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Mon oncle mourut en 1788, âgé de quatre-vingt-neuf ans ; il me laissa pour héritage un nom vénéré et trois cent mille francs de fortune.

Les États de Languedoc, qui m’avaient comblé de faveurs, voulurent y ajouter encore, et leur députation auprès du Roi fut chargée de demander pour moi des lettres de noblesse et la décoration de l’ordre du Roi. Ils l’obtinrent sans peine, avec la permission de porter les marques de l’ordre avant ma réception. J’avais alors trente et un ans. Cette faveur était cependant le privilège exclusif des personnes qui avaient vieilli dans les services publics les plus éminents. Les lettres patentes et mes titres de noblesse[1] portent l’énumération de tout ce que j’avais déjà fait pour la chose publique.

Les États m’accordèrent en même temps une gratification de cinquante mille francs, que je n’ai pas perçue.

À cette époque, la convocation de l’Assemblée des notables, la faiblesse d’un ministère qui énervait le courage de tous les dépositaires de l’autorité, les agitations du peuple, tout annonçait une commotion politique dont aucun ne pouvait prévoir le résultat. Chaque jour, l’horizon politique s’obscurcissait de nouvelles vapeurs ; l’audace restait impunie, et le 14 juillet 1789 donna le signal d’une in-

  1. Ces lettres de noblesse étaient valables pour deux cents ans seulement.