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l’État pour le rationnement des troupes privées de vin. À Jacmel, il s’empressa de se livrer à de nouvelles spéculations, sans doute pour se récupérer des pertes qu’il avait faites au Port-au-Prince, et, dit-il, pour procurer à la garnison de Jacmel les objets dont elle avait besoin. Dans ce but, il envoya à Saint-Thomas un officier nommé Geoffroy qui dut apporter de là, des armes, de la poudre, des effets d’habillement, de la farine, etc. Il chargea aussi un négociant de Jacmel de faire venir de l’étranger de semblables objets, toujours dans les vues de les vendre à l’État.

En général, on peut le dire, c’est toujours une chose fâcheuse pour un chef supérieur de s’occuper de telles affaires, dans son intérêt personnel. C’est surtout quand les inférieurs sont dans le dénuement, qu’ils sont le plus portés à lui reprocher de faire valoir ses intérêts, même alors qu’il se propose de leur être utile. Ces spéculations de Montbrun déplurent aux officiers sous ses ordres ; ils l’accusèrent de spéculer sur les fonds de la République, d’avoir un esprit d’avidité, d’accaparement. Une loi de la convention nationale avait prévu ce cas et défendu de telles choses, sous des peines sévères. Ceux qui avaient mission de se défier de Montbrun et même de l’arrêter, ne trouvant pas de motifs dans sa conduite militaire et politique, saisirent celui-là. C’était un prétexte qui devait couvrir ce qu’il y aurait d’odieux dans son arrestation. On conçoit d’un autre côté, que Montbrun ne dut pas ignorer les rumeurs, les plaintes qu’on formait tout bas, et qu’il en fut aigri.

Cependant, il laissa Bauvais à Jacmel et se rendit le 25 juillet sur son habitation située dans la paroisse d’Aquin. Étant là, il apprit, dit-il, les menées qu’on ourdis-