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CYBÈLE

Nos politiciens militants n’en laissent guère apercevoir d’autre dans leurs luttes quotidiennes auxquelles le bon peuple abusé ne comprend rien. Monter à l’assaut du pouvoir et des avantages qu’il procure, tout est là. Le conquérir n’est pas facile et le garder, plus difficile encore, et dans ces batailles incessantes qui ne laissent pas un gouvernement debout plus de quelques jours à peine, toute arme est bonne pour réussir ; toute question, tout incident, tout intérêt ou même tout danger national, n’est jamais envisagé qu’au seul point de vue de ce que cela peut servir aux partis aux prises pour la défense ou l’attaque. Qu’importe par exemple l’avenir colonial ou la grandeur extérieure de la France, qu’importe que l’on sacrifie une prépondérance séculaire, des intérêts supérieurs même de civilisation et qu’on livre l’Égypte à l’Angleterre ? Ne faut-il pas avant tout renverser le Cabinet ?

On est ainsi alternativement de l’opposition ou du pouvoir. Quand on est au pouvoir, on se sent si bien entouré de traquenards et de chausses-trappes, qu’on n’ose guère bouger le char de l’État crainte des embûches ; et quand on est de l’opposition, on ne vise plus qu’à enrayer ou à faire dérailler le dit char, parce que s’il marchait bien, la situation serait trop belle pour les adversaires qui le conduisent. Telles sont, appliquées à notre tempérament, les