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À PROPOS D’ART DRAMATIQUE



« C’est toujours par ce qu’elle contient de vérité qu’une œuvre nouvelle choque ses contemporains. C’est toujours et seulement pour ce qu’elle aura contenu de vérité que cette œuvre est appelée à subsister dans l’avenir. » Voilà la phrase qu’il faudrait inscrire au fronton de toute salle de spectacle, voilà l’éternelle et funeste contradiction dont se doit persuader l’écrivain de théâtre dès le début de sa carière. À lui de faire choix. Ce qui constitue son obstacle aujourd’hui sera sa gloire de demain, ce qui est sa sauvegarde aujourd hui sera plus tard sa ruine. Mais quelque route qu’il adopte cet écrivain peut tenir pour assuré l’aphorisme suivant : « Ce qui n’est pas vérité est destiné à périr, et s’il y a dans son œuvre une part quelconque de convention, en dépit du succès qui l’aura accueillie, ou du talent qui l’a défendue, cette part-là est d’avance frappée de caducité et de mort. »

La vérité ! Profond et difficile idéal. Source et fin de tout art. C’est avec un soin studieux et jamais lassé que les générations se passent le miroir où se réfléchit son image, sans jamais parvenir à l’embrasser tout entière. Et, cependant, l’inaccessible vérité est là sans cesse sous nos yeux. Ce n’est point un trésor caché ; elle se livre à nous comme une mère nourricière et patiente. Malgré cela, nous en sommes toujours dis-