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ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENTS DE TERRE.

fait reculer de plusieurs milles par ses propres forces, il en a construit les digues et les côtes par ses torrents de laves ; et d’ailleurs, on sait, par la diminution de la rapidité du Charybde et du Scylla, et par plusieurs autres indices, que la mer de Sicile a considérablement baissé depuis deux mille cinq cents ans : ainsi l’on ne peut guère douter qu’elle ne continue à s’abaisser, et que par conséquent l’action des volcans voisins ne se ralentisse, en sorte que le cratère de l’Etna pourra rester très long-temps dans son état actuel, et que, s’il vient à retomber dans ce gouffre, ce sera peut-être pour la dernière fois. Je crois encore pouvoir présumer que quoique l’Etna doive être regardé comme une des montagnes primitives du globe, à cause de sa hauteur et de son immense volume, et que très anciennement il ait commencé d’agir dans le temps de la retraite générale des eaux, son action a néanmoins cessé après cette retraite, et qu’elle ne s’est renouvelée que dans des temps assez modernes, c’est-à-dire lorsque la mer Méditerranée, s’étant élevée par la rupture du Bosphore et de Gibraltar, a inondé les terres entre la Sicile et l’Italie, et s’est approchée de la base de l’Etna. Peut-être la première des éruptions nouvelles de ce fameux volcan est elle encore postérieure à cette époque de la nature. « Il me paroît évident, dit M. Brydone, que l’Etna ne brûloit pas au siècle d’Homère, ni même long-temps auparavant ; autrement il seroit impossible que ce poëte eût tant parlé de la Sicile sans faire mention d’un objet si remarquable. » Cette réflexion de M. Brydone est très juste ; ainsi ce n’est qu’après le siècle d’Homère qu’on doit dater les nouvelles éruptions de l’Etna : mais on peut voir, par les