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sonnes dans cette ville seule, sans compter ceux qui périrent dans les autres villes et villages voisins.

L’Hécla lance ses feux à travers les glaces et les neiges d’une terre gelée ; ses éruptions sont cependant aussi violentes que celles de l’Etna et des autres volcans des pays méridionaux. Il jette beaucoup de cendres, des pierres ponces, et quelquefois, dit-on, de l’eau bouillante ; on ne peut pas habiter à six lieues de distance de ce volcan, et toute l’île d’Islande est fort abondante en soufre. On peut voir l’histoire des violentes éruptions de l’Hécla dans Dithmar Bleffken.

Le mont Vésuve, à ce que disent les historiens, n’a pas toujours brûlé, et il n’a commencé que du temps du septième consulat de Tite Vespasien et de Flavius Domitien : le sommet s’étant ouvert, ce volcan rejeta d’abord des pierres et des rochers, et ensuite du feu et des flammes en si grande abondance, qu’elles brûlèrent deux villes voisines, et des fumées si épaisses qu’elles obscurcissaient la lumière du soleil. Pline, voulant considérer cet incendie de trop près, fut étouffé par la fumée. (Voyez l’Épître de Pline le jeune à Tacite.) Dion Cassius rapporte que cette éruption du Vésuve fut si violente, qu’il jeta des cendres et des fumées sulfureuses en si grande quantité et avec tant de force, qu’elles furent portées jusqu’à Rome, et même, au delà de la mer Méditerranée, en Afrique et en Égypte. L’une des deux villes, qui fut couverte des matières rejetées par ce premier incendie du Vésuve, est celle d’Héraclée, qu’on a retrouvée dans ces derniers temps à plus de 60 pieds de profondeur sous ces matières, dont la surface était devenue, par la succession du temps, une terre labourable et cultivée. La relation de la découverte d’Héraclée est entre les mains de tout le monde : il serait seulement à désirer que quelqu’un, versé dans l’histoire naturelle et la physique, prît la peine d’examiner les différentes matières qui composent cette épaisseur de terrain de 60 pieds, qu’il fît en même temps attention à la disposition et à la situation de ces mêmes matières, aux altérations qu’elles ont produites ou souffertes elles-mêmes, à la direction qu’elles ont suivie, à la dureté qu’elles ont acquise, etc.

Il y a apparence que Naples est situé sur un terrain creux et rempli de minéraux brûlants, puisque le Vésuve et la Solfatare semblent avoir des communications intérieures ; car, quand le Vésuve brûle, la Solfatare jette des flammes, et lorsqu’il cesse la Solfatare cesse aussi. La ville de Naples est à peu près à égale distance entre les deux.

Une des dernières et des plus violentes éruptions du Vésuve a été celle de l’année 1737 ; la montagne vomissait par plusieurs bouches de gros torrents de matières métalliques fondues et ardentes qui se répandaient dans la campagne et s’allaient jeter dans la mer. M. de Montealègre, qui communiqua cette relation à l’Académie des sciences, observa avec horreur un de ces fleuves de feu, et vit que son cours était de 6 ou 7 milles depuis sa source jusqu’à la mer, sa largeur de 50 ou 60 pas, sa profondeur de 25 ou 30 palmes, et dans certains fonds ou vallées de 120 ; la matière qu’il roulait était semblable à l’écume qui sort du fourneau d’une forge, etc. (Voyez l’Hist. de l’Acad., an. 1737, p. 7 et 8.)

En Asie, surtout dans les îles de l’Océan Indien, il y a un grand nombre de volcans : l’un des plus fameux est le mont Albours auprès du mont Taurus à 8 lieues de Hérat ; son sommet fume continuellement, et il jette fréquemment des flammes et d’autres matières en si grande abondance que toute la campagne aux environs est couverte de cendres. Dans l’île de Ternate, il y a un volcan qui rejette beaucoup de matière semblable à la pierre ponce. Quelques voyageurs prétendent que ce volcan est plus enflammé et plus furieux dans le temps des équinoxes que dans les autres saisons de l’année, parce qu’il règne alors de certains vents qui contribuent à embraser la matière qui nourrit ce feu depuis tant d’années. (Voyez les Voyages d’Argensola, t. Ier, p. 21.) L’île de Ternate n’a que sept lieues de tour et n’est qu’un sommet de montagne ; on monte toujours depuis le rivage jusqu’au milieu de l’île, où le volcan s’élève à une hauteur très considérable et à