Page:Andry - Traité des aliments de carême, 1713, tome II.djvu/56

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differens l’un de l’autre ; le blanc est moins fort & plus usité : mais soit le blanc ou le noir, le poivre est un assaisonnement rude & piquant, dont l’usage ne sçauroit être trop rare parmi ceux qui ne font pas un grand exercice de corps. On comprend aisément que les gens de la campagne, les ouvriers qui s’exercent à des travaux pénibles, & qui sont accoûtumez à une nourriture grossiere, aïant par conséquent les fibres plus dures & plus fortes, ne sçauroient se sentir incommodez de cette sorte d’assaisonnement, qui fait à peine impression sur eux ; on comprend même, qu’ils ont besoin de mêler dans leur nourriture quelque chose d’agaçant, sans quoi les fibres de leur langue & de leur estomac, fortes & solides comme elles sont, demeureroient comme immobiles ; mais aux personnes d’une constitution ordinaire, le poivre ne peut être que trés-dangereux, en heurtant trop violemment des fibres tendres & délicates, qui n’ont qu’une résistance médiocre. D’ailleurs cet assaisonnement, pour peu qu’il excede, porte avec soi une impression de feu trés-pernicieuse au sang, aux vaisseaux, & à tous les visceres : au sang, en en dissipant la partie la plus subtile : aux vaisseaux, en leur faisant violence, & leur ôtant leur sou-