L’hyver ameine il la mordante froidure
En ses mois ordonnez ? il faut estre en froideur.
L'Esté renflamme-il sa chaleureuse ardeur ?
Il faut du chaud bruslant endurer la pointure :
L'air est-il corrompu de pestilente ordure ?
Il faut tomber malade, & pallir de douleur,
Et du feu & de l'eau l'humeur & la chaleur
Nous encoffrent souvent dedans la sepulture :
Quelque fois nous treuvons un farouche animal,
Voire souvente-fois sous souffrons plus de mal
D'un homme envenimé, que d'un Tigre implacable,
Au fort de tant de maus encor refusons nous
Le secours de la Parque, autant facile & dous
Aus hommes vertueus, qu'au meschans dommageable.
Tantost la crampe aus piés, tantost la goute aus mains,
Le muscle, le tendon, et le nerf te travaille ;
Tantost un pleuresis te livre la bataille,
Et la fievre te poingt de ses trais inhumains ;
Tantost l’aspre gravelle espaissie en tes reins
Te pince les boyaus de trenchante tenaille :
Tantost une apostume aus deux poumons t’assaille,
Et l’esbat de Venus trouble tes yeux serains.
Ainsi en advient il à quiconque demeure
En la maison d’autruy, mais s’il faut que tu meure,
Tu deviens aussi tost pensif et soucieus :
Helas aimes tu mieus mourir tousjours en doute
Que vivre par la mort ? celuy qui la redoute
Ne fera jamais rien digne d’un homme preus.