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qui sont devenus des détracteurs de Visagier, bien qu’ils aient reçu de lui des bienfaits et des louanges.

Nicolas Bourbon de Vandœuvre[1], ami d’Érasme, de Rabelais et d’Holbein, précepteur de Jeanne d’Albret, mère de Henri IV, habitait Lyon depuis le mois d’octobre 1536, et était aussi un des admirateurs des deux Scève, à en juger d’après ses Nugæ. Dans une épître dédicatoire adressée à Guillaume Boston, abbé du couvent royal à Westminster, un des humanistes dont Bourbon avait fait la connaissance lors de son séjour en Angleterre, il promet à ce protecteur de lui envoyer des vers de Marot et des deux Scève pour qui il ne se montre pas avare de louanges[2]. — Dans une épigramme enfin du huitième livre de ses Nugæ, il prie Maurice Scève (après une longue série de ces compliments chers aux humanistes) de ne plus hésiter à publier ses œuvres.

Avec Bourbon de Vandœuvre nous avons terminé la liste des humanistes dont les traces d’une correspondance poétique avec Maurice Scève se sont conservées. Mais on aurait tort, sans doute, de conclure de l’absence des documents que Scève n’ait pas été en relations, bonnes ou mauvaises, avec quelques hommes des plus importants de la Renaissance française. Bonaventure Despériers demeurait à Lyon depuis 1535 pour collaborer avec Étienne Dolet à la publication des Commentaires de la langue latine ; compagnon d’un des meilleurs amis de Scève, il ne pouvait guère lui rester indifférent. Il remplissait en même temps la charge de secrétaire ou de précepteur chez une grande dame[3] et vaquait à divers travaux littéraires qui lui procuraient du pain. Il ne resta point étranger à la société élégante de Lyon (quand on considère les dédicaces de plusieurs de ses poésies, on arrive à croire qu’il la préféra même aux cercles humanistes), et il en fut même le poète d’occasion. Ainsi il a composé la description d’une fête à laquelle toute la bourgeoisie lyonnaise avait coutume d’assister : le Voyage de Lyon à Nostre Dame de l’Isle[4].

  1. G. Carré. De vita et scriptis Nicolai Borbonii. Thèse. Paris 1888.
  2. Rhythmos seu numeros, leporum et graciarum plenos utriusque Scaevae Gulielmi ac Mauricii Lugdunensium et Clementis Marotis Cadurci ingeniosi hominis, ad te mittam brevi, ne desit tibi quo pulmonem ridendo exerceas. (Épître liminaire du deuxième livre des Nugæ.) — L’intérêt très vif que Maurice Scève prend, dans quelques dizains de la Délie, à l’histoire de l’Angleterre, s’explique peut-être par des conversations avec Bourbon.
  3. A. Chenevière. Bonaventure des Périers. Sa vie, ses poésies. Thèse. Paris 1885. p. 35.
  4. Recueil des Œuvres de Bonaventure Despériers. Lyon 1544, p. 52 ff. Poésie adressée à Jean du Peyrat, chevalier de l’ordre du roi ei son lieutenant dans le Lyonnais, grand mécène dont le nom se rencontre souvent dans les vers latins des humanistes lyonnais, cf. article de Félix Desvernay dans Lyon-Revue tome 6, juin 1884. p. 319.