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LA FEMME DU DOCTEUR

laires, absolument incapables d’une croyance quelconque de quelque durée, sont toujours prêtes à prendre violemment telle forme imposée par l’individu élu qui a la foi et qui est ainsi d’une nature différente, quelque chose d’une force tellement supérieure à la foule, qu’il paraît à ses yeux un dieu ou un démon. Cromwell paraît, et tout à coup les griefs de la nation trouvent une voix. Voyez comment le roi et ses conseillers se couchent comme un champ de blé devant le souffle de la tempête, tandis qu’un homme avec une volonté de fer et une confiance sublime dans sa propre puissance se met au gouvernail d’un État en désarroi et se conquiert pour lui-même le surnom de Tigre des mers. Étant donné un certain John Laws ayant une confiance robuste dans ses projets financiers, toute la France délirera, prise d’une folie soudaine, on se battra et on s’écrasera dans la rue Quincampoix. Vienne un Luther, et tous les vieux abus papistes sont balayés comme des fétus devant l’ouragan. Vienne un Wesley, un croyant, l’homme qui est de force à prêcher quarante mille sermons et à parcourir des milliers de lieues, et soudain un million de disciples se lèvent dans ces temps dégénérés pour venir attester sa puissance.

Il est probable que l’influence de M. Colborne procédait de la même source. Il croyait en lui ; car, en sondant les transparentes profondeurs de son âme, il ne voyait aucun monstre vague et rampant, aucun de ceux qu’on nomme réticences, doutes, desseins contraires, désirs changeants, se hâtant de se cacher dans quelques sombres retraites, à son œil scrutateur. Il croyait en sa foi, parce que, de quelque façon qu’il l’étudiât, il n’y trouvait ni fêlure ni défaut. Cette his-