Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/39

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endroit unique comme le font la plupart de ses congénères, mais dans des cachettes distinctes. Un jour, le médecin lui présenta vingt-six gros os que l’animal s’empressa d’enterrer en vingt-six places différentes.

Le lendemain, le maître ne lui donna rien à manger, et le laissa dans le jardin. La bête se mit sur le champ en devoir de déterrer les os. Elle en retira dix exactement, mais elle s’arrêta quelques secondes, le regard fixe, comme si elle calculait combien il lui en restait encore en réserve, puis elle se remit à l’ouvrage.

Cette fois, elle en déterra, l’un après l’autre, neuf de plus, et, après un moment de réflexion, elle en mit six autres à jour. Elle considérait sa besogne comme terminée car elle se prit à dormir. Mais, tout à coup, semblant se rappeler qu’il devait lui rester un dernier os, elle se leva, courut dans le jardin et finit par rapporter le vingt-sixième.

«  Il était évident, ajoute le docteur Timofieff, que le nombre vingt-six était au-dessus de l’intelligence canine, c’est pourquoi le chien l’aurait divisé, en sa tête, en trois parts, comptant chacune séparément : malgré cette précaution, il allait commettre une erreur, et ce n’est qu’après mûre réflexion, qu’il s’aperçut de sa faute et pût la réparer.

«  Le chat est moins ferré, en calcul, que le chien et ne, sait point compter jusqu’à dix.

«  Avant de donner à mon chat, son morceau favori je le lui mettais devant le museau et le retirais aussitôt. De cette manière, j’habituais le chat à ne recevoir son repas qu’après avoir été trompé six fois. L’animal s’accoutuma à ces cérémonies : il assistait impassible aux cinq premières offres, et ce n’est qu’après la sixième qu’il bondissait pour recevoir le morceau.

«  J’ai renouvelé mes expériences pendant deux semaines, et le chat ne s’est pas trompé une seule fois.