Page:Barbey d’Aurevilly - À côté de la grande histoire, 1906.djvu/36

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trouvé encore le moyen de nous faire paraître ambitieuses.

Il est des esprits dont on pourrait dire qu’ils n’existeraient pas s’ils n’appartenaient à un cadre tout fait d’opinion, — comme il est des hommes qui n’auraient sur le champ de bataille aucune valeur personnelle s’ils ne faisaient pas partie d’une force organisée, par exemple d’un régiment. Hors du rang, ces hommes ne sont plus ! Tel, selon nous, est Beaumont-Vassy, intellectuellement. Ôtez l’opinion politique qu’on pourrait nommer, et dont il n’est pas nécessaire de démontrer ici le plus ou moins de justesse, ôtez cette opinion politique sous la tyrannie de laquelle il écrit, et vous n’avez plus rien dans ce livre sur l’empire russe. Tout ce qu’on y rencontre jonche la place depuis longtemps. Nul aperçu, nulle vue particulière à l’auteur n’y domine et n’y décide les conclusions de parti, qui ne s’y expriment pas, mais qui y soupirent. Beaumont-Vassy est un soupirant de l’alliance russe. Assurément, c’est là une opinion qu’on peut appuyer et défendre, mais un homme d’une certaine vigueur de jugement nous aurait donné la raison de la préférence de son esprit dans une question qui contient, en ce moment, l’avenir du monde. Eh bien, voilà ce que nous avons vainement demandé à son livre ! L’historien y manque, mais ce n’est pas tout. Il y manque l’histoire ! Car une statistique incertaine et des documents à la portée de tout le monde ne constituent pas