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ART. X. FLEUVES.

a écrit fort sensément sur cette matière, remarque très bien que la hauteur des levées qu’on a faites pour contenir le Pô, va toujours en diminuant jusqu’à la mer, en sorte qu’à Ferrare, qui est à 50 ou 60 milles de distance de la mer, les levées ont près de 20 pieds de hauteur au dessus de la surface ordinaire du Pô ; au lieu que plus bas, à 10 ou 12 milles de distance de la mer, les levées n’ont pas 12 pieds, quoique le canal du fleuve y soit aussi étroit qu’à Ferrare.

Au reste, la théorie du mouvement des eaux courantes est encore sujette à beaucoup de difficultés et d’obscurités, et il est très difficile de donner des règles générales qui puissent s’appliquer à tous les cas particuliers : l’expérience est ici plus nécessaire que la spéculation ; il faut non seulement connoître par expérience les effets ordinaires des fleuves en général, mais il faut encore connoître en particulier la rivière à laquelle on a affaire, si l’on veut en raisonner juste et y faire des travaux utiles et durables. Les remarques que j’ai données ci-dessus, sont nouvelles pour la plupart : il seroit à désirer qu’on rassemblât beaucoup d’observations semblables ; on parviendroit peut-être à éclaircir cette matière, et à donner des règles certaines pour contenir et diriger les fleuves, et prévenir la ruine des ponts, des levées, et les autres dommages que cause la violente impétuosité des eaux[1].

  1. Au sujet de la théorie des eaux courantes, je vais ajouter une observation nouvelle, que j’ai faite depuis que j’ai établi des usines, où la différente vitesse de l’eau peut se reconnoître assez exactement. Sur neuf roues qui composent le mouvement de ces usines, dont les unes reçoivent leur impulsion par une colonne d’eau de deux ou trois pieds, et les autres de cinq à six pieds de hauteur, j’ai été assez surpris