Page:Chtchédrine - Trois contes russes.djvu/43

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courant de la vie et à s’amuser. Les sages de ce monde comprirent qu’ils étaient enfin affranchis du dernier lien qui entravait leurs mouvements, et il va sans dire qu’ils s’empressèrent de recueillir les fruits de cette liberté. C’était à qui ferait rage ; il n’y eut que rapine et que vols ; ce fut le commencement d’une ruine générale.

Cependant la malheureuse conscience gisait toute lacérée sur la voie publique. Les passants la conspuaient et la poussaient du pied. Chacun la piétinait comme on aurait fait d’une méchante loque ; chacun se demandait avec étonnement comment il se pouvait faire que dans une ville bien policée, et à l’endroit le plus fréquenté, pareil scandale pût s’étaler au grand jour.

Dieu sait si la pauvre proscrite ne serait pas demeurée longtemps en cet état sans un infortuné ivrogne qui la ramassa après