Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 4.djvu/101

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aurait le commandement en chef de toute l’armée, et se rendit ensuite au Port-au-Prince.

Partout, au passage des troupes, les blancs colons manifestèrent la joie la plus vive : les choses allaient selon leur désir ! Au Port-au-Prince, l’armée étant entrée de nuit, la ville fut illuminée par eux. Bernard Borgella, déjà influent dans les conseils du général en chef, se distingua dans cette illumination : il vit avec une satisfaction toute particulière, arriver le moment de réaliser enfin l’atroce projet que son triumvirat avec Borel et H. de Jumécourt avait formé en 1793.


Que vous avez été inconséquens, colons français !

Les mulâtres sont nés de vos œuvres avec les femmes noires. Vous avez donné la liberté civile à ces femmes et à vos enfans. À ces derniers, vous avez procuré l’instruction qui développe l’intelligence de l’homme. Une classe nombreuse a surgi dans la société coloniale : formée de ces premiers affranchis, et de noirs que vos libéralités ou des transactions pécuniaires entre eux et vous ont appelés également à la liberté, elle s’est accrue, elle s’est élevée par ses lumières. La législation de votre pays les a tous admis à la jouissance de leurs droits naturels, et vous avez trouvé étonnant qu’ils voulussent en profiter ! Pour conserver vos injustes prérogatives et continuer votre odieuse domination sur les autres hommes de la race, noire, loin de vous réjouir de ce que votre sang n’avait pas dégénéré dans les veines de vos enfans, vous avez imaginé de les faire proscrire ! Et votre détestable cupidité a trouvé des gouvernemens pour la seconder dans ce plan monstrueux !…

Eux et vous, vous ne sentiez donc pas que vous alliez