Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 6, 1922.djvu/166

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Gaston de Charance, qui était dans un état d’exaltation terrible à la suite de l’explication qui a suivi hier notre rencontre à Greenwich !… J’ai fait surveiller tous ses moindres gestes… Or, il est venu cet après-midi, à six heures, retenir la chambre 34…

ARMAURY.

La chambre 34 ?…

FANNY.

Oui, à deux pas de la tienne… Dès que j’en ai été avertie, je n’ai fait ni une ni deux, tu comprends !… Je me suis promis de passer la nuit ici, et j’ai bien fait !… Depuis que je suis installée dans ma chambre, je surveille le corridor, j’entr’ouvre la porte de temps en temps… Je l’ai même heurté une fois ; avec ce voile sur la tête il n’a pu me reconnaître !… Que va-t-il faire ? Je n’en sais rien ! Il joue le monsieur tranquille, l’étranger en smoking, qui fume sa cigarette… il sifflote sur les marches de l’escalier… Ah ! c’est abominable !… Alors, j’ai pensé que tu allais peut-être imprudemment ouvrir une porte… Ah ! mon Dieu ! Il faut tout prévoir !… Demain matin, tu allais sortir, ton intention était naturellement de sortir d’ici ?… Eh bien, il ne faudra pas… il ne faudra pas…

(Elle s’arrête. Un temps.)
ARMAURY.

Ma chère Fanny, je te remercie… Je comprends ton sentiment, j’en suis touché… Tout ce qui émane de toi est pur et délicatement inspiré… Mais, par grâce, ne t’occupe pas de ces affaires qui doivent être réglées entre hommes !… Je te vois dans un état d’énervement qui me prouve encore la vivacité de ton amour… (Il se reprend