Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/157

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où l’hypocrisie monte jusqu’au comique, le livre de M. Renan est d’une grande tristesse ; il est triste comme un impuissant ! Malgré l’expression qui veut les réchauffer, on sent comme un froid vipérin s’exhalant de toutes ces pages mortes et déjà fétides, de toutes ces vésanies allemandes dont un Français avait mieux à faire que de se faire le chiffonnier ! M. Renan les met, il est vrai, à l’abri sous cette tolérance chère aux philosophes, sous ce paratonnerre où tombe le mépris ! Sans conclusion ferme et qui satisfasse même l’auteur, ces Études d’histoire religieuse ne sont guère qu’une collection glacée de huit à dix blasphèmes qui forment un symbole d’insolences ! En vain le recite-t-on fort bas, ce symbole, on l’entend. On veut être habile, on veut être discret et on n’est pas même spirituel. Les grands courants de la bêtise contemporaine traversent majestueusement le livre de M. Renan : l’optimisme béat, la foi dans l’humanité en masse qui fait bien tout ce qu’elle fait, et aussi en l’homme individuel dont M. Renan ne craint pas de dire qu’il crée la sainteté de ce qu’il croit et la beauté de ce qu’il aime. Il est presque incompréhensible qu’avec du talent, car M. Renan n’en manque pas, la pensée d’un homme incline fatalement ou de choix vers les thèses les plus niaises et maintenant les plus compromises. Anomalie singulière, mais non rare ! et dont la Critique littéraire est encore à chercher le mot ! Écrites avec pureté, et quelquefois avec une transparence colorée, ces Études, logiquement et scientifiquement sans valeur, ont des détails qui attireront, qui ont attiré déjà les esprits de peu de pensée et qui aiment l’expression partout où elle s’attache. Ils sont venus à