, de criminelles les expéditions de Strasbourg et de Boulogne, M. Jules Favre affirme que rien d’analogue ne saurait se reproduire. « Si le citoyen Bona-