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XXXVI
VIE DE MÉLANIE

allant au supplice, et c’était une parole bien ordinaire. Un bon père de famille léguait à ses enfants le chevalet, l’huile bouillante, le plomb fondu, les bêtes féroces, et c’était un héritage très envié.

Il y a, dans le récit de Mélanie, un certain nombre de pages intitulées : La Bonne Année. Privée de littérature, elle n’a pu trouver mieux pour désigner l’année de son enfance où elle a le plus souffert, celle qui précéda immédiatement 1846 et la célèbre Apparition. Lorsque, vers la fin de cette « bonne année », son père la retira de l’horrible condition où elle se trouvait chez un assassin tortionnaire, elle n’en eut que du chagrin, se jugeant frustrée et convoita aussitôt de plus hauts tourments qui lui furent prodigués un peu plus tard, comme la pluie torrentielle aux champs desséchés.

Cette enfance de Mélanie me fait penser quelquefois à celle d’Abraham, il y a cinq mille ans. Quelle étrange rêverie ! On est, semble-t-il, tout à fait au fond des temps. On est au lendemain de Babel, au surlendemain du Déluge. On est à Ur, en Chaldée, ville et contrée inconceva-