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notre langage, à notre nation et à notre race i, que ^ l'Humilité a réduit plus d'un génie à l'existence d'un hermite, mais n'en a jamais élevé un à la renommée. ^ Que si quelque critique relève le mot gmie, l'auteur lui dit, une fois pour toutes, que certainement il se considère comme doué de quelques dispositions poétiques ; autres ment la façon dont il publie ses œuvres serait une manœuvre au-dessous du pire jugement que, il l'espère, ses pires ennemis porteront jamais sur lui. Mais au génie d'un Ramsay ou à la glorieuse aurore du pauvre et infortuné Fergusson, il déclare avec la même simplicilé et la même sincérité, qu'il n'a pas la plus lointaine prétention, même pendant les plus hautes poussées de sa vanité. Dans les pièces suivantes, il a souvent tourné son regard vers ces deux poètes écossais, justement admires, mais plutôt pour s'allumer à leur flamme qu'en vue d'une imitation servile.

A ses souscripteurs, l'auteur envoie ses plus sincères remerciements. Ce n'est pas le salut mercenaire par-dessus un comptoir, mais la gratitude profonde et cordiale du poète qui sait combien il doit à la bienveillance et à l'amitié pour lui permettre de gratifier — s'il le mérite — le vœu le plus cher de tout ca>ur poétique : être distingué. 11 prie ses lecteurs, en particulier les Instruits et les Polis, qui iwurront lui faire l'honneur de le parcourir, de tenir compte de l'éducation et des circons- tances de sa vie. Mais si, après un examen juste, sincère el impartial, il est convaincu de lourdeur et de niaiserie, qu'il soit traité comme il traiterait les autres dans le même cas — (ju'il soit condamné sans merci au dédain et à l'oubli.

Le volume se composait presque entièrement des pièces écrites pendant l'année 1785 et les premiers mois de 1786. Il est à remarquer que quelques-unes de ses principales pièces n'y figuraient pas. Peut-être par un sentiment de réserve Burns avait-il omis : la Mort et le B^ Hornhooh et la Prière de Saint WilUe. Quant aux Joyeux Mendiants, cette incompa- rable production semblait être sortie entièrement de sa mémoire. Ce volume était principalement fait de ses poèmes rustiques, de ceux qui ont le plus le goût de terroir, et dépeignent les mœurs et les supersti- tions de la campagne. Il ne représentait réellement que la moitié de son génie poétique. Pas de chansons ; le don de musique qui était en lui y était à peine indiqué. Dans le volume entier, il n'y en a que trois véritables. Mary Morison, cette chose exquise, bien que dès lors en manuscrit, n'est pas du nombre. Parmi les trois choisies pour être publiées, une au moins, les Sillotis d'orye, est de première excellence ; les deux autres sont bonnes. On peut dire que ces quelques strophes étaient uniquement la promesse de ce que le monde devait entendre de ses lèvres dans ce genre de poésie. C'est par elles seulement qu'une oreille perspicace pouvait deviner cette mélodie encore mystérieuse, qui devait plus tard être révélée au monde, faire de lui un des chantres les plus hauts et, selon l'expression du D' Hately Whaddelb, un des psalmistes de son pays.

La vente du volume fut tellement rapide que, le 26 août, moins d'un mois après la mise en vente, il ne restait plus que quinze exemplaires -.

1 Shenstone.

'2 R. Chambers, lom I, p. 36i. Appendix 10 : Sale of the Kilmarnock édition.

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