Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/361

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Cette troupe était sous les armes, comme celles du Port-au-Prince, dès l’arrivée des bandes d’Halaou : son indignation fut à son comble, en apprenant ce bruit ; mais la discipline la contint dans ses rangs.

Sur ces entrefaites, il paraît que deux officiers de la légion avaient été expédiés par Pinchinat et Montbrun, avec mission de faire immoler Halaou.

De son côté, Marc Borno, chef d’escadron de la gendarmerie ou cavalerie de la légion de l’Ouest, commandant alors le fort de Bizoton, apprend là le bruit qui circulait en ville sur le projet de l’assassinat de Bauvais. Ami intime et dévoué de celui-ci, il quitte immédiatement son poste et se rend au Port-au-Prince. Il rencontre Drouillard, un de ses amis, qui lui confirme les appréhensions que l’on a. Marc Borno se porte naturellement, par devoir militaire, auprès de Montbrun, commandant de la province : il le trouve avec Pinchinat, et ces deux chefs, l’un politique, l’autre militaire, lui communiquent leur pensée, la résolution qu’ils ont prise de faire périr Halaou. Aussitôt, Marc Borno franchit à toute bride les trois lieues qui séparent la Croix-des-Bouquets du Port-au-Prince.

Que se passait-il dans ce bourg depuis l’arrivée d’Halaou et de ses gens ? Bauvais, qui ignorait les appréhensions de l’opinion générale ; incapable de tendre un piège à Halaou, par la droiture de ses sentimens, par la loyauté de son caractère ; trop brave, trop courageux, pour craindre cet homme et pour concevoir lui-même l’idée d’un meurtre ; Bauvais l’avait invité avec quelques-uns de ses sorciers à entrer chez lui pour leur faire servir des rafraîchissemens : ils étaient tous assis autour d’une table, Halaou tenant toujours son coq blanc.