Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 5, 1922.djvu/167

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plane, on dételle… Adieu !… C’était leur lot à eux d’aider les autres. Ils ne sont pas de la récompense… Ce sont des côtiers.

LA PRINCESSE.

Et c’est justice ! Ils ne pouvaient être que cela. Ce sont les ouvriers inférieurs. Ils n’ont ni le sang ni la race nécessaires pour guider l’attelage. Ils sont les victimes désignées de la vie, n’ayant pas le galbe qu’il faut pour la belle course… Oui, en avant, Pierre !… Débarrasse-toi de ta pitié… Ce que j’aime en toi, c’est que tu n’es justement ni un faible ni un sentimental !… Mais tu ne vois donc pas que je te délivre d’une erreur de jeunesse !… C’était un mariage que personne ne prenait au sérieux, une union régularisée, enfin… Tout ton passé de rapin fera place à ton âme d’artiste et d’aristocrate qui s’ignore.

BERNIER.

Ah ! ne me dis pas de choses désagréables, je te prie, aujourd’hui.

LA PRINCESSE.

Moi ? Où prends-tu que je te dis des choses désagréables ?

BERNIER.

Oui… si tu crois que je ne comprends pas ton petit ton.

LA PRINCESSE.

Ah çà !… Tu es fou !

BERNIER.

Parfaitement ! Je sais ce que je dis. C’est comme ton mari… il m’agace. Si tu crois que je ne l’ai pas vu, tout à l’heure, sous son polo et ses couvertures…