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mesures les plus sages, devinrent, comme eux, juges et parties dans leur propre intérêt contre les masses.

T. Louverture réalisa ainsi l’idée principale qui avait été le sujet de ses difficultés, de son dissentiment avec Biassou, et qui fut une des causes de sa soumission à Laveaux. En 1794, le moment n’était pas encore venu, les circonstances n’étaient pas favorables à l’exécution de ce plan, dans l’intérêt même des colons ; mais en octobre 1800, rien ne s’y opposait plus ; il l’exécuta[1].

L’article 2 du règlement du 12 octobre parle de punition à infliger aux gérans, conducteurs, cultivateurs et cultivatrices, avec la même sévérité qu’aux militaires ; c’est de la punition corporelle qu’il s’agit, la même qui était appliquée contre les Vaudoux.

Le condamné était placé entre deux lignes de soldats armés de verges épineuses, tirées principalement du bayahonde ; il était contraint de courir d’un bout à l’autre de l’enceinte où il était placé, pour que chacun des soldats pût le frapper de sa verge. Durant cette fustigation, les tambours battaient la charge comme à la guerre, pour exciter l’ardeur des soldats. Au commandant militaire présent et ordonnant la punition, était seul réservée la faculté (nous allions dire le droit ! ) de mettre un terme à ce supplice qui, parfois, était poussé jusqu’à la mort d’u patient, suivant l’exigence des cas, dit cet article 2[2].

Remercions Pétion et le Sénat de la République d’Haïti,

  1. Voyez tome 2 de cet ouvrage, p. 421, 422 et 431.
  2. Bien jeune encore, j’ai vu battre des verges des soldats et des cultivateurs sous T. Louverture en 1801, sous Dessalines, de 1804 à 1806.

    Citons ici un passage curieux et instructif de l’Histoire du consulat et de l’empire, par M. Thiers, relatif au régime établi par T. Louverture.

    Cet esclave noir, devenu dictateur, avait rétabli à Saint-Domingue un état de société tolèrable, et accompli des choses qu’on oserait presque appe-