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THÉORIE DE LA TERRE.

pente. Un fleuve dont la pente seroit uniforme, et double de la pente d’un autre fleuve, ne devroit, à ce qu’il paroît, couler qu’une fois plus rapidement que celui-ci : mais il coule en effet beaucoup plus vite encore ; sa vitesse, au lieu d’être double, est ou triple, ou quadruple, etc. Cette vitesse dépend beaucoup plus de la quantité d’eau et du poids des eaux supérieures que de la pente ; et lorsqu’on veut creuser le lit d’un fleuve, ou celui d’un égout, etc., il ne faut pas distribuer la pente également sur toute la longueur ; il est nécessaire, pour donner plus de vitesse à l’eau, de faire la pente beaucoup plus forte au commencement qu’à l’embouchure, où elle doit être presque insensible, comme nous le voyons dans les fleuves : lorsqu’ils approchent de leur embouchure, la pente est presque nulle, et cependant ils ne laissent pas de conserver une rapidité d’autant plus grande que le fleuve a plus d’eau ; en sorte que dans les grandes rivières, quand même le terrain seroit de niveau, l’eau ne laisseroit pas de couler, et même de couler rapidement, non seulement par la vitesse acquise[1], mais encore par l’action et le poids des eaux supérieures. Pour mieux faire sentir la vérité de ce que je viens de dire, supposons que la partie de la Seine qui est

  1. C’est faute d’avoir fait ces réflexions que M. Kuhn dit que la source du Danube est au moins de deux milles d’Allemagne plus élevée que son embouchure ; que la mer Méditerranée est de 6 ¾ milles d’Allemagne plus basse que les sources du Nil ; que la mer Atlantique est plus basse d’un demi-mille que la Méditerranée, etc., ce qui est absolument contraire à la vérité. Au reste, le principe faux dont M. Kuhn tire toutes ces conséquences, n’est pas la seule erreur qui se trouve dans cette pièce sur l’origine des fontaines, qui a remporté le prix de l’académie de Bordeaux en 1741.