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on n’en avait aucune nouvelle. À la pointe du jour, Papalier envoya son adjoint Brunet auprès de lui, pour savoir ce qu’il était devenu, et en même temps, il écrivit au général Guillaume Lafleur, commandant de l’arrondissement d’Aquin, de venir lui prêter main-forte avec la 17e qui y était et son colonel Vancol, et il donna avis de l’arrestation de Moreau, par une autre lettre au général Gérin qui se trouvait sur une habitation près de l’Anse-à-Veau. Il écrivit aussi à l’empereur pour l’informer de ces faits.

En ce moment, arriva aux Cayes un blanc franco-haïtien qui était le secrétaire du colonel Etienne Mentor ou Esmangart, inspecteur des cultures, Il rapporta qu’à 8 heures du soir, ce colonel avait été haché à coups de sabre par les dragons de Wagnac[1] ; que celui-ci avait pris parti avec les insurgés du Port-Salut, et que toute la population des campagnes s’y était ralliée.

La situation devint plus critique ; l’insurrection triomphait par l’adjonction de Wagnac, officier influent sur les populations et les troupes, aussi respectable que respecté, aimé de tous. Papalier se mit de suite en tournée à l’arsenal et dans les postes, ne sachant pas trop que faire, peut-être, ou probablement satisfait de la tournure que prenaient les choses ; car il était difficile qu’il se séparât d’une cause dans laquelle Wagnac s’était jeté avec résolution[2]. Cette indécision du commandant de l’arron-

  1. Etienne Mentor reçut plusieurs blessures ; mais il en guérit et vécut longtemps après, sans être un mauvais citoyen pour cela. À l’époque, on le considérait comme un Séïde de Dessalines ! C’est une particularité remarquable, que cet inspecteur de cultures portait un nom identique à celui de l’adjudant-général Etienne Mentor, qui fut aussi victime de cette révolution.
  2. Si ce fut réellement Wagnac qui ordonna l’arrestation de Moreau, tout s’explique : il y aurait eu alors conspiration entre les chefs des Cayes.