Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 2, 1922.djvu/179

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GENEVIÈVE.

Pas encore, seigneur ! Tu m’effrayes !

ANDRÉ.

Mais c’est égal, maintenant que j’y pense, Geneviève, — je ne le dis pas pour m’excuser, — avoue que tu as rudement bien menti, sapristi ! Tu aurais eu du génie comme actrice, sais-tu bien ? Il n’y avait qu’une femme pour mentir ainsi ! Tu étais servie par l’espèce…

GENEVIÈVE.

Ah ! tu n’as pas compris !…

ANDRÉ, l’interrompant et lui prenant la tête.

Si, si, et ne crains pas, pauvre cher front, que je veuille diminuer le mérite que tu as eu… Sois tranquille, ton beau mensonge ne sera pas oublié… Il restera entre nous, mais plus que comme un vieux souvenir, une relique. Nous lui ferons des visites… On lui élèvera un mausolée… Et ce sera à la façon de ces orgueilleux propriétaires qui, ayant fait bâtir une villa de plaisance au bord d’une grève d’élection, inscrivent au fronton : « La belle Idée ! »

GENEVIÈVE.

Nous faisons une folie ! Ah ! tout cet effort perdu !… Alors, de tout cela, que reste-t-il ?

ANDRÉ.

Nous, notre pauvre nous.

GENEVIÈVE.

Comme avant ?

ANDRÉ.

Comme avant ! Il faut en prendre ton parti, que veux-tu ? Je suis ta chère bonne catastrophe.

GENEVIÈVE.

Tu me trahiras encore ! Ah ! la vie qui reprend !

ANDRÉ.

Ce n’est pas trop tôt !… Tu ne te doutes pas, en plus de tout, de ce qu’est devenu la maison, l’appartement, depuis que tu es partie !