Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/277

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de sa fille, avec une grâce presque maternelle.

— Quand se réveillera-t-elle de cet assoupissement ? fit-il. Qui le sait ? Demain, — après-demain, dans deux heures. Nulle règle à cela ! Nul symptôme. Rien que la plus profonde obscurité. Seulement, quand elle se réveillera, elle versera de ces longues larmes qui tombent sur mon cœur comme du vitriol, et qui viennent encore plus de l’idée de retrouver la vie que de la détente de ses nerfs. Elle est encore plus malheureuse que malade, ma pauvre Calixte, et c’est par moi qu’elle est malheureuse…

Il n’acheva pas. Sa tête tomba sur sa poitrine, et il s’assit auprès du lit de cette enfant qui était peut-être tout son remords, toute sa conscience, une conscience que Dieu lui avait placée dans ses entrailles de père pour remplacer cette autre qu’il avait étouffée en lui. Il se taisait. Il était livré à la pensée qui ne le lâchait pas une minute, mais qui, par instants, le dévorait avec un acharnement plus cruel.

Le dernier mot de Sombreval trouva dans le cœur de Néel un écho, et il éveilla la voix du reproche. Lui aussi n’était-il pour rien dans l’état effrayant de Calixte ? Ce qui s’était passé entre elle et lui, cette après-midi même, n’avait-il pas déterminé la crise qu’il avait sous