Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/480

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puis deux ans, et après avoir été d’abord les instrumens des contre-révolutionnaires, ils combattaient pour leur liberté, et on ne pouvait plus espérer de les faire jamais rentrer dans le devoir…

Les fautes des malheureux noirs, je le répète, ne sont, y n’ont jamais été que les crimes de ceux qui les égarent après les avoir opprimés. Les noirs ne sont pas cruels, comme des colons blancs aiment à le dire ; et l’existence de leurs ennemis prouve assez que les noirs sont patiens, exorables et généreux. Les noirs ont même le germe des vertus : ces vertus leur appartiennent ; leurs défauts seuls viennent de nous. Ils sont naturellement doux, charitables, hospitaliers, très-sensibles à la piété filiale ; ils aiment la justice et ont le plus grand respect pour la vieillesse. Ces vertus, Peuple français, les rendent encore plus dignes de toi[1]

Autrefois, ils n’étaient pas obligés de défendre leurs chaînes, mais aujourd’hui, en reconnaissance du nom de Français qu’ils vous devront, ils consacreront tous leur vie à votre service, et ils sont à Saint-Domingue au nombre de 400 mille à votre disposition, dont il ne tient qu’à vous de faire autant de soldats. Déjà, en attendant vos ordres, à la première nouvelle de l’invasion des Anglais, ils ont commencé, dans le Nord, par jurer de périr tous jusqu’au dernier, et de s’ensevelir sous les décombres de Saint-Domingue, plutôt que de recevoir une domination étrangère. Dans une explosion de zèle et de dévouement généreux, ils disaient : Si nous sommes forcés de nous replier faute de munitions, nous ne laisserons que des ruines et des cendres ; nous

  1. Dufay justifia les assertions d’Hilliard d’Auberteuil. (Voyez l’introduction).